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Perspectives

14 août 2022, 09:07

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Perspectives

C’est généralement quand un gouvernement donne des signes de faiblesse qu‘il se fait assaillir de toutes parts avec des exigences et des revendications, les unes après les autres. 

Cela semble du moins être la situation dans le port, où un nouveau président, Menon Munien, a été nommé à la Cargo Handling Corporation Ltd (CHCL). M. Munien, qui a fait carrière dans l’éducation plutôt que dans la logistique et qui a fait du volontariat avant d’être nommé responsable de la National Corporate Social Responsibility Foundation, qui prend le relais de la CSR après le Budget de 2016-17, affronte désormais une situation bien plus épineuse. Il fait face à un syndicat habitué à faire la démonstration de sa force dans un service essentiel, qui est en situation de monopole ! D’ailleurs, aussitôt arrivé, le port est en mode «go-slow» et le syndicat raidit la ligne, menaçant même de grève, comme le précise gentiment le responsable du syndicat, Gérard Bertrand, qui s’attend à ce que «… les décisions qui s’imposent soient prises pour le bien-être des employés de la CHCL». 

Il n’y a pas de syndicat des utilisateurs du port, par contre, même si ce sont eux qui font face aux dysfonctionnements et aux inefficiences répétées de notre port. Ils ne peuvent qu’accomplir l’équivalent d’une grève, en brûlant un arrêt chez nous et en allant plutôt décharger nos importations… à Colombo ou ailleurs. Pour les exportations, c’est une contrainte de plus qui ne va certes pas améliorer ni la compétitivité de nos industries d’exportation, ni la productivité nationale. Mais qui s’en soucie ? Mieux, qui va régler le problème ? Ronald Reagan (*) ? 

Dans le transport public par autobus, on demande une augmentation de salaires de… 25 % et les propriétaires de bus semblent prêts à accéder à cette requête, pourvu qu’il y ait une augmentation du prix du ticket de bus. En effet, finalement, quelqu’un devra payer ces augmentations et ce sera soit les propriétaires, soit le consommateur, soit le gouvernement à travers une subvention. Si c’est le consommateur qui écope, ce sera un tour de vis de plus à l’inflation et une érosion supplémentaire des Rs 1 000 du budget qui ne suffisait déjà pas aux salariés modestes pour garder la tête hors de l’eau… 

À qui le tour ? 

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Je vous le demande. Qu’est ce qui a le plus de chance de vous faire positiver dans votre quotidien ? Des caniveaux remplis d’ordures ? Des ronds-points débordants d’herbes folles ? Des bords de route occasionnellement maculés de sacs de détritus éventrés, pour bonne mesure, par des chiens galeux ou faméliques ? Des rivières-poubelles peutêtre ? Ou serait ce plutôt le beau, le propre, le soigné et ce qui illustre le discipliné et l’ordonné ? 

C’est pour cela qu’il faut ici saluer l’effort entrepris pour embellir deux ronds-points importants du pays. Le premier est le rond-point principal de Phoenix et le deuxième est à Sorèze, à la sortie du pont qui reliera Coromandel. Les deux sont fraîchement terminés. On a planté. On a décoré. Reste à espérer que les travaux de maintien seront assurés… Et que l’effort sera généralisé ! Dans cet état d’esprit, il faut aussi saluer les efforts, malheureusement pas toujours réussis, de la Beach Authority pour garder propres nos plages, l’intérêt du Premier ministre pour le nettoyage régulier de l’île (même si ne pas salir est toujours mieux) et les quelques graffitis artistiques qui commencent à faire leur apparition ici et là, surtout si cela nous rapproche de l’étonnante vivacité murale de Cartagena en Colombie ou de Valparaiso au Chili ! 

Les plages et le lagon c’est bien. Un service hôtelier de qualité, c’est essentiel. Un arrière-pays qui accueille et qui partage sa culture et son quotidien, c’est excellent pour ceux qui cherchent ça. Un pays propre et discipliné c’est attractif, quoiqu’en disait l’ancien ministre travailliste Ghurburrun qui trouvait, je paraphrase, que le désordre et la saleté faisaient partie de la «couleur locale» que recherchait le touriste… 

Mais il nous faut d’autres «plus» pour mieux ancrer notre tourisme. Nous n’aurons jamais l’équivalent d’un festival d’Avignon du spectacle ou une grand-messe du rock style Glastonbury ni même pas l’attractivité du «cherry blossom» printanier du Japon, mais nous pourrions peutêtre réanimer le festival de la mer, y intégrer nos courses de pirogues colorées, réanimer aussi «Porlwi by Light» (y avait-il une raison avouable pour l’avoir sabordé après 2017 ?) et tendre la main aux diasporas créoles mondiales de la Louisiane à Haïti, des Seychelles à la Martinique, de La Réunion à la République dominicaine. Le créole d’ascendance francophone peut éventuellement ouvrir ses bras à ses cousins lusophones, anglophones et autres et ainsi faire rayonner encore plus notre festival créole ? 

Des concerts de qualité venant de nos pays de peuplement peuvent aider aussi, mais il faut également innover. Pourquoi ne pas inviter les meilleurs artistes mondiaux du graffiti et lancer une «Fiesta du Graffiti» sur un mois mettons, avec oscars et tout le bataclan ? Peut-on s’insérer dans le circuit international du «gaming» ou des innovations robotiques ? Est-ce utopique d’imaginer un festival de cerfs-volants (au style de celui de Dieppe) aux côtés d’une grand-messe de kitesurfing ? Organiser un festival du rhum, avec invitation et sponsorship des grands acheteurs, ne serait-il pas plus naturel à Maurice qu’à Bordeaux ? Surtout si cela se passe dans une reproduction authentique d’une taverne du 19e siècle, corsaires-serveurs y compris, quelque part sur le port ou à la Citadelle? N’est-il pas temps de sortir de nos carcans, d’innover, de se réinventer ? Je suis certain qu’il y a d’excellentes idées nouvelles qui flottent déjà chez nous. La Mauritius Tourism Promotion Authority pourrait peut-être organiser un concours annuel pour les dépister ? 

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Il ne semble pas que cela se calmera de sitôt en Ukraine. Les Russes ne reculeront pas et s’ils sont sous menace de défaite, les chances sont qu’ils vont considérer la mobilisation de nouvelles troupes (**), ou des armes plus destructives pour ne pas perdre la face. Le chimique ? La bombe nucléaire tactique ? En attendant, on joue à la roulette… russe avec une des plus grosses centrales nucléaires d’Europe ! Du côté de l’Ukraine, Zelensky jure qu’il rangera les armes seulement quand il aura repris la Crimée, annexée de force par la Russie en 2014 et il ne cesse d’être renforcé en armes et en ressources pour affronter son envahisseur. Ça promet une très longue guerre tout ça, puisque la paix ne se signe généralement que lorsque l’un des deux protagonistes se trouve défait ou suffisamment coincé. Or, l’Ouest, ayant tant fait déjà, ne peut désormais laisser tomber l’Ukraine et Poutine ne saurait quitter l’Ukraine sans pouvoir, à défaut d’une victoire complète, proclamer une victoire stratégique d’importance que Zelensky lui refuse, mordicus, à raison. 

La situation ne s’est sans doute pas améliorée depuis la semaine dernière avec la visite de Pelosi à Taïwan. Les déclarations de Pelosi à Taipei sont provocantes d’elles-mêmes face aux trois communiqués qui, jusqu’ici, définissaient les relations sino-américaines, y compris sur Taïwan, même si le troisième semble être «une erreur» gênante (***). La Chine a enclenché des manoeuvres guerrières dans le détroit de Taïwan, mais n’envahit pas, hésitante parce qu’elle sait qu’une telle décision va toucher directement son économie déjà confrontée à des ralentissements inquiétants pour toutes ses ambitions (****). 

Mais si la Chine avait explicitement soutenu la Russie en février dernier, elle n’avait pas passé le Rubicon du soutien tangible, guerrier ou autre et elle pourrait maintenant ne plus hésiter après la visite de la petite dame aux os fragiles ; profitant d’une guerre par proxy en Ukraine que l’on ne pourrait lui reprocher, puisque toutes les démocraties y sont déjà engagées… à ce même titre ! 

Si cela se concrétisait, la planète va vraiment nager dans la mélasse ! D’autres appelleront cela une récession…

(*) https://www.history.com/this-day-in-history/reagan-fires-11359-air-traffic-controllers

(**) La Russie a une armée de volontaires pour le moment et semble ne pas vouloir la conscription pour ce qui n’est, après tout, qu’une « opération militaire spéciale » plutôt qu’une invasion ou la véritable guerre que c’est, en fait.

(***) https://thehill.com/opinion/international/410931-scrap-the-third-communique-with-china-keep-the-six-assurances-to-taiwan/

(****) https://www.cnbc.com/2022/04/28/op-ed-the-four-big-threats-to-chinas-economy.html