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Jacindamania
«I’m leaving, because with such a privileged role comes responsibility. The responsibility to know when you are the right person to lead and also when you are not. I know what this job takes. And I know that I no longer have enough in the tank to do it justice. It’s that simple.»
Ces mots qui ont ponctué la démissionsurprise de Jacinda Ardern, prévue le 7 février prochain, comme Première ministre de la Nouvelle-Zelande, ont de quoi troubler les politiciens des pays, comme le nôtre, où l’on a tendance à s’accrocher à son fauteuil de chef, indépendamment de l’âge ou du nombre de mandats, voire de l’état de santé physique ou mentale.
Née en 1980, Jacinda Ardern est la plus jeune dirigeante du pays depuis 1856 ; elle est aussi la plus jeune leader de l’histoire du Parti travailliste de là-bas. Elle incarne avec Justin Trudeau, Sanna Marin, Emmanuel Macron et, plus récemment Rishi Sunak, la nouvelle génération de politiciens pouvant faire le pont entre l’ancien et le nouveau monde ; des dirigeants-ponts entre les générations – espèce humaine qui fait cruellement défaut chez nous, dans notre République de vieux schnocks, expression mise en avant, dans les colonnes de l’express-dimanche, par KC Ranzé – qui, le 3 novembre 2013, faisait ressortir : «Le Digest of Demographic Statistics de 2012 nous rappelle, en effet, que 87,7 % de la population est âgée de moins de 60 ans. Qu’est-ce qui nous vaut donc que le leader du Parti travailliste ait 66 ans et nous promette, au détour d’une inspiration douteuse, 15 ans de plus ? Le leader des mauves «révolutionnaires», Bérenger, inamovible depuis les années 70, a aujourd’hui 68 ans. Anerood Jugnauth, s’il est du côté gagnant aux prochaines élections de 2015, finira son mandat à 90 ans !»
Dix ans plus tard, rien n’a changé sous nos cocotiers, sauf que SAJ est parti rejoindre SSR au Jardin botanique de Pamplemousses…
Après être devenue en octobre 2017, à 37 ans, Première ministre de la Nouvelle-Zélande, Jacinda Ardern, au lieu de consolider son leadership, d’investir dans sa carrière personnelle, et de monter les uns contre les autres, fait la place aux autres. Avec une sincérité désarmante, elle avoue que d’autres politiciens de son entourage ont davantage de jus qu’elle pour tenir les rênes du pays : «Je n’ai tout simplement plus assez d’énergie pour quatre ans supplémentaires.» Le contraste est saisissant : ici nous avons surtout des contreexemples de comment abuser de ses prérogatives, jalousement exercées, pour rester au pouvoir, quitte à saborder la démocratie et à renvoyer les municipales, en ignorant le cri de la rue.
Saluée aussi pour sa gestion exemplaire de la pandémie de Covid-19, Jacinda Ardern cultive une image de politicienne plongée dans le réel, au milieu de la mêlée et proche des gens. Jouant à fond la carte de la transparence, elle n’a jamais cessé d’informer régulièrement ses concitoyens sur les réseaux sociaux, sans le filtre de conseillers ou de ministres dépassés, ou déconnectés. Elle a aussi donné un aperçu de son leadership lors des attaques terroristes de Christchurch, survenues le vendredi 15 mars 2019 ; attaques qui avaient causé la mort de 51 personnes. Dès le lendemain, elle avait étreint les familles des victimes et s’était rendue sur les lieux du drame et lors de ses allocutions, elle avait fait preuve d’une grande fermeté concernant le port d’armes à feu.
Pour tout cela, Jacinda Ardern fait figure de femme politique atypique. Elle avait annoncé, en 2018, sa grossesse sur les réseaux sociaux. Elle avait en fait appris la nouvelle quelques jours seulement avant son élection, et son bébé n’a jamais été un obstacle que ce soit au bureau, au Parlement ou à l’ONU. Une double consécration pour une PM-maman que l’Histoire saluera pendant longtemps encore.
Parmi ses discours, l’on retiendra ses propos sur le changement climatique qui nous guette tous : «What greater threat is there to our wellbeing than the current threat of climate change? GDP may say your country is thriving, but it’s not thriving if it’s also degrading the environment and contributing to CO2 emissions. We have undertaken a wellbeing budget, where we’re embedding that notion of making decisions that aren’t just about growth for growth’s sake, but how are our people faring? How is their overall wellbeing and their mental health ... How is our environment doing? These are the measures that will give us a true measure of our success...»
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