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Le populisme, ce nouvel opium du peuple
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Le populisme, ce nouvel opium du peuple
Nous piétinons dans une impasse – et on ne sait plus comment s’en sortir. À force de ressasser, ici ou ailleurs, la même rengaine, de chanter la même litanie, de critiquer les mêmes sans faciliter le renouveau, nous risquons surtout d’amplifier le phénomène de rejet envers la chose politique. Les indécis, qui seraient proches des 50 % chez nous, ne solutionnent pas les équations, même quand vient l’heure, chaque cinq ans, d’aller dans l’isoloir. Au contraire, les indécis, ceux qui votent blanc ou qui s’abstiennent baissent la garde citoyenne et permettent à des populistes et des Tarolah de tous poils de polluer l’espace public réservé au débat et à la reflexion citoyens. Le phénomène que je tente de dépeindre dépasse Maurice, et est bien plus complexe qu’on pourrait le décrire en quelques mots/formules, ou en quelques mois.
Regardez vers la France, le pays qui avait voté pour le changement, en portant au pouvoir le jeune Macron, qui, souvenez-vous, n’était ni à gauche, ni à droite, mais au centre. Aujourd’hui tout le monde est désillusionné, y compris lui-même, au centre de tout et de rien. Cela fait des mois que, chaque samedi, des gilets jaunes, visiblement à bout de nerfs et deforces, martèlent leur rejet d’un «système bloqué depuis cinquante ans». Là-bas comme chez nous, le grand débat national ne débouche toujours pas sur «un compromis démocratique». Et les mots, les manifs, les saccages, ne suffisent plus. Alors cette accusation revient sans cesse : les gilets jaunes ne sont que des populistes, ou plutôt des personnes qui sont manipulées par des chefs populistespour faire du désordre ? Il y a sansdoute un peu de vrai et de faux, mais au fond personne ne peut vraiment y répondre, car tout depend justement du sens que l’on veut bien donner aux termes «populiste» et «populisme»..
Dans le cadre du Brexit, qui est devenu une crise sans fin, les politologues dénoncent de plus en plus «ce piège historique de la démagogie politicienne» – soit les fausses promesses, comme celles de nos politiciens locaux, (résumées et joliment présentées, pour nous faire succomber ?, par KC Ranzé à la page suivante.) Et concrètement que peut-on reprocher au populisme – ou au discours-politicien-pour-attirer-des-votes? Primo, le populisme a un sacré problème avec la réalité. Il fait avancer des promesses fausses (démagogie) et de fausses hiérarchies et occulte les vraies difficultés. Deuzio, le populisme peut aussi nourrir des passions égoïstes, narcissiques, nationalistes (peur de l’étranger, évocation de la pureté ethnique, suprématie basée sur la couleur de la peau ou la religion), mais pas que. Enfin, le populisme peut s’imposer comme un «style» (une expression d’André Taguieff), plus qu’un projet politique; par exemple un leader gueulard qui affiche sa vulgarité (mo pou koup zot lédwa avant de finir par mo p... lor zot !) Bref le populisme, à la Trump ou à la sir Anerood (du temps où il pouvait jouer au Rambo), ce sont des leaders authentiques, ou des faux prophètes qui émergent quand le pouvoir piétine, et s’avère incapable de matérialiser ses dires, mais capable d’excès de tous genres...
À Maurice, en France et en Grande-Bretagne, l’on a reussi à dramatiser les questions politiques comme étant à la fois très graves, très urgentes, et qui seraient très simples à résoudre. Ivan Collendavelloo, Vishnu Lutchmeenaraidoo, Boris Johnson, Theresa May et Emmanuel Macron, parmi des centaines d’autres politiciens, ont souvent revendiqué une souveraineté directe du peuple, car le peuple serait écrasé par les élites, nébuleuses. Le peuple avait alors viré, n’est-ce pas ?
PS : Quand l’on examine ces formes variées de populisme, il faudrait que l’on jette aussi un regard critique sur les médias, en particulier sur les liens de collusion entre médias et pouvoir exécutif. Force est de constater chez nous que plusieurs médias n’arrivent plus à jouer leur rôle de contre-pouvoir : ils sont devenus au contraire les vecteurs des pouvoirs politiques, leur assurant un relais de taille pour leur communication. Les manifestants d’hier en France ont denoncé le gros des journalistes parisiens : «Si dans la couverture médiatique de la crise des gilets jaunes, il est criant de voir à quel point une partie des médias est incapable de penser la détresse sociale et humaine qui résulte d’un bilan économique et politique quinquagénaire et multi-causal, les dégâts qui se chiffrent en vitrines et en poubelles incendiées n’échappent pas à la vigilance des chaînes d’informations en continu.»
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