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Énergie, économie, démocratie…
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Énergie, économie, démocratie…
De bonnes nouvelles, enfin sur le plan du combat climatique : l’Agence Internationale pour l’Énergie annonce qu’en dépit de tout, les émissions de dioxyde de carbone (CO2 ) qui aident à réchauffer la planète, n’ont PAS progressé en 2019, même si le PIB des économies mondiales progressait de 2.9 %. Elles n’ont pas régressé non plus, c’est vrai, mais après deux années de croissance soutenue du CO2 dans l’atmosphère, cette nouvelle est plutôt inattendue. Les émissions de CO2 en Europe baissaient de 5 %, celles du Japon par 4 % et même aux États-Unis de Trump et en dépit de lui, ces émissions baissaient de 2.9 %.
La bataille est loin d’être gagnée cependant, puisque 33 gigatonnes de carbone étaient quand même ajoutées à l’atmosphère l’an dernier et que, pour rester à l’intérieur d’un réchauffement de 2 o C par rapport au niveau préindustriel, il faudra que la planète atteigne la «neutralité carbone» (c.-à-d. zéro rajout de carbone à l’atmosphère) avant 2050. Or, l’Asie, était à 80 % responsable, en 2019, de 400 millions de tonnes de carbone de plus rajoutées à l’atmosphère qui effaçait les réductions affichées au Japon, en Europe et aux États-Unis; le grand coupable demeurant les centrales à base de charbon, surtout en Inde et en Chine, mais aussi partout dans le Sud-Est asiatique.
Il est clair que les centrales à charbon ou à huile lourde sont très polluantes. Le gaz l’est moins mais pollue aussi. Un avenir moins polluant pour Maurice, outre le renouvelable des sous-produits de la canne – ce qui ne sera le cas que si l’industrie sucrière perdure, bien sûr – implique peut-être aussi de brûler la fibre du chanvre ou d’Arundo Donax, mais repose surtout, selon la pensée conventionnelle, sur le solaire et l’éolien. La seule vision chiffrée que je connaisse de cet avenir pour Maurice m’est signalée par un ami. Il s’agit des travaux de Mark Z. Jacobson, professeur à l’université de Stanford, cofondateur de «The Solutions Project» * qui ambitionne la transition de la planète vers du 100 % renouvelable en 2050. Il a une très grande maîtrise de son sujet, mais sa vision du projet mauricien me laisse cependant un peu perplexe. Des hypothèses les plus difficiles à envisager, citons celle qui envisage une réduction de la demande par 58 % (essentiellement à travers les gains d’efficience qui découleraient du remplacement de la combustion de l’énergie fossile par l’électrification généralisée, y compris celle du transport), celle qui met 3 milliards de dollars de frais de santé «économisés» annuellement dans la colonne des «bénéfices» du renouvelable et la vision que 27 % de notre consommation d’énergie viendra, improbablement, dans notre île touristique, de l’éolienne offshore. Je n’ai pas, pour l’heure, vu la quantification du coût de ces investissements, mais le modèle (qui incorpore l’amortissement et le coût du maintien ou pas ?) promet cependant un coût de KWh de Rs 2.98 et des économies individuelles de Rs 8 900 par an.
S’il y a quelqu’un dans ce pays qui est en train de quantifier nos solutions «renouvelables», pourrait-il, rapidement, nous dire si la géothermie est définitivement «out», si l’hydro pourrait être une réponse partielle à la gestion des «peaks» de la demande et, avec l’annonce de la fermeture de la plus vieille centrale nucléaire de France à Fessenheim, qui date de 1976; s’il n’y a pas d’avenir dans les mini-centrales nucléaires de technologie plus récentes et plus efficientes**, surtout si un pays ami voulait bien nous encadrer ?
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On ne me prendra pas à critiquer M. Harvesh Seegoolam, nouveau gouverneur de la Banque centrale, avant qu’il n’ait pris ses fonctions et ses premières décisions.
Cependant, il est vraiment dommage d’avoir évacué M. Panchoo avec M. Googoolye car il semble avoir plus de connaissance de mécanismes de transmission monétaire que les trois nouveaux nommés mis ensemble. M. Seegoolam est jeune certes, mais sa formation est parlante : c’est un homme a priori qualifié qui devrait pouvoir apprendre vite l’essentiel de sa fonction nouvelle. Il sera sûrement moins flamboyant que Ramesh Basant Roi ou Rhundeersing Bheenick, ses discours pourraient moins impressionner ou plaire, mais son mandat sera sûrement jugé moins sur son manque d’expérience à ce stade, si sa capacité de réflexion indépendante et intègre le mène à s’entourer des compétences qu’il faut et peut-être même à consulter d’anciens gouverneurs, en toute confidence, dans des situations particulièrement délicates. Il n’y aurait aucune honte à cela, l’intelligence collective pouvant souvent éviter des ratés et l’indépendance d’action de la Banque centrale demeurant primordiale. Surtout si l’alternative est d’être sous l’influence d’un secrétaire financier, M. Dev Manraj, aussi brillant qu’il n’apparaît maintenant être incontournable et irremplaçable (et s’il disparaît, il a 71 ans, il se passe quoi ? Le pays va crever ?) ou d’un ministre des Finances qui émerge lui-même de quelques années d’influence directe et intime à la Banque centrale. M. Seegoolam est perçu comme un homme bien, mais un faible promu vite. Il lui faudra faire ses preuves bien vite aussi.
La vraie question à ce stade c’est de savoir qui va remplacer Seegoolam à la FSC, un poste autrement plus complexe et difficile que celui de Gouverneur de la Banque centrale, a priori, notamment au vu de son interface permanente avec les dangers intrinsèques de l’offshore et son difficile rôle d’équilibriste entre la flexibilité qui attire, y compris les pourris, et la rigueur qui peut devenir étouffante, peut-être même de manière terminale, ce qui serait stupide. Il faudra un homme solidement formé, aguerri de manière robuste, indépendant d’esprit, à personnalité forte, universellement respecté. Surtout après la débâcle d’avoir été posté sur la liste ‘grise’ du FATF ce vendredi à Paris, avec le Panama, le Zimbabwe, et le Myanmar, ce qui est d’ailleurs un billet de sortie bien encombrant pour Seegoolam.
Un avis de recrutement international paraît nécessaire.
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Il y a de quoi réellement s’inquiéter pour la démocratie… La dernière élection présidentielle opposait une fois encore, M. Ghani à M. Abdullah. Seulement 10 % de l’électorat avait voté et cela a pris à la Commission électorale cinq mois pleins pour proclamer la victoire de M. Ghani avec 50,6 % des voix, M. Ghani étant déjà au pouvoir. Ces 50,6 % de voix, au-delà du fait d’impliquer que seulement 5 % du peuple aurait voté pour M. Ghani, sont gênants parce qu’à 0,6 % près, il y aurait eu un deuxième tour en Afghanistan. Résultat ? M. Abdullah s’est aussi proclamé président, n’ayant pas particulièrement bien digéré son rôle de chef exécutif lors de la dernière tentative de partage de pouvoir, après l’avant-dernière élection, d’ailleurs contestée elle aussi.
Les Américains, après 18 ans de présence invasive, ont peu à se mettre sous la dent : plus de la moitié du pays est soit contrôlée, soit contestée par les Talibans. Il y a du progrès sur le plan éducatif et celui de la valorisation des femmes, mais pas en territoire barbu, bien entendu. Selon le New York Times (NYT), l’opium qui avait été presque totalement éradiqué sous les Talibans avant l’invasion américaine, est depuis devenu le principal revenu de ces mêmes Talibans et alimente…80 % de la demande mondiale ! Du coût total estimé dépensé de 2 trillions de dollars jusqu’ici (soit 10 % du PIB US !), 1,5 trillion représentent l’effort de guerre, 10 milliards l’initiative anti-narcotique, 90 milliards la formation des ‘forces locales’ – qui jusqu’à maintenant sont jugées incapables de résister 3 mois seuls, 55 milliards le développement et la reconstruction et environ 345 milliards les… intérêts, qui vont d’ailleurs totaliser quelques 600 milliards jusqu’à 2023. Le NYT y ajoute une note estimée de 1,4 trillion de dollars pour les services médicaux et autres des soldats démobilisés, jusqu’en 2059 !
Sans surprise, l’Amérique veut s’en sortir au plus vite et signe ces jours-ci un cessez-le feu, sans contre-signature du «gouvernement» afghan, ce qui pourrait bientôt mener au retrait des troupes américaines.
Si c’était le cas, gageons que les prochaines élections présidentielles verraient le taux de participation de l’électorat glisser à… zéro.
Contrairement à l’Afghanistan, nous avons encore, ici, une démocratie à défendre. Il faudra pourtant que chacun se mouille en fonction de ce que représente l’intérêt de sa vitalité ? Si vous êtes démocrate, on vous retrouvera dans les tranchées, qu’il faudra occuper, nombreux ! Faute de quoi, nous l’aurons cherché…
**http://wired.com/story/the-next-nuclearplants-will-be-small-svelte-and-safer/
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