Publicité

Que représente en 2019 le poids électoral du MMM ?

5 octobre 2019, 07:52

Par

Partager cet article

Facebook X WhatsApp

lexpress.mu | Toute l'actualité de l'île Maurice en temps réel.

Seconde jeunesse, kingmaker, joker : les irréductibles du MMM ont ressenti une certaine ferveur dimanche dernier. Ils ont sans doute vu grand dans la perspective des prochaines élections générales.

Au fait, que représente, en 2019, le poids électoral du MMM ? La dernière fois que le MMM a donné l’occasion à la population de prendre la mesure de sa force, cela remonte aux élections générales de 2010. Sur le papier, si le MMM jouissait en 2019 de la force qu’il pouvait mobiliser en 2010, le parti aurait grandement profité du vif antagonisme – frisant la haine même – qui caractérise les relations entre le Parti travailliste et le MSM dans le but de faire élire un grand nombre de députés mauves.

Non seulement élire plusieurs de ses candidats mais remporter même une grande victoire et cela en profitant de notre système électoral basé sur le principe du First Past The Post (FPTP). En 2010, le MMM avait recueilli 42,88 % des votes contre une alliance qui regroupait le Parti travailliste, le MSM et le PMSD. Pour les besoins de l’Histoire, il est utile de préciser que le MMM n’était pas tout à fait seul car il jouissait du soutien de deux alliés, l’Union nationale d’Ashock Jugnauth et le MMSD d’Eric Guimbeau, deux fortes personnalités mais chacune très limitée en termes d’envergure électorale. En tout cas, très très loin de la contribution que le MSM et le PMSD apportaient au bassin électoral des travaillistes.

Ainsi, en 2019, ceteris paribus, un bloc MMM de 43 % face à un MSM et un Labour irréconciliables et aussi à d’autres partis et groupuscules, aurait même pu prétendre remporter une majorité de deux tiers, sinon de trois quarts. Cette performance du MMM avec 43 % des votes en 2010 est quand même très remarquable. Surtout par rapport à toutes les scissions et les rébellions que le parti avait subies depuis 1973. Aux histoires, remontant à 1983, des Rs 57 millions donnés en cadeau aux barons sucriers par le nouveau ministre Bérenger, de la vente d’hôtels à des Sud-Africains, de l’imposition de la langue créole aux dépens de l’anglais, du français mais surtout des langues orientales. Et des expériences de militantisme castéiste à la Prem Koonjoo. Puis vint à partir de 1993 la grande scission du parti avec le départ de Jean-Claude de L’Estrac, Swalay Kasenally, Bashir Khodabux, Amédée Darga, Mathieu Laclé, Jérôme Boulle, Prem Nababsing et du grand Koonjoo lui-même.

Avec tout ce bilan qu’on serait tenté de qualifier de hautement négatif pour le MMM, le score de 43 % du parti en 2010 ne représente qu’un recul de 3,4 % de votes par rapport aux élections de 1983 quand le MMM remporta 46,4 % des voix. On retiendra toutefois le fait très significatif que le MMM n’a jamais franchi la barre de 50 %. Seul face aux autres, le MMM avait atteint le sommet de 48,12 % en 1987 quand le parti avait présenté comme candidat premier ministériel un personnage nommé Prem Nababsing. Ce dernier représentait l’antithèse de Paul Bérenger. Autant que le leader historique du MMM était un homme agressif et disposant d’un charisme impressionnant, Nababsing donnait l’impression d’être plutôt amorphe comme un scientifique, ce qu’il était d’ailleurs. Au point que Gaëtan Duval avait décrit Nababsing comme un lapin qui cachait son vrai personnage en se déguisant… en lapin. Pourtant avec lui, le MMM progressa de 1,72 point.

Cette candidature de Nababsing et sa subséquente nomination comme leader du MMM illustrèrent un parfait «koustik» idéologique et sociologique du MMM qui, à peine quatre ans auparavant, avait beaucoup investi dans sa stratégie ancrée sur la carte Koonjoo et qui cherchait à exploiter des antagonismes castéistes.

Ce sommet de 48,12 % de 1987, on pourrait aussi l’attribuer au fait qu’Anerood Jugnauth était alors au creux de la vague. Deux grandes affaires l’avaient assommé, Amsterdam et Ramjuttun. Depuis fin 1985, Jugnauth traînait le boulet de l’affaire Amsterdam qui mettait en cause quatre transfuges qui soutenaient le MSM et qui avaient été arrêtés à l’aéroport des Pays-Bas avec de la drogue. L’affaire Ramjuttun avait trait à une jeune adolescente du nom de Geeta Mangolia et à un campement dans le Nord. Le MMM ne réussit pas, malgré ces énormes handicaps, à battre Jugnauth. Ramjuttun lui-même se fit élire dans le no 5. Il est possible que les allégations aient été inventées de toutes pièces pour nuire à sa réputation.

Par la suite, aux élections de 1991, 1995 et 2000, le MMM n’eut aucune ambition premier ministérielle, se faisant plutôt l’allié minoritaire du MSM ou du Parti travailliste. Mais en 2005, en alliance avec le MSM, le MMM présenta Paul Bérenger comme Premier ministre. Ce fut la déroute aux mains de Navin Ramgoolam. En 2010, sans être partie prenante dans une grande alliance, le MMM joua encore la carte Bérenger Premier ministre avec le résultat qu’on connaît.

Le rêve du MMM en 2019 serait de retrouver son électorat d’antan et profiter de la division du vote entre MSM et travaillistes pour se faufiler vers la ligne d’arrivée. La performance du MMM à l’élection partielle dans la circonscription de Belle-Rose–Quatre-Bornes le 17 décembre 2017 fut loin d’être spectaculaire, sa candidate, Nita Juddoo, ne scorant que 14,33 % des votes contre 35,11 % pour le travailliste Arvin Boolell. Il n’y avait pas de candidat MSM à Quatre-Bornes. Mais il y aura 60 MSM et alliés aux futures élections générales. L’indication certaine que le MMM compte exploiter les divisions a été donnée par la décision du parti d’aligner des candidats de la «population générale» pas seulement dans les nos 12 et 14 mais dans plusieurs autres circonscriptions rurales dont Triolet–Pamplemousses.