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Une journée caduque
Le 8 mars 2000, l’express avait produit un journal entièrement réalisé par des femmes. Journalistes, secrétaires de rédaction et la photographe (notre regrettée collègue Marie-Noëlle Derby) avaient travaillé dur pour ce numéro spécial. Pour ma part, j’étais content de chômer la veille pour une raison... purement biologique.
Dans ce numéro spécial, la rédaction s’enorgueillissait que depuis France Boyer de la Giroday, la profession, trois décennies après, comptait suffisamment de femmes «pour composer seules tout le rédactionnel d’un journal national de 24 pages». Le ratio hommes-femmes s’est considérablement amélioré. Nous avons dépassé la parité depuis.
Et aujourd’hui, il n’y a plus vraiment de différence de genre : nos éditions quotidiennes ont atteint une uniformité certaine, qui est significative à plus d’un titre.
Plus important : au lieu de disserter sur la place de la femme dans le monde actif, l’express voulait – et le démontre, sans doute, tous les jours – que les journalistes-secrétaires de rédaction, indépendamment de leur hasard de naissance, maîtrisent tous les secteurs de la vie du pays – social, économique, éducatif, sportif, culturel – et sont versés à tous les types d’enquête. Preuve quotidienne, s’il en fallait, que nous ne portons pas notre «genre» en étendard. «Si, naguère, on aura davantage parlé de l’intégration de la femme au monde du travail au nom d’une idée de justice ou d’humanité, aujourd’hui, c’est au nom de la loi du marché qu’on lui ouvre les portes des bureaux.» C’est, en effet, avec du talent, de la sensibilité, des qualités que l’on roule une entreprise de presse, non pas avec des quotas de femmes, ou de quotas de telle ou telle communauté, ou de telle ou telle génération...
«Nous sommes convaincus que promouvoir l’égalité d’accès des femmes à un emploi productif, à un travail décent, à l’égalité salariale et aux services financiers est bénéfique à tous les membres de la société. C’est également un moyen de mettre en œuvre l’Agenda 2030 du développement durable et favoriser la mise en œuvre effective de ses objectifs, en particulier de l’objectif 5 “Parvenir à l’égalité des sexes et autonomiser toutes les femmes et les filles”», rappellent conjointement les trois chefs de missions européennes à Maurice, Keith Allan, Marjaana Sall et Emmanuel Cohet, dans une tribune libre publiée, plus loin, en page 13.
C’est de bon ton de rappeler, chaque 8 mars, l’esprit derrière la journée des femmes, officiellement décrétée par l’Onu en 1977. Mais il nous faut aller au-delà de la multiplication des termes pour désigner le 8 mars et promouvoir la femme et l’homme, en bref l’humain, tous les jours, pas un jour uniquement. Sinon cela équivaudrait à célébrer la femme, comme on célèbre l’amour le jour de la St-Valentin, fête ou journée devenue une farce commerciale.
On peut aussi comprendre qu’on ne devrait plus parler de «la femme» mais «des femmes» car toutes les femmes ne peuvent pas former une entité à part entière. Ce serait extrêmement réducteur, n’est-ce pas ? D’autant que l’on parle d’un petit peu plus que de la moitié de l’humanité...
On ne peut d’autre part qu’être d’accord qu’il nous faut penser équitablement pour bâtir intelligemment en vue de développer des services publics et des infrastructures adaptés aux besoins de tout un chacun, dont les femmes et les filles. D’ailleurs le thème retenu cette année est «Egalite zom-fam koumans par mwa». Et nous sommes aussi convaincus que la promotion et la protection des droits humains devraient être l’affaire de tout un chacun, tous les jours, toutes les semaines, tous les ans. En revanche, ce ne serait pas bien que le 8 mars soit une occasion de mettre un coup de projecteur sur des revendications féministes qui, le reste de l’année, n’intéressent plus grand monde, sauf quelques irréductibles.
Au final, j’aurais préféré, (et cela n’engage que moi, pas forcément mes collègues et la rédaction), que le 8 mars devienne bientôt une journée caduque. Car on aurait évolué vers un monde sans discrimination, sexuelle ou autre. Mais il faut bien admettre que ce n’est pas pour demain...
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