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Méritocratie, comme capri, est-ce fini ?

19 février 2020, 08:22

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Une compagnie privée qui tente de gérer ses affaires en ne choisissant pas les meilleurs, a le droit légal, même si pas moral, de le faire, car il y va de son argent privé. En ne favorisant pas la compétence cependant, cette compagnie prend des risques certains de voir son activité vaciller et son avenir se fragiliser. Mais ce sont des risques assumés de plein gré qui ne lèsent personne, sinon peut-être les employés sur le long terme, ces derniers devant eux-mêmes juger de leur situation et prendre leurs décisions en conséquence.

Si une compagnie privée veut être exclusivement une «affaire de famille», c’est aussi son droit, mais à ses risques et périls. Il n’y a d’ailleurs pas que des désavantages à se recroqueviller autour de la loyauté familiale, mais il est clair que si l’on peut y allier compétence et loyauté, on dort plus tranquille. En général, quand c’est pour rouler la quincaillerie familiale, cela peut suffire, mais plus cela devient complexe, plus c’est improbable. Il faut alors y allier des compétences. Parfois, la direction familiale est moins agressive, moins exigeante que dans une firme menée de manière plus clinique, et les employés peuvent préférer cela. Mais dans notre monde de compétition farouche, c’est sans doute une recette pour des difficultés éventuelles.

Pour une compagnie publique, le degré de responsabilité de l’équipe dirigeante, souvent modérément propriétaire, augmente clairement, puisqu’elle gère aussi l’argent «des autres». Elle doit dès lors des comptes, notamment en assemblée générale. Elle doit aussi être transparente, ce qui ne veut pas dire qu’il faut qu’elle soit nue et qu’elle dévoile tout, y compris ses atouts commerciaux les plus intimes. Mais si elle ne joue pas le jeu, le «marché» c.-à-d. les «autres» sanctionneront et démontreront leur manque de confiance en vendant des titres, plus qu’ils n’en achètent.

Les exigences augmentent encore plus, évidemment, quand on est responsable de l’argent public. Un gouvernement, ayant mandat pour cinq ans, parfois plus, a la responsabilité de prendre les décisions qui sont les meilleures pour le pays, pas a priori pour le parti, surtout que l’argent en jeu n’engage pas celui des gouvernants, mais bien celui du contribuable. L’ironie veut que ces décisions optimales, on les souhaite motivées, comme pour un «bon père de famille», par la prudence, l’intégrité, la mesure, de la circonspection. Pour atteindre ce but, il faut bien évidemment choisir les hommes et les femmes dont la compétence et la rigueur sont indéniables, puisque leurs décisions vont être décisives POUR LE PAYS.

Ceci étant dit, se pourrait-il que le critère principal des nominations actuellement en cours soit vraiment d’avoir été «candidat battu de la majorité, anciens élus qui n’ont pas eu de ticket et aux autres collaborateurs ayant œuvré sur le terrain ou dans l’ombre pour que l’Alliance Morisien remporte les récentes élections générales», comme l’affirme un quotidien du pays ? À voir certains de ceux qui ont été choisis et élus par la «sagesse populaire», n’est-on pas en droit de craindre ceux qui n’ont été choisis ni par le peuple, ni par le parti ? La MÉRITOCRATIE serait-elle à ce point synonyme d’allégeance et de vassalité ? N’a-t-on vraiment rien appris des cinq dernières années ? Mesure-t-on seulement les conséquences de ne pas ratisser plus large pour mobiliser plus de talents et ainsi mieux fédérer tout un peuple, plutôt que de récompenser une seule faction ?