Publicité
Macronie en danger ?
Il n’y a pas eu de mauvaise surprise à la sauce du Brexit ni à celle du triomphe électoral de Trump. L’extrême droite, incarnée par Marine Le Pen, malgré sa progression incontestable à… 41,4 % des voix, n’a pas eu le dernier mot en France. Tant mieux pour ceux qui préfèrent l’ouverture au repli !
Cinq ans après avoir raflé, à seulement 39 ans, le fauteuil de président de la République française, non sans avoir pulvérisé et la gauche et la droite, Emmanuel Macron a été réélu, dimanche, avec 58,54 % des suffrages exprimés. Malgré la succession de crises qui ont émaillé son premier mandat, qui n’a pas été de tout repos avec les gilets jaunes, la pandémie, la gestion du Brexit, et la guerre en Ukraine, le fondateur du mouvement En Marche, devient le premier président, hors cohabitation, à décrocher un second mandat.
Mais il se retrouve face à un pays profondément divisé. Deux visions de la France s’opposaient : d’une part, l’extrême droite des nationalistes qui misaient sur la nostalgie d’un glorieux passé mythifié et le verrouillage des frontières – pour justifier la rupture avec l’Union européenne, et d’autre part, l’association dite des élites économiques et intellectuelles attachées à la coopération internationale et au libéralisme. Mais la victoire de Macron est surtout due à un «barrage républicain» de tous bords contre Marine Le Pen (un électeur sur deux a voté pour bloquer celle-ci) et pas vraiment sur une adhésion des électeurs au programme de Macron. Du reste, l’abstention pour le second tour a atteint 28,2 % des électeurs – du jamais vu depuis 1969. Ce qui fait dire à Jean-Luc Mélenchon, qui rêve désormais, avec ses presque 22 %, à un destin premier ministériel lors des prochaines législatives, que «M. Macron est le plus mal élu des présidents de la Ve République qui surnage dans un océan d’abstentions, de bulletins blancs et nuls.»
Si les Français de Maurice préfèrent Macron, leurs compatriotes à La Réunion s’avèrent pro-Le Pen (voir texte en page 6). Il est aussi intéressant de noter que le vote de dimanche a été particulièrement influencé par les origines sociales et géographiques des électeurs. Ce qui fait que Macron se retrouve en face de deux France – d’où le fait qu’il a choisi lors de son discours de remerciement, sur les Champs-Élysées, dimanche soir, de marteler qu’il n’est plus un candidat, mais le candidat de tous les Français, surtout ceux qui ont voté pour sa rivale. Selon les analystes, au-delà du principal clivage France urbaine versus France rurale, Macron doit sa victoire aux 18-24 ans (59 % d’entre eux ont voté en sa faveur) et aux plus de 65 ans (75 %). Marine Le Pen arrive, elle, en tête auprès des 25-34 ans et des 50-64 ans.
Les priorités de Macron demeurent le pouvoir d’achat (comme dans nombre de pays), les dérèglements économiques et sociaux, la colère dans les hôpitaux ou les écoles, l’urgence climatique, la guerre en Ukraine… Il ne bénéficiera d’aucun état de grâce, d’autant qu’il a 2 millions de suffrages en moins par rapport à son premier mandat, et que les législatives sont derrière la porte. Il peut être battu cette fois-ci.
Publicité
Les plus récents