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Des VIP en prison ? Toujours pas à Maurice

31 juillet 2021, 07:33

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Le rapport Domah sur l’affaire Britam va beaucoup plus loin dans ses recommandations que les findings d’autres commissions d’enquête que le pays ait connues jusqu’ici.

L’ancien juge Bhushan Domah recommande même des enquêtes et des poursuites au criminel pour forgery, falsification de documents à l’encontre de quelques grosses légumes et d’une prestigieuse entité d’experts-comptables.

La commission Britam est partie avec un cheveu sur sa soupe. En effet la presence même de Sattar Hajee Abdoula, un instrument au service de LaKwizinn, sur le bench de cette commission d’enquête, a fait tiquer de nombreuses personnes bien que la compétence et la probité de l’ancien juge Domah n’ont jamais été remises en question en dehors de la classe politique. Abdoula, de tandem avec Roshi Bhadain, alors‘fils’ d’Anerood Jugnauth, avait joué un rôle de premier plan dans le dépeçage du conglomérat British American Investments (BAI) de Dawood Rawat. En nommant Abdoula sur cette commission d’enquête sur Britam, une filiale de la BAI, c’était comme si on demandait au bourreau d’un condamné à mort de se faire l’aumônier avant la mise à mort pour ensuite endosser la tunique d’un chirurgien pour autopsier une jambe du cadavre.

Cette présence d’Abdoula contribuera dans une grande mesure à donner crédibilité à ceux qui s’attaquent au rapport en affirmant que la commission d’enquête a été utilisée comme instrument politique pour nuire à Roshi Bhadain.

En évacuant le problème Abdoula, la commission d’enquête ayant fonctionné dans des conditions difficiles en raison d’absence ou dissimulation de documents à Maurice et de l’érection d’un rideau de fer au Kenya où la transaction Britam s’est conclue, ses findings et ses recommandations méritent d’être sérieusement étudiées.

D’autre part, il serait intéressant de savoir si le rapport de la commission Britam n’offrirait pas à Dawood Rawat, si cruellement dépouillé de ses biens, un point de départ pour entamer des poursuites judiciaires à Maurice même. Dawood Rawat a été autrement disqualifié en termes de time-barred pour n’avoir pas entamé une action légale à Maurice même dans les délais établis. Il a plutôt cherché réparation à l’étranger.

Suivant le rapport Domah, la décision du Premier ministre Pravind Kumar Jugnauth de favoriser des poursuites à la fois au criminel et au civil pourrait bien mener à un changement révolutionnaire sur la façon dont opèrent à Maurice des politiciens au pouvoir, des nominés dans des institutions et les hauts fonctionnaires eux-mêmes. En effet, presque tous les décideurs impliqués dans des scandales au cours desquels l’argent du contribuable a été détourné ont jusqu’ici échappé à la prison. Ils sont bien protégés par la loi qui les met à l’abri des poursuites.

La culture d’impunité est bien aussi enracinée dans les entreprises. Rarement des dommages payés à des actionnaires lésés. Pas d’actions au criminel non plus. Ce haut cadre d’Air Mauritius faisant de la prison constitue une rare exception car les gros bonnets tant du public que du privé échappent à l’épreuve de ‘ramasse savon’ en prison.

Maurice restera pendant longtemps une république bananière à bien des égards. Dans les pays civilisés, la prison attend les trafiquants des biens tant au niveau du gouvernement que dans les firmes privées. L’ancien Premier ministre malaisien, Najib Razak, a été condamné à 12 ans de prison pour avoir littéralement volé des fonds de l’Etat. En France, de hautes personnalités comme l’ancien président Sarkozy risquent la prison. D’autre part, Carlos Ghosn, l’ancien patron du géant de l’automobile Nissan-Renault-Mitsubishi, est actuellement un fugitif. Il s’est enfui du Japon avant qu’il ne soit jugé et conduit à la prison pour fraude au niveau de la compagnie et cela au détriment des actionnaires.

Si Pravind Jugnauth réussit à introduire à Maurice ce seuil de bonne gouvernance au niveau de l’Etat et, par extension, dans les entreprises comme cela se pratique dans les pays avancés, les générations futures lui seraient extrêmement reconnaissantes. Pourquoi, pour le bénéfice de la présente génération, ne pas introduire de la transparence la plus totale autour des cadeaux – l’argent du peuple – que la Mauritius Investment Corporation (MIC) est à distribuer généreusement actuellement ?