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L’État doit-il compenser les victimes de violence ?

10 septembre 2021, 16:56

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L’État doit-il compenser les victimes de violence ?

La question n’est pas aussi irréaliste que l’on peut croire à première vue, et mérite d’être posée lorsque l’État est responsable de notre sécurité. Les autorités, même si elles ne sont pas coupables, ne manquent-elles pas à leurs devoirs de prévention et de protection ? Et lorsque le citoyen se fait agresser, violer ou tuer, peuvent-elles prétendre ne pas en être, quelque part, même lointainement, responsables ? Évidemment, l’État ne peut pas mettre un policier à chaque coin de rue, mais il ne peut proclamer n’avoir aucune responsabilité dans la situation de «law and order» du pays, donc dans une atteinte à la sécurité physique du citoyen. D’où la question de compensation, même symbolique. 

Il existe un système de compensation dans certaines juridictions étrangères où la victime d’une agression, coups et blessures, viol ou autre atteinte à l’intégrité physique de la personne, se voit compensée par l’État. Il en est de même pour les proches des victimes d’un meurtre, d’un assassinat ou de tout acte ayant entraîné la mort d’une personne. 

La compensation offerte aux victimes d’actes de violence comprend les frais médicaux, le counselling et des dédommagements pour les vêtements que portait la personne agressée, ses lunettes, mais ne couvre pas de manière générale les biens et les pertes matérielles subies. De plus, si la personne a besoin de matériel de sécurité, pour prévenir d’autres attaques contre sa personne, des provisions existent à cet effet. Pour les proches des victimes d’homicide, il est prévu une compensation pour les frais funéraires et le counselling. 

À Maurice, les frais médicaux sont gratuits de même des services de counselling dans certains cas, par exemple, lorsqu’il s’agit de la violence domestique, mais d’autres frais sont payants. Aussi, on peut toujours arguer que la victime n’a qu’à poursuivre le coupable d’un acte de violence au civil. Mais on connaît la réalité du contexte où l’accès à cette forme de justice est difficile, ou encore que le coupable n’ait pas les moyens nécessaires de payer la compensation. 

Dans les juridictions où la compensation aux victimes d’actes de violence existe, il y a un service spécialisé, un tribunal, administratif de nature, qui entretient des cas de demande de compensation. Ce service est disponible en ligne et la victime peut remplir un formulaire de demande, et le faire parvenir à l’autorité concernée, au tribunal de compensation des victimes d’actes de violence. Les victimes et autres personnes affectées ont souvent recours à un travailleur social, qui réfère ensuite l’affaire à un cabinet, qui aide la victime dans sa demande, et à rassembler les pièces justificatives pour appuyer sa requête de compensation. 

La Mauricienne Patricia Galéa, directrice du cabinet légal Galéa &Faustin Solicitors, basé à Melbourne, nous précise que le client n’a rien à payer pour loger une demande auprès du tribunal. Le cabinet d’avocat aide le client à faire sa demande mais la décision de compensation revient au tribunal. Elle nous dit aussi que l’affaire doit être rapportée à la police, et que la déclaration faite à celle-ci constitue une pièce importante au dossier de demande de compensation. Au cas où l’affaire n’a pas n’a pas été rapportée à la police, ce qui est toujours possible, une autre procédure existe, mais le principe de la compensation est maintenue. 

Ce qu’il faut retenir surtout dans ce système, c’est la notion de la responsabilité de l’État. On peut toujours arguer que l’État peut ne pas être fautif, mais nous sommes dans une situation que l’on pourrait appeler de responsabilité sans faute. 

La faute vient d’une société qui est mal en point et qui produit des délinquants, mais l’État n’a-t-il pas sa part de responsabilité dans l’évolution d’une société ? Si l’État dicte ses règles à la société, celle-ci a le droit d’exiger une protection. D’où la compensation, même symbolique, de la part d’un État responsable de la sécurité, la law and order !