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Compétences

22 novembre 2017, 09:21

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Est-ce qu’on s’étonne, malgré les incitations fiscales et autres facilités, pour un retour au Sweet Home, que les membres de la diaspora mauricienne aient jusqu’ici carrément boudé le Mauritian Diaspora Scheme, figurant dans les deux derniers Budgets de l’Alliance Lepep ? Alors qu’ils sont 195 000 à oeuvrer sous d’autres cieux – en Australie, au Royaume-Uni, en France et au Canada –, soit quelque 15 % de la population du pays, seulement une centaine jusqu’ici ont pris avantage de cette mesure. Pourquoi ?

Sans doute ne peut-on pas les blâmer. Car même à des dizaines de milliers de kilomètres du pays, ces Mauriciens généralement en fin de carrière ayant servi dans de grandes institutions internationales ou ces jeunes, formés dans de prestigieuses écoles américaines et européennes, savent pertinemment bien, à travers les réseaux sociaux et leurs proches au pays, que l’image qui leur est renvoyée est malheureusement loin de les rassurer et ne rend pas forcément justice à leurs compétences.

On peut être foncièrement patriote et être disposé à apporter son expertise dans des créneaux économiques hautement spécialisés ou dans d’autres sphères de la société où les compétences font cruellement défaut. Mais quand on fait face à un mur d’incompréhension et que l’on observe qu’il n’y a plus de méritocratie, ni d’égalité de chances dans le pays, ces Mauriciens de la diaspora ne feron que reprendre le chemin du retour. Entre-temps, c’est l’image du pays qui prend un sale coup. D’ailleurs, la Fondation Mo Ibrahim vient de rappeler cette cruelle vérité aux autorités dans son dernier indice de bonne gouvernance en Afrique, même si le pays a conservé sa première place en matière de gouvernance en Afrique continentale.

Dans le même registre, il y a des signes qui ne trompent pas. Quand un gouvernement parvient difficilement à trouver des cadres expérimentés en poste ou en retraite pour constituer le conseil d’administration d’une institution aussi importante que l’Economic Development Board trois mois après que le projet faisant provision de sa création a été adopté, il y a forcément des questions à poser. Certes, on a trouvé son président, Charles Cartier, un professionnel de Business Process Outsourcing.

Loin de mettre en doute ses compétences et sa vision pour cette institution, on peut toutefois s’interroger s’il peut légitimement être considéré comme «the right man in the right place» pour donner à l’EDB le souffle nécessaire afin de réaliser ses ambitions, dont la plus importante reste son rôle de «think tank» pour réfléchir sur la planification économique du pays. Autant qu’on sache, le nouveau président de l’EDB, homme affable, admettons-le, n’a pas un rayonnement national. Espérons qu’il prouvera le contraire quand le Board sera entièrement constitué avec la nomination de son directeur général.

En attendant, les regards sont braqués sur le bâtiment du Trésor, qui est secoué sous le poids des scandales alors que les opérateurs, qui privilégient le long terme pour leurs investissements, se posent des questions sur la pérennité, voire la fragilité, de ce gouvernement. Aujourd’hui, force est de constater que Pravind Jugnauth passe plus de temps à se défendre politiquement et à jouer les pompiers de service pour éteindre le feu des incendiaires de son gouvernement – ils se reconnaîtront – que de donner le temps au temps pour être à l’écoute des décideurs économiques, de leurs angoisses ou de leurs ambitions pour le pays. Ici-même, dans ces colonnes, on a plus d’une fois insisté que le Premier ministre doit savoir que le portefeuille du ministre des Finances est un job à plein temps et que soit on l’est, soit on ne l’est pas. C’est une équation simple à laquelle Pravind Jugnauth doit plus que jamais réfléchir, à quelques semaines de ses trois ans au pouvoir.

Sans doute, il ne sert à rien au Premier ministre de multiplier sa présence à des inaugurations de conférences à caractère économique ou financier ou de rencontrer épisodiquement les dirigeants de Business Mauritius, que le Chairman de SBM Holdings a qualifiés de «bouffons» dans l’édition d’Africa Report, pour «débloquer» une problématique. Cela ressemble beaucoup à des shows que ses «spin doctors» organisent maladroitement pour lui.

Les industriels, qu’ils soient locaux ou étrangers, souhaitent au contraire que le pays retrouve le «feel-good factor», que ses ministres et proches collaborateurs cessent les dérapages verbaux à moins que le PM ne prenne une police d’assurance contre les propos indécents et incendiaires de ses pairs et qu’il replace l’économie au centre des priorités du gouvernement.

Est-ce si difficile à réaliser quand on a promis au peuple des lendemains meilleurs et aux opérateurs une nouvelle vision économique ? Le réveil va bientôt sonner …