Publicité

#J-9 : Place à la guerre des minutes télévisuelles

29 octobre 2019, 07:26

Par

Partager cet article

Facebook X WhatsApp

lexpress.mu | Toute l'actualité de l'île Maurice en temps réel.

Il n’y a pas que dans la représentativité féminine que nous figurons parmi les pays les plus arriérés, mais à l’indice de la liberté audiovisuelle, nous sommes durablement à la traîne. Même Madagascar et les Comores nous devancent.

Lors de chaque campagne, les sempiternelles querelles de minutes, ce «Political Airtime», par l’opposition (qui se plaint de la mainmise gouvernementale) devant la commission électorale traduisent le fait que nous sommes incapables de briser les chaînes de l’étatisation de la MBC, encore moins capables de libéraliser totalement les ondes audiovisuelles. La récente attribution de deux licences radio à des proches du pouvoir prouve que le gouvernement compte sur ces nouvelles radios pour mieux déployer sa triste propagande. En effet, la MBC, sa télévision nationale (monopole jalousement conservé par le pouvoir quel qu’il soit) et ses cinq chaînes radio ne suffisent pas, d’où le besoin de mettre les radios dites libres également sous le bol du régime en place. Même Top FM jouait docilement le jeu jusqu’à tout récemment avec l’épisode des motos-écoles, quand la radio de Kris Kaunhye a décidé de «break free» et de sortir l’artillerie lourde contre le MSM-ML…

Il ne faut pas oublier que la MBC et les radios libres sont «contrôlées» par des institutions qui, elles, ne sont plus du tout libres et indépendantes, mais peuplées d’agents politiques qui, souvent, ne connaissent pas grand-chose du monde des médias. Pire, ils arrivent à soutirer, en consultancy ou en services juridiques, des millions à l’IBA et/ou l’ICTA.

Pourtant, pour l’avoir plus d’une fois inscrit dans leurs manifestes, les politiciens sont conscients qu’un service audiovisuel public, comme la BBC ou RFI, financé par l’État et géré par des professionnels et non des agents politiques ou des mercenaires, est nécessaire. Dans un paysage audiovisuel libéré et ouvert à la concurrence, la télévision a toute sa place comme outil d’expression de l’identité nationale, de cohésion sociale et de mise en valeur des productions culturelles.

Mais alors que les Gates s’autodétruisent, l’on peut comprendre la frousse des dirigeants politiques de toujours vouloir contrôler l’information et, partant, l’opinion publique. À l’express, pour avoir été la bête noire de tous les régimes et subi leurs foudres, nous sommes assez bien placés pour le savoir. D’ailleurs, à chaque enquête mettant à mal le gouvernement du jour, le JT de la MBC est utilisé pour apporter un démenti, ou tenter de nous discréditer, surtout parmi ceux qui ne lisent pas l’express.

Les clips sur YouTube et Facebook, qui se partagent sur les portables à travers WhatsApp, entre autres, sont venus concurrencer le monopole télévisuel. Car la politique demeure avant tout une affaire de communication. Les leaders politiques, qui ne bénéficient pas de la couverture de la MBC, viennent avec bonheur sur nos plateaux. Une émission en Facebook Live sur l’express.mu (un réseau de 624 711 personnes) leur permet de toucher des milliers de fois plus d’électeurs qu’un congrès à Solférino, à Bar Chacha, à Rivière-du-Rempart ou à Vacoas. Aucune communication de masse n’est aussi fiable sans l’apport des journaux qui ont développé une audience, en plusieurs années, sur le Web…

Autre phénomène mauricien : l’absence d’une culture de débats télévisés et civilisés. Les candidats aiment haranguer la foule avec des mots grossiers, mais n’aiment pas croiser le fer. Raison pour laquelle Pravind Jugnauth n’a pas répondu favorablement au défi qu’il avait pourtant lui-même lancé à Navin Ramgoolam. Pourtant, un duel entre le Premier ministre sortant et son challenger direct, arbitré par des journalistes indépendants, choisis par les deux leaders politiques, ne peut qu’être une bonne chose pour notre démocratie. On le répète : à l’express, nous sommes disposés à abriter ce débat important, en compagnie d’autres confrères, et ce dans un lieu neutre et avec des conditions acceptables aux deux partis. Si nous voulons tout faire pour que ce débat ait lieu, sur les ondes et sur la Toile, on sent l’absence d’une maturité politique au sein des partis. Chez nous, on semble être plus programmé pour se disputer le temps d’antenne à la MBC que de livrer une bataille en direct. Dommage car, sous les projecteurs, on aurait bien vu ce qu’ils ont ou pas, non pas dans le pantalon, mais dans la tête… C’est vers le haut que nous voulons, nous, pousser le débat démocratique !