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Du surtourisme à un monde sans touristes

28 août 2021, 09:00

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Du surtourisme à un monde sans touristes

La plage, le soleil et la mer, et plus si possible, on connaît la chanson. En bref, le refrain : farniente. Nous avions toujours connu le tourisme comme étant l’industrie des vacances, synonyme de loisirs, de plaisir et de repos. Certains en ont fait leur raison de vivre : des propriétaires de groupes hôteliers aux chauffeurs de taxi en passant par ceux qui abusent des touristes et de leurs devises, comme des fois, au marché central.

Cela marchait tellement bien que l’on a commencé à parler, dans les années 2010-2020, de… «surtourisme», ou trop de touristes pour une destination. Ce qui entraîne des impacts négatifs, notamment sur l’environnement et la biodiversité. Pour un petit pays comme Maurice, on taquinait le seuil du trop, mais on voulait malgré tout attirer de plus en plus de touristes et de devises. On n’en a jamais assez, n’est-ce pas ? On a donc construit davantage d’hôtels sur les plus belles plages de l’île, accentuant la pression, et barrant la vue, tout au long du littoral...

Et puis le choc ! Le Covid-19 est arrivé et a arrêté de manière brusque l’industrie du tourisme, qui représente 25 % du PIB. Les hôtels se sont ouverts aux Mauriciens et aux cas suspects, le Covid-19, paradoxalement, aidant à remplir les chambres. Mais le mood n’y était pas!

Quand l’OMS annonce, en mars 2020, que l’épidémie de Covid-19 devient officiellement une pandémie, elle confirme la menace qui se dessine aux quatre coins du monde. La mondialisation a commencé à ralentir comme jamais auparavant. Le tourisme, qui n’a jamais cessé de croître, est freiné dans son élan avec les mesures sanitaires qui se mettent en place et la fermeture subséquente des frontières. Et les voyages cessent du jour au lendemain. Les ministres et leurs agents qui vont soi-disant faire des ‘road shows’ et animer des foires pour vendre notre destination (et qui en profitent pour s’en mettre des per diem plein les poches) restent cloués au sol.

Fait aujourd’hui surprenant. L’organisation mondiale du tourisme (OMT) prend acte que «toute la base de l’activité touristique se trouve remise en question». Mais certains mouvements, surtout écologistes, qui ne s’attendaient pas à cette longue traversée du désert pour le tourisme, jubilent dans un premier temps : la mise en pratique forcée d’un «monde sans touristes» vient nourrir certaines critiques remettant en cause le «surtourisme». Pour ces voix-là, il vaut mieux continuer la dénonciation des effets environnementaux des croisières et du transport aérien, et la gentrification associée au développement de plates-formes comme AirBnB…Il est vrai que l’explosion du nombre de touristes internationaux — de 25 millions à 1,5 milliard par an entre 1950 et 2019, selon l’OMT — ne s’est pas vraiment faite de manière réfléchie. Mais de là à souhaiter la mort du tourisme…Il fallait sans doute calculer si l’apport monétaire du «surtourisme» contrebalance ses impacts négatifs sur l’environnement social, économique et aussi sur certains écosystèmes ?

Mais le Covid-19 a tout chamboulé. Aujourd’hui, on parle d’économies et d’emplois à sauver, de foyers à nourrir. Il faut redémarrer la machine à devises.

Après 18 mois de paralysie, se profilent des conséquences socio-économiques sans précédent si l’industrie ne redémarre pas chez nous. Ministre et ses serviteurs, secteur privé, PMEs, tout le monde s’agite et pense pouvoir créer un «feel good factor». Le protocole de quarantaine est revu (de 14 jours à 7 jours), puisque le concept des «resort bubbles» n’a pas généré plus de 7 000 arrivées malgré tout le battage médiatique international (dont le show de Lord Obeegadoo sur CNN), qui a creusé un petit peu plus la dette publique et celle du secteur des hôteliers et des restaurateurs. Alors que les cas de Covid-19 augmentent, à près d’un mois de l’ouverture des frontières, l’incertitude plane plus que jamais, même si les autorités et l’AHRIM chantent, comme la cigale, leur optimisme, avec 40 % des réservations enregistrées pour l’après 1er octobre. Sauf que tout le monde sait que «réservations» ne signifient pas que les sous vont forcément rentrer dans les caisses nationales.

La vérité, c’est que la reprise de l’industrie du tourisme ne dépend pas de nous, mais du contexte mondial. Et ces temps-ci, les prévisions les plus réalistes tablent sur une possible reprise pour la mi-2022, pas avant. Le nombre de cas augmente chez nous, et nous sommes encore dans le flou concernant le mix vaccinal et la 3e dose, le concept d’auto-isolement dans les mêmes hôtels qui accueillent des touristes ne prête pas aux loisirs, les longs vols sont découragés en Europe… C’est bien d’être optimiste, mais il faut avoir un plan B et savoir jusqu’à quand l’État pourrait soutenir le tourisme, si d’aventure cette industrie n’arrive pas à retrouver, disons, 50 % de son éclat d’antan pour des raisons autant internes qu’externes…