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Au risque de causer «Annoyance, humiliation, inconvenience, distress or anxiety»
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Au risque de causer «Annoyance, humiliation, inconvenience, distress or anxiety»
La nouvelle section 46 de l’ICTA Act 2018 avait introduit la notion élargie qu’il devenait criminel d’utiliser les services électroniques pour relayer texte, vidéo ou sono qui «… was likely to cause or causes annoyance, humiliation, inconvenience, distress, or anxiety to any person…»
Les défenseurs de nos libertés soulignaient alors le danger évident d’ajouter les notions aux contours flous que sont «annoyance, humiliation, inconvenience», aux pathologies psychiques qui étaient dans la loi précédente, soit «distress and anxiety» et qu’on pouvait au moins tenter de définir et «prouver» en cour par des témoignages éventuellement contradictoires de psychologues cliniciens. Et même là… Car cette loi ne définit AUCUN de ces cinq mots dans sa section «Interpretation». Comment alors se défendre face à quelqu’un se disant «distressed» ?
Cette loi devenait encore plus redoutable et dangereuse en 2018 parce qu’elle doublait aussi les pénalités prévues qui se bonifiaient de 5 à 10 ans d’emprisonnement. Bien pire ! Sous la sous-section (ii) du paragraphe (h), il ne devenait plus nécessaire de prouver une intention de nuire, les mots «for the purpose of causing...» ayant été enlevé de la loi initiale qui datait de 2001.
L’Attorney General d’alors, Maneesh Gobin, jurait ses grands dieux que cette loi modifiée n’était pas liberticide et n’était pas une atteinte à la liberté d’expression en insistant fortement, sur un plateau de radio, qu’«une publication doit d’abord être obscène, abusive, insultante, mensongère ou menaçante pour être annoying». Et il avait tout simplement ignoré les deux petites lettres du mot «or» qui changeait tout dans ce nouveau paragraphe (h) se lisant comme suit :
«Any person who (…)
(h) uses, in any manner other than that specified in paragraph (ga), an information and communication service, including telecommunication service, - (i) for the transmission or reception of a message which is grossly offensive, or of an indecent, obscene or menacing character; OR (ii) which is likely to cause or causes annoyance, humiliation, inconvenience, distress or anxiety to that person.»…
…shall commit an offence.
(C’est nous qui soulignons le mot OR)
Or cette loi modifiée a bien été utilisée récemment pour faire arrêter des citoyens qui avaient «annoyed, humiliated, inconvenienced, distressed or (rendered) anxious» des politiciens de la majorité. Il n’y avait a priori aucune infraction au paragraphe (h)(i). La raison d’être de cette loi se dévoile-t-elle comme craint au départ ? Nous n’avons, je présume, plus besoin de prouver l’intention du législateur ?
Mais le propos du jour est ailleurs, justifié par la marée noire qui nous occupe depuis quelques jours, d’abord et avant tout parce que les «autorités» qui nous gouvernent ne sont pas intervenues pour arrêter le Wakashio ou le faire changer de route, depuis son entrée dans nos eaux territoriales deux jours avant son naufrage à Blue-Bay.
En effet, extrapolant du même état d’esprit et de raisonnement de «bon père de famille» d’un gouvernement qui pouvait faire modifier l’ICTA Act** en 2018, la population n’est-elle pas en situation de dire que l’État mauricien, le gouvernement qui nous dirige et les ministres responsables de notre «intégrité territoriale», de nos lagons et de notre environnement, nous ont causé (et continuent à nous causer) «annoyance, humiliation , inconvenience, distress AND anxiety» même s’il n’y avait aucune «intention de nuire» au départ ?
La question mérite d’être posée ! Elle n’est pas sans conséquence, espérons-le ….
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Plusieurs autres items qui peuvent causer «annoyance, humiliation, inconvenience, distress AND anxiety» a toute la population ont été mis en lumière au Parlement cette semaine.
Par exemple, l’ICTA lui-même vient de déposer ses comptes audités au bureau du PM, ce mardi 11 août 2020, ce qui paraît vraiment bien jusqu’au moment où l’on précise que ces comptes sont pour les années financières 2013 et 2014 ! C’était donc les comptes de «bann-la» ! On comprend tout !
Par contre, la National Property Fund Ltd, elle, une nouvelle entité légale créée dans le sillage de la liquidation du groupe BAI pour gérer et vendre les actifs saisis, date de 2015 mais n’a jamais déposé un bilan audité en cinq ans ! On réévalue toujours. Ce sont pourtant les comptes de «Nou bann»… Espérons que la fermeture des frontières, la déchéance du tourisme, la liste noire et la marée noire ne viennent pas maintenant jouer aux trouble-fêtes sur ces réévaluations…
Le même jour, le nouveau ministre de l’Énergie révélait l’énorme gâchis de la promesse électorale de 2014 promettant de l’eau 24/7 dans tous les foyers de Maurice. En effet, Mr Lesjongard révélait, un peu embarrassé, qu’après avoir dépensé Rs 2,8 milliards depuis 2014 pour remplacer 498 kilomètres de tuyaux percés, 60 % de l’eau produite par la CWA ne gênerait toujours pas de revenus et était donc perdu ! Ce pourcentage ne semble pas avoir du tout évolué à la baisse, en plus de cinq ans ! Pour rappel, le projet 24/7 demandait que 1 570 kilomètres de tuyaux (sur les 4 000 existants) soient remplacés. Nous avons donc (Ils ont donc…) fait, pour l’heure, seulement… un tiers du travail et, à ce taux, il faudra donc encore deux mandats de cinq ans pour compléter le boulot ! Vous le saviez ça ? Vous êtes partants ? Rappelons encore que si les perditions sont ramenées aux normes internationales de 20-25 %, la CWA doublerait son revenu sans augmentation de tarif et qu’il y aurait évidemment DEUX FOIS plus d’eau utile dans les robinets !
Soulignons aussi, pour comparaison quant aux priorités nationales de ce pays, que le stade de Côte-d’Or aura, lui, couté Rs 5 milliards et que le projet Safe City, qui a un «rendement» de 101 infractions identifiées et 11 sentences en 1 an, aura coûté encore trois fois plus, soit plus de CINQ FOIS l’argent dépensé à la CWA en cinq ans.
Comment voulez-vous que ce ne soit pas «annoying, humiliating, inconvenient, distressful and anxiety-generating» pour le citoyen contribuable ?
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Comme son prédécesseur, le Dr Navin Ramgoolam, le présent Premier ministre, Mr Pravind Jugnauth, ne fait pas la distinction entre son rôle de chef de parti et sa responsabilité en tant que chef d’État. En conséquence de quoi, il punit les médias qui chatouillent son déplaisir, qui parlent de faits qui le gênent et l’embarrassent, qui osent le questionner contradictoirement, qui donnent leur opinion, librement.
Ramgoolam avait boycotté l’express pendant ses années au pouvoir. Un procès en bonne et due forme suivait en 2009. Un accord finalisé devant un juge ne fut même pas respecté par le chef de parti. Le procès a repris et attend toujours son tour. Mr Ramgoolam trouve les journaux libres plus ragoutants maintenant qu’il est de l’opposition, tout comme Mr Jugnauth estimait et trouvait utile les journaux libres jusqu’à fin 2014.
Mr Jugnauth père, bon prince, avait mis un terme au boycott engendré par Mr Ramgoolam fils à son arrivée au pouvoir, sans doute pour montrer qu’il était différent et qu’il allait effectivement gouverner «dans l’honneur». Cette approche-là n’a pas duré longtemps. Des fin 2018, le boycott publicitaire reprenait de plus belle ! Mr Jugnauth fils pousse le bouchon encore plus loin : une de ses dernières mesures en tant que ministre des finances en 2019 a été de, furtivement, inclure dans le Finance Bill que l’État n’a plus l’obligation de faire sa publicité de la manière la plus efficiente qui soit, c.-à-d. dans les journaux a fort tirage comme l’express ! Le parti peut désormais faire, au nom de l’état, comme il veut, dans un élan de plus vers la gouvernance pourrie dont on travestit ce pays, de plus en plus. Pensez Prosecution Commission Bill, népotisme, contrats d’urgence, nominations politiques à l’Electoral Supervisory Commission, Clause 46 de l’ICTA Act, Mme Boygah, Mme Sumputh, Mme Choomka…
Ne voient-ils vraiment pas, en tant que prétendus démocrates, que ce qu’ils trouvent gênant et inacceptable dans l’express n’est que le reflet de ce qu’ils FONT et de ce qu’ils SONT, quand à la tête de notre pays ? Reflet d’ailleurs partiel – puisque tant reste caché depuis qu’ils ont tous deux renié leur promesse électorale d’une Freedom of Information Act. Macarena, MedPoint, Soornack, Wakashio, pandit Sungkhur, Angus Road, Rolls Royce, Dulthumun, Gooljaury, Neotown ou la fermeture des frontières en deux temps et bien d’autres encore, l’illustrent à profusion…
Notre rôle de journaliste libre et indépendant est de rendre les dirigeants de ces pays comptables de ce qu’ils font et ce qu’ils disent, soi-disant «au nom du peuple». Nous ne publierons jamais délibérément le contraire de ce qu’ils disent. Si c’était, par extraordinaire, le cas, car nous ne sommes pas, nous, infaillibles, nos colonnes sont ouvertes pour un rectificatif et nos cours de justice restent, j’aime à le croire, encore capables de mener un procès équitable et à la même cadence pour tous !
** Une clause similaire a la section 46, soit la section 66A de l’Information Technology Act de l’Inde fut jugée anticonstitutionnelle par la cour suprême indienne en mars 2015.
La clause équivalente dans le Kenya Information and Communication Act est la clause 29 et fut jugée anticonstitutionnelle aussi en avril 2016.
(Lire à cet effet , Vinod Boolell, Vagueness of Section 46 of the ICTA, Weekly, 6-12/08/2020, page 34 )
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