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Davos et Modi
Capitale de la mondialisation, le forum économique de Davos s’est imposé, au fil du temps, comme rendez-vous annuel incontournable de l’élite politique et économique de la planète.
Aujourd’hui, les nouveaux seigneurs de l’économie mondiale souhaitent faire comprendre aux 70 chefs d’État et aux 1 900 dirigeants d’entreprises présents actuellement en Suisse qu’il faudra compter sur eux à l’avenir pour redessiner l’architecture économique mondiale.
À l’instar de la Grande péninsule et de son Premier ministre, Narendra Modi, qui dirige la plus forte délégation d’hommes d’affaires à Davos après une période de 20 ans. Une présence que le dirigeant indien veut dignement marquer au forum à travers son nouveau positionnement économique à l’échelle mondiale.
Car l’avènement de cette 48e réunion annuelle du Forum économique mondial (23 au 26 janvier) coïncide également avec le classement d’un cabinet anglais, Centre for Economics and Business Research (CEBR) qui place l’Inde comme la cinquième puissance économique mondiale en 2018 après les États-Unis, la Chine, le Japon et l’Allemagne, mais avant la France et le Royaume-Uni, son ancienne puissance coloniale.
Ce classement rend certes justice à ce pays de 1,3 milliard d’habitants, qui est en train de trouver un rang à sa taille après une croissance économique moyenne de 7 % depuis une vingtaine d’années. L’Economist Intelligence Unit (EIU), qui fait partie du groupe The Economist, classe l’Inde dans ses dernières prévisions comme «the world’s fastest-growing large economy» avec une croissance de 7,8 % cette année.
Conscient de la taille de son pays et de sa nouvelle force de frappe, Modi s’est, depuis son installation en 2014, comporté beaucoup plus comme un businessman que comme un dirigeant politique, vantant les qualités de son industrie et le «brain power» de ses cadres dans ses nombreux déplacements à travers le monde.
Le Premier ministre indien, n’aura pas d’autre message aux puissants de ce monde présents à Davos que de rappeler un fait brutal : que l’Inde demeure une puissance économique avec laquelle il faudra compter à l’avenir dans cette région asiatique où figurent étrangement trois des cinq plus grandes puissances mondiales.
Certes, si l’économie indienne s’est fortement libéralisée, si les secteurs miniers, ceux de la construction automobile et des services informatiques ont servi de moteurs et ont fait exploser la consommation, il reste que l’Inde a ses propres réalités et demeure un pays des extrêmes.
Car aujourd’hui, un Indien sur cinq vit sous le seuil de pauvreté alors que dans le haut du panier, 10 % de la population détient plus de la moitié des richesses du pays. Des inégalités que les spécialistes trouvent bien plus prononcées qu’en Chine et que Narendra Modi avec son BJP (Bharatiya Janata Party),la principale composante de la coalition gouvernementale au pouvoir, tente de réduire mais sans grand succès.
La réalité est que ce pays n’arrive pas à redistribuer ses richesses alors que, de l’autre côté, il n’y a que 7 % d’Indiens seulement qui paient des impôts sur les revenus, l’un des plus bas au monde (10 % pour ceux touchant entre 200 000 et 500 000 roupies indiennes). Deux récentes mesures économiques, la démonétisation et l’introduction de GST («Goods & Services Tax») ont momentanément freiné sa croissance l’année dernière.
Maurice saura-t-elle prendre avantage du nouveau positionnement de l’Inde à l’échelle mondiale, en s’appuyant sur le partenariat économique et son influence géopolitique (droits de souveraineté sur les Chagos) dans l’océan Indien ?
Sans doute, Davos et son glamour n’intéressent pas Pravind Jugnauth. Un an déjà au pouvoir où des énergies ont été dépensées à gérer les crises intestines et les scandales à répétition. Il a tort de ne pas exploiter ce filon qui peut potentiellement générer des dividendes, en termes de contrats et d’investissements. Tout est une question de réseaux. Nombreux sont des chefs d’État africains qui l’ont compris. Navin Ramgoolam inclus, même si les résultats peuvent être discutables.
Aujourd’hui plus qu’hier, les relations ne se jouent plus sur les liens culturels ou historiques. Elles relèvent plus de la sphère économique, voire géopolitique. Fini Mother India…
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