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Budget 2021-22 : Tous sur le même radeau

23 avril 2021, 13:35

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De par le monde, la reprise économique se révèle une partition à géométrie variable. Elle s’opère à plusieurs rythmes et vitesses. Si la croissance mondiale est estimée par le FMI à 6 % pour 2021, elle diffère selon la géographie, la taille et la force ou faiblesse des économies. Les deux moteurs de la reprise mondiale restent les États-Unis et la Chine, alors que les prévisions de croissance sont autour de 4,4 % pour l’Europe et de 3,4 % pour l’Afrique subsaharienne, qui a enregistré la contraction du PIB la plus importante de son histoire économique en 2020.

Pour notre pays, si la croissance a connu une contraction inédite de 15 % l’an dernier (remettant en question notre Business Model, qui souffrait déjà de plusieurs carences structurelles, bien avant l’apparition du coronavirus), elle tournerait dans les 5 % pour 2021 (la dernière estimation de 6,6 % du FMI date d’avant la seconde vague). Même si nous ne sommes plus dans la ligue des High-Income Economies et que les revenus par tête d’habitant sont passés de $ 12 300 en 2019 à $ 8 600 en 2020, il nous faut reconnaître que l’aide étatique (notamment le Wage Assistance Scheme et le Self-Employed Assistance Scheme qui ont coûté Rs 18 milliards jusqu’ici) pour soutenir financièrement les ménages et les entreprises (et partant l’économie elle-même) aura réussi son pari à accroître notre résilience collective, après le terrible choc de l’an dernier. Nous attendons, par ailleurs, les chiffres de la MIC pour savoir quels sont ces entreprises et groupes qui seront renfloués avec nos milliards dans pareil contexte.

Et alors que les consultations budgétaires sont en cours, il semble y avoir unanimité que les défis liés à la reprise sont à la fois énormes et urgents, et que la tâche du gouvernement et du ministre Renganaden Padayachy s’avère ardue, en particulier à cause du niveau insoutenable de la dette, d’une industrie touristique comateuse, d’un déficit budgétaire qui frôle les 15 % du PIB, d’un taux de chômage qui a franchi les 10 %, d’un déficit de la balance commerciale de presque 22 % du PIB, d’une balance des paiements déficitaire grandement à cause de la mésaventure continue de nos services financiers, d’un investissement en forte baisse, d’une inflation en hausse et d’une roupie qui se déprécie…

Avec un tel tableau, aucun partenaire ne pourra sortir seul de l’imbroglio économique, puisqu’il s’agit, d’une part, de sortir de la présente crise sanitaire, financière et économique (afin que l’on ne débouche sur une crise sociale), rouvrir les frontières en balançant tous les risques (ce qui dépend des vaccins, de leur disponibilité, efficacité, et durabilité, ainsi que des variants) et repenser/restructurer l’économie post-Covid. Dans cet élan, certains acquis devront être questionnés ou remis sur le tapis : le ciblage pour la pension universelle, par exemple, ou cette vieille proposition de Rama Sithanen d’augmenter l’âge de la retraite à 65 ans ; ou encore les pensions à vie des parlementaires ou anciens présidents ou vice-présidents de la République ; le nombre excédentaire de corps parapublics qui sont peuplés de chatwas politiques et qui plombent les finances du pays et alourdissent davantage notre fonction publique pléthorique…

Face au chantier de redressement et de reconstruction, l’on ne peut, malgré le refus systématique de ce gouvernement d’accepter la main tendue par l’opposition et la presse, que continuer à pousser pour une Whole-ofSociety Approach afin que le Budget 2021- 2022 favorise des objectifs communs, soit un partenariat étroit public-privé-société civile, un renforcement de la résilience économique et un modèle favorisant un développement durable et inclusif.

Garder le pays sous respiration artificielle (c.-à-d. sous assistanat) n’est plus possible. Le Dr Padayachy, qui prépare son Budget, n’a pas de marge de manœuvre fiscale, sauf s’il pompe encore une fois les réserves du Special Reserve Fund, alimenté de manière artificielle par une roupie faible.

N’oublions pas que nous avons enregistré un recul d’au moins 15 % de notre PIB l’an dernier, et qu’on restera donc sous le niveau de 2018-2019 pour environ 4-5 ans, si tant qu’on arrive à bloquer le virus et ses variants, à réinventer le tourisme et à faire re-décoller Air Mauritius, l’offshore et bien d’autres secteurs d’activités économiques.

Réparer l’économie devient encore plus compliqué avec un gouvernement et une opposition dysfonctionnels, incapables de mettre leur ego de côté pour le bien commun.