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La potion amère mais nécessaire du FMI
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La potion amère mais nécessaire du FMI
On aurait tort de se focaliser, comme le fait la MBC, sur la première partie du rapport préliminaire du FMI, publié dans le sillage de ses 2022 Article IV Consultations. Dans un langage diplomatique, qui cherche à dorer la pilule, afin de ne pas froisser la susceptibilité des princes qui règnent ici, la mission, dirigée par Dr Cemile Sancak, économiste, note d’emblée que «l’économie se remet progressivement de la pandémie» et que «notre campagne de vaccination a été remarquable».
Mais tout de suite après ces civilités, les experts venus de Washington, DC, mettent en relief le fait que même si la plupart des secteurs, sauf le tourisme, sont revenus plus ou moins à leur niveau prépandémique, l’inflation a considérablement augmenté. L’homme de la rue vous dira qu’on n’a nullement besoin du FMI pour savoir cette évidence, mais derrière le «sugar-coating» des visiteurs, le reste du message est on ne peut plus clair. Attardons-nous sur les grandes lignes de la prescription du FMI qui reprend des points souvent soulignés par nombre d’observateurs locaux, qui ont su conserver leur indépendance, contrairement à la Banque centrale.
- Il est nécessaire de déployer un plan global d’assainissement budgétaire pour assurer la viabilité de la dette publique (…) afin de maîtriser l’inflation à moyen terme.
- Il nous faut sans plus tarder améliorer la compétitivité du pays, diversifier l’économie et engager une transformation structurelle pour accroître la durabilité et la résilience de l’économie.
- La croissance du PIB réel a rebondi à 4 % en 2021, après une contraction d’environ 15 % en 2020. Les arrivées touristiques — à 13 % du niveau de 2019 — ont été affectées par la réouverture tardive de la frontière (en octobre 2021), les restrictions de voyage liées au variant Omicron et la disponibilité limitée des vols vers notre pays. En d’autres mots, on ne peut plus privilégier Air Mauritius au détriment de Mauritius.
- L’inflation d’une année à l’autre s’est accélérée en raison de la hausse des prix des carburants, des denrées alimentaires et du fret, ainsi que de la dépréciation de la roupie (facteur bel et bien local celui-là !)
- Le FMI prévoit une croissance de 6,1 % en 2022 ainsi qu’une nouvelle hausse de l’inflation qui est déjà à 11 % pour le mois d’avril.
- Nos visiteurs s’attendent à ce que les arrivées de touristes atteignent environ 60 % du niveau pré-pandémique en 2022 (c’est-à-dire un peu plus de 800 000 touristes). Mais pour cela la connectivité aérienne devra être améliorée.
- Prenant à contre-pied le duo Padayachy-Seegolam, le FMI maintient : «à mesure que la reprise se consolide, un nouvel assainissement budgétaire est nécessaire pour restaurer l’espace budgétaire et assurer la viabilité de la dette. La dette publique mauricienne, qui a considérablement augmenté au milieu de la pandémie, devrait rester à des niveaux élevés à moyen terme.»
- Gifle de rappel : le rétablissement de règles budgétaires, y compris un ancrage de la dette à moyen terme, contribuerait à préserver la viabilité budgétaire et à réduire les vulnérabilités de la dette, tout en offrant une certaine flexibilité pour faire face aux chocs.
- (i) La réforme du système de pension/retraite reste une étape cruciale pour soutenir la viabilité budgétaire. La mission recommande un assainissement budgétaire par le biais de mesures crédibles en matière de recettes et de dépenses.
- (ii) L’objectif de réduction de la dette publique ne devrait pas justifier le déploiement de financements quasibudgétaires, par exemple par la Mauritius Investment Corporation (MIC). Alors que les mesures quasi-budgétaires peuvent aider à réduire la dette à court terme, elles peuvent retarder les mesures budgétaires fondamentales et entraîner de nouvelles pressions à moyen et long termes.
- Notre Grand argentier, qui chante un autre refrain, sera surveillé de près par le FMI et par Moody’s lors du prochain exercice budgétaire. «L’amélioration de l’efficacité de la politique monétaire et la sauvegarde de l’indépendance de la Banque centrale doivent rester des priorités.»
- La diversification de l’économie restera essentielle pour soutenir la reprise et l’aspiration de Maurice à (re) devenir un pays à revenu élevé. Pour y parvenir, les autorités doivent envisager des options politiques pour réduire la pénurie de travailleurs qualifiés. Une ouverture vers plus de TIC intelligentes et innovantes devrait contribuer à promouvoir davantage la diversification et à gravir la chaîne de valeurs.
- La lutte contre le changement climatique doit demeurer une priorité pour aider l’économie à renforcer sa résilience face aux chocs. La diversification et l’amélioration de la résilience de l’économie doivent être soutenues par un programme de réforme global pour identifier les priorités, surmonter les obstacles et accroître l’efficacité, notamment en trouvant des synergies entre les secteurs public et privé. Cet agenda doit être formulé dans un esprit de dialogue sain et transparent avec le secteur privé et la société civile, dont la presse. Ces 12 points semblent pétris de bon sens économique. Le docteur Padayachy a intérêt à s’en inspirer avant son Grand oral. Pour notre biencommun. Ne pas suivre la prescription va nous coûter encore plus cher. Et notre réputation, déjà entachée, en souffrira.
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