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2017: l’économie à l’épreuve de la politique
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2017: l’économie à l’épreuve de la politique
Les années se suivent et se ressemblent. Car, telle une guigne, la politique continue de disputer le premier rôle à l’économie. C’est sir Anerood Jugnauth qui place la politique en orbite, cette année, lorsqu’il cède le pouvoir à son fils le 23 janvier. Dès lors, les dés étaient jetés et avec l’élection partielle de Belle-Rose/Quatre-Bornes, la politique a régné sur 2017 jusqu’au réveillon de Noël.
Quoi qu’on dise, cette emprise systématique de la politique sur la vie du pays ne manque pas d’avoir des répercussions sur l’activité économique. Non seulement, elle est source de distraction pour ceux qui sont dans l’exercice du pouvoir, mais elle a aussi tendance à rendre frileux certains agents économiques dans la mesure où des décisions d’investissement sont reportées.
Certes, Maurice n’est pas en proie à une grande instabilité politique, heureusement d’ailleurs, mais toujours est-il que des événements comme la démission forcée d’un ministre provoquent inévitablement des turbulences et suscitent des interrogations sur l’avenir du gouvernement. Maintenant, lorsque deux ministres sont contraints de rendre leur tablier à quelques mois d’intervalle, l’impact est d’autant plus retentissant. Et c’est encore plus compliqué à gérer ! Pravind Jugnauth en sait quelque chose pour avoir été amené à montrer la porte de sortie à Ravi Yerrigadoo, ministre de la Justice, et à Showkutally Soodhun, vice-Premier ministre et ministre du Logement. La pression populaire a également eu raison du secrétaire parlementaire privé, Kalyan Tarolah, éclaboussé par une affaire de sextos.
Malgré ce contexte peu propice à l’épanouissement économique, l’on note malgré tout quelques éclaircies. Au point d’inciter Statistics Mauritius à maintenir ses estimations initiales. Selon les calculs de l’institut des statistiques en date du 22 décembre, nous sommes parvenus au seuil de 4 % cette année, mais sans l’atteindre. La progression n’a été que de 0,1 point de base passant de 3,8 % en 2016 à 3,9 % (PIB réel aux prix du marché). Tenant compte de la valeur ajoutée brute (GVA), nous sommes à seulement 3,7 % en 2017.
De guerre lasse par les années de stagnation, les agences de projection croient, cette fois-ci, avoir décelé une nouvelle courbe. Même le Gouverneur sortant de la Banque de Maurice, Ramesh Basant Roi, avait, dans ses commentaires à l’issue de la dernière réunion du comité de politique monétaire, relevé des signes d’une tendance haussière de l’économie.
Un secteur particulier se trouve au cœur de cette croissance qu’on dit en gestation : la construction. Après une année morte de 2016, l’industrie du BTP a rebondi de 7,5 %. Une performance qui aurait pris de court les analystes de Statistics Mauritius qui tablaient au départ sur 7 %. Sur la base des projets complétés durant les neuf mois se terminant en septembre et en comptabilisant les travaux en cours au dernier trimestre, l’investissement est estimé à Rs 79,96 milliards en hausse par rapport aux Rs 74,99 milliards injectées dans l’économie en 2016.
Les perspectives devront demeurer positives dans les mois à venir, à en croire les analystes locaux et étrangers. Le Fonds monétaire international croit savoir que l’activité sera tirée par l’ambitieux programme de dépense publique, ainsi que le dynamisme dans le tourisme et l’intermédiation financière. Les estimations montrent, en effet, que l’hébergement et la restauration, de même que la finance ont enregistré des taux de croissance de 5,6 % et 5,5 % respectivement. Un recul est également noté sur le plan du chômage. Le taux passe de 7,3 % en 2016 à 7,1 %.
En revanche, la situation a été beaucoup plus compliquée cette année pour le secteur d’exportation. Celui-ci n’a crû que de 1,8 % d’une année à l’autre pour atteindre Rs 196,64 milliards en 2017. En termes réel, la croissance n’a été que de 0,1 %. Eu égard à la grande fragilité de ce secteur, le gouvernement a dû, dans le courant de l’année, voler à son secours en introduisant un Exchange rate support scheme dans le but de mitiger l’impact de la fluctuation des principales devises sur les entreprises tournées vers l’export.
Ce qui pousse à dire que rien n’est joué, même si les instituts de projections tels que Statistics Mauritius, la Chambre de Commerce et d’Industrie ou encore la Banque de Maurice estiment pour la plupart que la barre de 4 % de croissance sera franchie l’an prochain. Nous ne sommes pas à l’abri d’un glissement vers la complaisance croyant que ce taux psychologique est acquis.
Le Fonds monétaire international met d’ailleurs en garde les pouvoirs publics. «Further reforms are necessary to meet emerging cost competitiveness challenges. While recent reform efforts will likely bolster Mauritius’ position in the Doing Business rankings, broader structural reforms in areas such as the labor market, higher education, innovation, governance and anti-corruption (e.g. effective use of AML tools and strengthened asset declaration system) policies will be key drivers of Mauritius’ economic transformation going forward», souligne l’institution.
Souvent mise à l’index, l’incapacité structurelle de certains départements de l’État à assurer efficacement la mise à exécution et le suivi des chantiers perturbent également les ambitions économiques. Couplé aux distractions politiques, le cocktail est détonnant. La preuve ayant été faite cette année encore !
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