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La mort d’un immortel

4 juin 2021, 08:14

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La mort d’un immortel

Chaque instant dans la vie est un pas de plus vers la mort.

Celle de sir Anerood Jugnauth (SAJ) hier, même si on en parlait depuis quelque temps, ne cesse d’ébranler le pays.

 Avant tout autre propos, l’express présente ses sympathies à Lady Sarojini, au Premier ministre, à la fille de SAJ et à tous ses proches qui sont affligés.

C’est incontestablement un géant de la vie politique mauricienne, ayant occupé les devants de la scène depuis plus d’un demi-siècle, qui s’en est allé.

Sir Anerood est, après sir Seewoosagur Ramgoolam (SSR), le deuxième Premier ministre de notre jeune histoire, à passer de la vie au trépas.

Le jardin de Pamplemousses devient ainsi notre panthéon. Le «père» de la nation y côtoiera celui du «miracle» économique. Il deviendra le lieu de pèlerinage obligé de toute la classe politique, indistinctement.

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Le discours de SAJ en 1982 quand il remplace SSR a marqué les esprits. Porté par le premier 60-0 de l’histoire, il annonçait la fin du communalisme et la naissance du mauricianisme, «enn sel lepep, enn sel nation». Le peuple y croyait. Mais en 1995, quand SAJ mord la poussière, le communalisme n’avait pas reculé. Au contraire les «démons» dansaient de plus belle - et dansent toujours.

Comme chaque personne, SAJ a sa part d’ombre et sa part de lumière. Les historiens, quand l’émotion va se dissiper, jetteront un regard froid sur les années décisives de SAJ, durant lesquelles il n’hésitait pas à «couper les doigts». Ou encore sur la passation de pouvoir, en janvier 2017, entre SAJ et son fils, l’actuel PM, en pleine législature.

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On avait fini par croire que SAJ était immortel, tellement il a tenu longtemps, dans plusieurs rôles. Ce n’est pas tant son statut d’ancien PM, ou d’ex-président de la République, ou encore celui de ministre mentor, qui lui conférait une telle illusion que son verbe caustique, et sa passion pour le football et Rodrigues, à qui il a donné l’autonomie. On se sou- viendra aussi de lui comme le dernier participant de la conférence de Lancaster à s’être battu, avec sa toge d’avocat, pour que l’on retrouve notre souveraineté sur les Chagos, même si on peut regretter son silence sur Agalega.

Les hommages vont pleuvoir. Les larmes aussi. Les héritiers politiques de SAJ seront bien plus nombreux qu’on pourrait l’imaginer.

La question qui sera posée, la semaine prochaine, sera : la mort de SAJ marque-telle la fin d’un cycle politique ?

Dans les salles de rédaction, dès hier soir, le vide s’est fait sentir…