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Les révoltes de 1968
«La barricade ferme la rue, mais ouvre la voie», étudiant anonyme.
L’imagination prend le pouvoir. Il y a 50 ans, le monde entame sa mue. La rue gronde, à Maurice, comme ailleurs. C’est une année ponctuée de révoltes et de revendications multiples. Les sociétés aspirent au changement et rejettent l’ordre établi. La dénonciation de la guerre américaine au Vietnam devient une cause fédératrice. Depuis plusieurs mois, la contestation grandit. De gigantesques manifestations pacifiques se tiennent tous les jours. Le Vietnam, symbole du mouvement anticolonialiste, se retrouve pris entre les tenailles de la guerre froide. Pour repousser le communisme, Washington, D. C. s’engage dans une longue et éreintante guerre avec la partie nord du Vietnam. Jusqu’à trois millions de soldats américains sont mobilisés. Malgré ces moyens démesurés, les États-Unis vont subir ce qui restera la plus grande défaite de leur histoire. Les documents historiques prouvent que le Pentagone a largué deux fois plus de bombes que contre les Allemands, lors de la Seconde Guerre mondiale – c’est dire. La résistance des Vietnamiens (avec Ho Chi Minh en tête) force l’admiration à travers le monde. Surtout aux States, où de violentes manifestations éclatent sur les campus universitaires (des étudiants seront même tués).
1968 marque aussi l’assassinat de Martin Luther King. Cela se produit moins d’un mois après notre Indépendance. Le prix Nobel de la Paix (1964) est assassiné le 4 avril par un ségrégationniste blanc au Tennessee. Des émeutes secouent les grandes villes américaines. Peu après, le président Lyndon Johnson signe la loi sur les droits civiques, réclamée par Luther King. Le mois suivant le monde assistera à la révolution des étudiants à Paris. Ce qui est une agitation universitaire tourne à l’insurrection dans la nuit du 10 au 11 mai. Il y a des barricades, des incendies de voitures et les charges de la police anti-émeutes au Quartier Latin. La grève générale déclenchée le 13 paralyse tout le pays. Décontenancé, le gouvernement de de Gaulle se ressaisit, avant de remporter les législatives de juin. Cuisante défaite politique de la gauche, mais avancée de la cause sociale. Mai 1968 va marquer les esprits des jeunes d’autres pays. Les étudiants mauriciens et les enseignants feront leur ‘mai’ sept ans plus tard. Et au bout, ils arracheront l’éducation secondaire gratuite de SSR.
Alors que la démographie mondiale progresse à la vitesse grand V, les médias se font l’écho des malaises qui traversent le monde. Celui des jeunes et des femmes en particulier, qui affirment leur identité et leurs valeurs, et également leur refus de l’immobilisme des autorités traditionnelles. La classe ouvrière, désormais instruite, conteste aussi l’autorité établie, celle du patronat, mais également l’autorité politique, et revendique plus de considération au travail. L’une des critiques les plus vives concerne le contrôle de l’audiovisuel par le pouvoir. Une question qui reste d’actualité à Maurice, à en croire les manoeuvres des uns et des autres alors que 2019 se profile.
En ce monde bousculé par l’arrivée inattendue d’un Donald Trump qui veut armer des enseignants, après le séisme du Brexit (une mutation du colonialisme), peut-on tomber d’accord sur le fait que la rupture de 1968 reste mal évaluée à plusieurs niveaux ? À Maurice, l’on reste figé dans les cases dessinées par les Anglais.
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Témoin privilégié de notre Histoire, le Parti travailliste mijote son come-back. Ayant intimé à Pravind Jugnauth l’ordre de «surveiller sa cuisine», Ramgoolam, ragaillardi par la victoire sans appel d’Arvin Boolell, recommence à flirter ouvertement avec le MMM, le PMSD, le MP et autres partis. Si les mauves sont toujours refroidis, en revanche, les autres partis de l’opposition réalisent l’importance de ne pas bouder l’ancien Premier ministre. Le leader du MSM n’a que deux ans pour s’étoffer et affronter Ramgoolam. Les deux ont deux procès qui occupent leurs pensées (ni l’affaire MedPoint ni celle des Rs 220 millions n’est facile à gérer), mais pour l’instant, ils font le vide pour se concentrer sur l’adversaire direct alors que leur entourage respectif commence à s’agiter. La pression va surtout monter pour Pravind Jugnauth car c’est lui qui a tout à perdre. Ramgoolam, lui, reste souriant, car il avait déjà tout perdu en décembre 2014. Mais deux événements l’ont remis en orbite : son arrestation, brutale et humiliante, qui a choqué l’opinion et le passage de relais, en pleine course, de SAJ à son fils... Si Pravind a commencé sa marche jusqu’aux prochaines élections, à Grand-Bassin, Navin lance, lui, à partir d’aujourd’hui, lors du congrès-anniversaire des rouges, sa campagne. Alors que l’autre doit gérer les problèmes du pays et soigner sa communication, Ramgoolam, lui, peut prendre tout son temps pour calculer la meilleure route qu’il empruntera.
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