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L’Américain Jardine au jardin d’Angus Road
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L’Américain Jardine au jardin d’Angus Road
Le nouvel ambassadeur américain à Maurice, Henry Jardine, a-t-il voulu jouer au… fin diplomate en tenant des propos fort élogieux sur notre pays lors de son audition devant le Sénat des USA ?
En effet, Henry Jardine, un diplomate de carrière, a décrit Maurice comme «un modèle, tant sur le plan politique qu’économique, pour l’Afrique, la région de l’océan Indien et au-delà» à l’intention des membres de la commission sénatoriale chargée d’interroger tout ambassadeur nommé par la Maison Blanche afin qu’il puisse démontrer qu’il serait capable de fonctionner dans le pays où il sera accrédité. D’autres commissions examinent les nominés à d’autres fonctions. C’est dire qu’il serait difficile pour un «colleur d’affiche» comme à Maurice de se faire nommer sans l’approbation des commissions sénatoriales et cela malgré le soutien du président.
A vrai dire, la description combien flatteuse de Maurice donnée par l’éventuel ambassadeur est loin d’être exagérée si on fait abstraction des nombreuses controverses politiques qui enflamment les passions dans le pays de même que dans la diaspora.
D’autre part, des notations ponctuelles données à Maurice par des institutions économiques et financières étrangères de même que des organisations comme Reporters sans Frontières et récemment encore de l’International Institute for Democracy and Electoral Assistance (IDEA) viennent démontrer que tout ne serait pas rose au paradis. Maurice a pris des décennies depuis les premières grandes manœuvres de sir Seewoosagur Ramgoolam et Gaëtan Duval depuis 1969 à se bâtir cette réputation de paradis, de démocratie vivante et d’unité dans la diversité ethnique et culturelle et terre d’accueil pour touristes comme investisseurs. Il serait fort regrettable que quelques années de vives controverses amplifiées par des technologies de la communication fassent que Maurice devienne un Zimbabwe-sur-Mer.
L’ambassadeur Jardine – dont les ancêtres normands ont suivi Guillaume le Conquérant outre-Manche pour s’installer solidement en Ecosse et se disperser aussi par la suite en Amérique du Nord, à Hong Kong et dans le Pacifique – joue sûrement sur le long terme. Sa résidence à Vacoas voisine celle de notre Premier ministre mais ce sera là une pure coïncidence.
Dans le contexte de 2022, l’ambassadeur des Etats-Unis redevient un personnage central à Maurice surtout que notre pays et la GrandeBretagne s’apprêtent à trouver la formule qui verrait Port-Louis asseoir sa souveraineté sur les Chagos tout en permettant à l’Oncle Sam de maintenir ce qui est considéré comme sa plus grande base aéronavale hors du territoire américain. Forcément Maurice aura à négocier directement avec les Américains sur certaines questions d’ordre logistique.
Les diplomates américains à Maurice ont joué profil bas lors des dernières décennies car il n’y a eu aucune ‘live issue’ pouvant les inquiéter, tous les partis politiques du pays étant plus ou moins d’accord sur les grandes orientations de notre diplomatie. Par contre en 1982, les Américains eurent des soucis suspectant le MMM d’être proche des Soviétiques et des Libyens. Anerood Jugnauth se chargea de régler le problème libyen en janvier 1984 et l’Union soviétique se désagrégea par la suite. Ce n’est que maintenant que ce qui reste de ce géant soviétique, c’est-à-dire la Russie, veut jouer dans la cour des grands.
De 1982 à 1992, les Américains s’assurèrent de la présence de fortes personnalités à la tête de leur mission diplomatique à Maurice. Ainsi, l’ambassadeur Robert Gordon assista aux grands chamboulements de 1982. Puis Ronald (Feysal) Palmer, marié à une princesse malaisienne et dont le nikah fut célébré à Maurice même, représenta les Etats-Unis pendant les années bouleversantes de 1986-89. Par la suite, l’ambassadrice Penne Korth, une amie personnelle du président George Bush, fut très active de 1989 à 1992, quand Anerood Jugnauth s’installa solidement à la tête du pays suivant sa victoire sur le MMM en 1989 lors d’une partielle dans le fief mauve de La Caverne-Phoenix et surtout sa victoire aux élections générales de 1991 avec le soutien du même MMM. Penne Korth organisa même une rencontre au sommet entre le Premier ministre Jugnauth et le président Bush à la Maison Blanche.
En raison du dossier Chagos, le nouvel ambassadeur Jardine suscitera beaucoup d’intérêt à Maurice. Sur une note personnelle, on voit que Henry Jardine maîtrise, parmi d’autres langues, le bengali. La langue des ancêtres – côté maternel – de Kobita Jugnauth fut le bengali. Voilà un trait commun qui pourrait faciliter des échanges entre voisins à Angus Road.
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