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Faute de drones, carotte et bâton
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Faute de drones, carotte et bâton
Il n’y a pas d’amis entre pays, mais que des intérêts. S’inscrivant en ligne droite avec cette doctrine internationale, les mots durs émanant de Port-Louis contre les Britanniques sur le dossier Chagos n’ont pas empêché Pravind Jugnauth de répondre favorablement à l’invitation de Boris Johnson à l’UK-Africa Investment Summit qui démarre le 20 janvier, soit quelques jours avant le divorce compliqué entre Londres et Bruxelles.
Tant mieux pour notre diplomatie ! Puisque nous n’avons pas, alors là pas du tout, les moyens militaires de faire pression ni contre le Royaume-Uni, et encore moins contre les États-Unis. Garder la porte des négociations ouverte tout en menaçant de saisir la Cour pénale internationale dans le sillage de la décision favorable de la Cour internationale de justice, sur l’excision de l’archipel abritant Diego Garcia, se révèle une stratégie risquée mais courageuse… Reste à convaincre tous les politiciens mauriciens à s’unir derrière le quadricolore quitte à ce qu’ils soient à couteaux tirés, sur le plan domestique, par rapport au discours-programme qui se tiendra tout juste après le sommet britannique.
Si la doctrine d’intérêts stratégiques prime sur le reste, la carotte et le bâton demeurent les moyens privilégiés tant par nous que par les parties adverses. Le 24 juin 2016, dans un communiqué conjoint, au ton intimidant, les autorités britanniques et américaines refusaient de reconnaître notre souveraineté sur les Chagos et nous déconseillaient de faire appel à la justice internationale – alors que nos minces cartouches étaient déjà épuisées. Leur position n’a pas changé depuis. Au paragraphe 4 du communiqué en question, les Britanniques et les Américains brandissent la carotte («Mauritius will gain the benefit of friendly bilateral relations») et le bâton («Referral of the matter to the International Court of Justice would cause lasting damage to Mauritius’ bilateral relations with both the UK and the USA»).
Bien sûr nous avons eu raison de saisir la CIJ hier et de brandir, aujourd’hui, la menace de la CPI – même si les instances onusiennes sont moins puissantes que les pays de Trump et de Johnson, qui peuvent frapper de manière chirurgicale avec leurs drones dernier cri.
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Dans sa note d’introduction au livre Next Year in Diego Garcia de Jean Claude de l’Estrac, David Snoxell, ancien hautcommissaire britannique, qui refait parler de lui sur la question des Chagos en évoquant le siège britannique au conseil de sécurité de l’ONU, rappelle que «the right of the Chagossians to return and live in their homeland must be restored. Probably most will only wish to visit but for those who want to live in Chagos this must be made possible. And Britain and the US must recognise that as the outer islands are no longer needed for defence purposes a timetable for the transfer of sovereignty to Mauritius should be established, even if Diego Garcia itself is left for a later date.»
Il nous faut, en effet, séparer Peros Banhos, Salomon et les autres îlots des Chagos de la problématique Diego Garcia puisque la base militaire – qui accueille ces jours-ci six bombardiers B-52, mobilisés dans le cadre de la tension grandissante relative à la mort de Qassem Soleimani entre les US et l’Iran – devient plus importante que jamais.
Contrairement aux bases US au Moyen-Orient ou en Europe, celle de Diego Garcia est à l’abri des tirs de missiles provenant de l’Iran, l’Iraq, l’Afghanistan ou la Syrie. Dans la hiérarchie des risques, c’est une donnée qui pèse davantage que nos larmes versées devant la communauté internationale.
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