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Où allons-nous ?
Le discours du ministre des Finances à l’Assemblée générale annuelle de la Chambre de Commerce le 23 juillet mérite que l’on y retourne, car, étant bien moins encombré de détails et de considérations fiscales et politiques, il est un indicateur direct des destinations présumées de notre économie réelle.
Si le ministre Padayachy y dit clairement son ambition d’assurer le développement économique du pays, il précise bien que «business as usual n’est plus une option». Sa déclaration que «la fin est bien entendue d’accompagner la reprise des secteurs traditionnels de l’économie…» sonne un peu comme un pis-aller face à ce qui paraît désormais être la nouvelle mission de «faciliter la diversification et l’émergence de nouveaux pans de l’économie». Pourtant, quelques paragraphes plus loin, il précise qu’il mise «sur les secteurs clés que sont la construction, l’agroalimentaire, le secteur manufacturier et la pharmaceutique pour être les moteurs d’une économie souveraine et résiliente». Seule la pharmaceutique est nouvelle. Aucune mention du tourisme, du BPO/ICT, du secteur offshore/financier, ni même du Data Economy comme faisant partie des «moteurs» de notre avenir. Ce n’est sûrement pas un hasard ou un oubli ? Le Data Economy va pourtant voir le jour à Côte-d’Or. Il en parlera séparément. Un buzz-word de plus après Fintech et AI ? Le PM a, depuis, approuvé 53 projets pour Rs 66 milliards. Ceux qui iront de l’avant aideront au moins le secteur du bâtiment.
Pour la construction, il y a aussi les projets en cours (métro, rond-point Jumbo, autopont Coromandel/Sorèze, par exemple) et on projette 12 000 logements sociaux. Cependant, si la construction d’infrastructures a un impact immédiat sur le PIB et l’emploi, son contenu importé est lourd et son impact à plus long terme sur la richesse nationale reste à prouver. Le métro, par exemple, quand on en connaîtra les vrais chiffres qui reflèteront ceux qui y voyagent gratuitement ainsi qu’un taux d’utilisation plutôt décevant, va probablement nous coûter cher. Peut-être même très cher. Les responsables misent sur l’extension de la ligne à Curepipe avant de conclure.
Si le nouveau noeud de routes à Jumbo/Valentina/Pont fer va sûrement aider à fluidifier le trafic et donc aider à améliorer la «productivité» du parc automobile, l’autopont Coromandel/Sorèze devrait, quant à lui, être bien moins directement utile ? Quant au logement social, le précédent gouvernement avait promis, en 2014, la construction de 10 000 logements sociaux (2 000 par an) et il avait, par contre, construit 2 378 unités avec 3 880 autres unités en «cours de réalisation» à 2019, selon le ministère du Logement. Clairement, il y a de la marge, tant du point de vue de la réalisation des promesses électorales, que de celui des espoirs des squatters et des demandeurs authentiques de toits qui ne coulent pas ?
Pour l’agroalimentaire, rien de bien détaillé, sinon des «circuits courts, de la traçabilité et la durabilité de la chaîne d’approvisionnement» ainsi qu’une garantie de prix pour l’ensemble de la production fruits et légumes, ce qui n’est pas sans inconvénients potentiels. En effet, si un prix trop fort pour le lait peut, comme en Europe, bien trop stimuler de pis de vaches et produire des lacs dudit liquide, il est à prévoir que ce sera le Marketing Board, devenu le «market maker» de circonstance(?), qui décidera si l’on mangera des carottes ou des navets en fonction des prix qu’ils promettront ? Une promesse, un peu incongrue, des fois : pour l’économie océanique, la bleue qui fait frissonner Madame Collen, on va favoriser les projets de… pisciculture sur le territoire national !
Pour le secteur manufacturier, on apprendra qu’il existe «un besoin pressant pour Maurice d’intégrer le secteur industriel… dans la valeur ajoutée économique globale et locale». Il faudra m’expliquer tout cela, car je ne comprends pas. C’est comme pour la CSG d’ailleurs où il est toujours impossible de comprendre sans que l’on nous explique les projections chiffrées, même que, maintenant, au Parlement, on a annoncé que tous les employés et employeurs du secteur public, au lieu de se contenter de leur généreux plan de pension existant, seront conviés au CSG ! Les contributions, à partir de 2024, seront toujours insuffisantes, sauf PREUVES du contraire ! On prône aussi le «Buy Mauritian» dans son autre formule du «lokal is beautiful». C’est bienvenu évidemment, dans la limite, cependant, que tous les pays du monde ne fassent pas pareils. Les cycles sont ainsi faits : on se recroqueville ces temps-ci, dans cinq ans on regrettera la mondialisation…
Quant à la pharmaceutique, on attendra le Medical Products Regulatory Authority Bill qui encadrera la production de médicaments fabriqués localement, selon les normes internationales requises. Les «Authorities», ça nous connaît bien dans ce pays ! Nous en sommes devenus des experts ! Il nous faudra un board, un chairman, des directeurs, un CEO de la trempe de Mme Boygah, une grosse cylindrée… Mais il faut vraiment espérer, qu’à l’ombre de nos accords commerciaux COMESA, SADEC et autres, il y aura une suite à Ajanta Pharma, une compagnie profitable qui exporte surtout en Afrique francophone, pour le moment, grâce à ses 450 agents de vente et qui a déjà démontré que l’aventure est possible et qu’elle peut être profitable, générant près de 25 % sur chiffre d’affaires !
La politique d’ouverture du pays aux expatriés, un choix logique, se base, très rationnellement, sur le fait que le taux de fécondité de notre population a chuté au point où nous ne serons plus que 900 000 en 2050… C’est évidemment bien embêtant pour la CSG d’avoir aussi peu de contributeurs alors que les bénéficiaires, eux, vont augmenter de plus de 30 % jusque-là ! De plus, si nous ne souhaitons pas voir régresser notre ordinaire et voulons éviter l’«argent braguette» aux conséquences généralement douteuses, il faut donc réussir à accueillir ces étrangers qui puissent «investir, travailler, vivre et prendre leur retraite à Maurice». C’est bien vu ! Moins rationnellement, la Solidarity Tax prolongée, la CSG, les lois du travail contraignantes, le Portable Pension ne poussent dans la direction d’un meilleur accueil et il est clair qu’il sera, par ailleurs, assez compliqué de s’ouvrir au monde en gardant l’aéroport… fermé. En effet !
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Il y a eu, coronavirus oblige, une accélération des débats concernant l’autonomie alimentaire du pays, la thèse étant que si nos approvisionnements sont coupés ou restreints, on se devait d’être en mesure de produire plus au pays, d’autant que la canne «ne rapporte plus». C’est une proposition intéressante mais pas nécessairement évidente. Ce qui est certain que le pourcentage de terres arables aurait baissé de 56 % dans les années 80, à 42 % en 2016 (World Bank) et que si la canne couvrait 91 574 hectares en 1986 et 76 302 hectares en 1990, elle ne représentait plus que 49 974 hectares en 2017(-45 % en 30 ans. Qu’en fait-on ? Personne pour le chanvre ?). La FAO dans son étude de 2014 suggère que les terres arables vont continuer à disparaître, passant de 64 000 ha en 2015 à 55 000 ha en 2030. S’il est indéniable que les forêts, en pourcentage se réduisent et que la canne occupe moins de terrain, c’est au bénéfice de l’habitation et des infrastructures. Et des terres en friche ? Un rapide survol de nos importations alimentaires en 2019 montre relativement peu de «big ticket items» que nous pourrions produire. Il faut de larges pâturages pour la viande bovine (Rs 1,3 milliard +), le mouton (Rs 1,1 milliard +) ou alors importer leur nourriture. La grosse partie des importations de poisson semble être faite pour du «processing» local et de la réexportation. Ainsi, ironiquement, nous importions pour Rs 1,1 milliard de bonites d’Espagne et Rs 0,6 milliard de France ! On peut sans doute les pêcher nous-même, mais il faudra faire vite avant que le poisson ne disparaisse des mers (1) ! Peut-on produire du lait et du fromage à un prix raisonnable ? Ne dépendrions-nous pas, en fin de compte, de l’importation des ingrédients requis pour la nourriture (fish meal, soja), comme c’est le cas pour le poulet ? Il faut du blé (Rs 1,3 milliard) pour la farine, le riz paraît difficile. Du maïs peut-être (0,6 milliard), des fruits tropicaux quand nous aurons réglé le compte des chauves-souris ? Si c’était évident, ces créneaux seraient déjà mieux occupés, me semble-t-il…
Je suis preneur d’un plan détaillé, raisonné, fiable. Où est-il ?
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(Profonde respiration). Pourrions-nous, svp, prendre acte de l’explosion de ces 2 750 tonnes de nitrate d’ammonium au Liban pour demander à nos «autorités compétentes» de bien s’assurer que nous n’avons aucun risque comparable ici ? Après le «lock down» et ses dégâts, les 158 milliards de la BoM, la liste noire de l’UE, les standards de Mme Boygah, le «Black Bay» du Wakashio, les achats de respirateurs et de masques, la foirade annoncée de la CSG, St-Louis Gate, il nous faut au moins éviter cela !
S’IL VOUS PLAÎT ! PAS CA !
https://www.independent.co.uk/environment/oceans-fish-could-disappear-in-40-years-un-5541451.html
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