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Ça ferme sa gueule ou ça démissionne

1 février 2020, 07:35

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Ça ferme sa gueule ou ça démissionne

Alors qu’il est censé resserrer les rangs et garder son équipe mobilisée, Navin Ramgoolam a brandi la guillotine cette semaine. Pourquoi s’est-il permis de couper des têtes au sein du Parti travailliste ? Pour ceux qui croient que cette opération avait uniquement pour objectif de punir les petits récalcitrants que sont, ou ont été, Yatin Varma, Raj Pentiah ou encore Prateebah Bholah, ce n’est pas tout à fait exact. En exécutant ces petits protestataires, Ramgoolam envoie, en fait, un signal fort à ceux, au sein de son bureau politique, qui pensent pouvoir le pousser vers la sortie, en capitalisant sur le fait qu’il ne soit pas au Parlement ou qu’il a été rejeté par l’électorat du numéro 5, puis du numéro 10. Varma, Pentiah et Bholah ont été sacrifiés, mais le message est clair. Si demain, disons, Arvin Boolell ou Shakeel Mohamed essaie de lui faire de l’ombre, Ramgoolam ne va pas se laisser faire et va brandir l’épée Highlander. Selon lui, on ne peut pas être soit travailliste, soit ramgoolamiste. Il faut être ramgoolamiste pour être travailliste, et non l’inverse, sous-entend Ramgoolam.

Depuis plusieurs années, l’express pose la question essentielle : s’il n’y a pas de démocratie au sein des partis politiques, comment ceux-ci peuvent-ils nous convaincre qu’ils vont approfondir la démocratie sur le plan national ?

En France, la phrase, martiale, de l’ancien ministre de l’Industrie JeanPierre Chevenement est devenue un cas d’école dans les cours de sciences politiques : «Un ministre, ça ferme sa gueule ou ça démissionne.» À Maurice, Paul Bérenger, jadis membre du Conseil des ministres, a fait les frais de son désaccord avec son Premier ministre, tantôt avec SAJ (1983, 1993) ou tantôt avec Ramgoolam (1997), se faisant éjecter ou en claquant la porte pour divergences de vues.

Le si-vous-n’êtes-pas-d’accord-prenez-laporte demeure le propre de pratiquement tous les partis politiques de Maurice. Si Bérenger a dû prendre la porte face à SAJ ou Ramgoolam, il a aussi fait partir plusieurs fortes têtes qui essayaient de l’affronter au sein du MMM. Hervé Masson, Kader Bhayat, Jack Bizlall, Ram Seegobin, JeanClaude de l’Estrac, Amedée Darga ou Alan Ganoo ne sont que quelques noms sur la longue liste de ces militants qui ont eu à courber l’échine face au Lider Maximo, qui ne peut accepter la pensée contradictoire.

Au sein du MSM, l’on se souvient que SAJ a également fait partir les Lutchmeenaraidoo (bien avant leurs retrouvailles de 2014), Ramjuttun, Dulloo (qui était pourtant son dauphin tout désigné à un moment où Pravind n’était pas encore dans le bain) et son frère Ashock pour asseoir son autorité, et celle de sa famille, aujourd’hui quasiment seuls actionnaires du Sun Trust.

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Anil Gayan a ravalé le crachat et boit la soupe encore une fois. Avant-hier, il utilisait les colonnes de l’express, pour sa rubrique Only in Mauritius, comme tremplin pour faire redécoller sa carrière politique. Puis, comme ministre, il s’est soudain mis à cracher sur l’express parce qu’au lieu d’applaudir tout ce qu’il faisait, notre journal, gardant jalousement son indépendance, critiquait son action gouvernementale (en passant, en temps de coronavirus, encore heureux que Gayan n’a pas pu imposer sa double stratégie aérienne et touristique axée sur la Chine !). Aux dernières élections, Gayan n’a pas eu de ticket en raison de son maigre bilan et des scandales y relatifs. Alors, dans le désert, il appelle l’express à la rescousse. Cette fois-ci pour formuler des critiques à peine voilées contre son leader et le PM, dans l’espoir d’avoir son «bout» Not Only in Mauritius, mais ailleurs dans une ambassade. Au moins réalise-t-il désormais l’importance d’un contre-pouvoir dans une démocratie, car Gayan, malin comme il est, sait fort bien qu’il ne passera pas de sitôt sur la MBC, à moins que…