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Notre contribution durable à la démocratie

6 mai 2023, 08:36

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(...) 1963-2023. Le contexte a certes changé, mais le combat de l’express demeure le même. Les valeurs défendues par les pères fondateurs du journal en faveur de l’Indépendance orientent toujours, 60 ans après, notre ligne éditoriale – fondée sur le mauricianisme et un développement intégral et intégré vers un avenir social, économique, écologique et numérique, dans l’intérêt du bien commun. 

En fait, l’Indépendance du pays aura surtout été «une occasion et un outil de changement», pour reprendre les mots du Dr Philippe Forget, le phare intellectuel de notre groupe de presse. D’une part, une occasion historique pour couper le cordon ombilical avec la Grande-Bretagne, afin de faire éclore une nation (au-delà d’un pays) et, de l’autre, un outil économique pour repenser l’avenir et le progrès selon une perspective purement mauricienne. C’est dans cette optique que l’express naissant épouse naturellement le combat du Parti travailliste parce qu’il croit, contrairement à d’autres journaux, en la capacité du pays, et de ses habitants, et ce, malgré les prédictions alarmistes des savants Meade et Naipaul qui entrevoyaient, eux, un avenir impossible pour notre pays, perdu au milieu de l’océan Indien. 

Mais une fois l’Indépendance acquise (1968), l’express se démarque rapidement de l’action gouvernementale de sir Seewoosagur Ramgoolam, afin de pouvoir mieux exercer son regard critique de presse libre. Notre journal a alors continué son action en toute indépendance, assujettie à aucun parti politique, n’ayant de comptes à rendre qu’à ses lecteurs. Le propre de l’express : bousculer les vieilles idées, stimuler la réflexion, au nom d’un seul idéal, celui du progrès et de l’union du pays. En 1983, le journal pose la question : «N’importe quel Mauricien peut-il aspirer à devenir Premier ministre ?» Aujourd’hui encore, cette question reste d’actualité à Maurice et personne ne peut vraiment y répondre. Car la durée de vie de nos dinosaures politiques (à la tête de leur parti respectif) rivalise sans complexe aucun avec celle de bien des dictateurs africains… 

En parlant du Continent, nous restons durablement en retard, à bien des égards. Ainsi, le combat pour des radios libres n’a abouti, lui, qu’en 2001. Jusque-là, certains mettaient en avant «la fragilité» du tissu social mauricien pour empêcher l’émergence de ces radios libres, libératrices de la parole citoyenne. En 1995, le président du ‘Steering Committee’ sur la libéralisation des ondes, feu Germain Commarmond, estime que cette liberté des ondes pourrait menacer l’unité nationale : «Maurice connaît la paix, contrairement à d’autres sociétés multiraciales dans le monde. (…) Les nationalistes se côtoient, et c’est parce que l’État reconnaît leurs spécificités propres qu’ils ne sont pas à couteaux tirés. (…) J’ai compris qu’il fallait aller prudemment dans cette affaire de libéralisation des ondes.» 

Et chose impensable dans plusieurs pays africains, à ce jour : la télévision, à Maurice, demeure parapublique, soit à la solde de l’État qui refuse donc une libéralisation totale des ondes. Pire, l’État contrôle aussi les publicités financées par la trésorerie publique et destinées aux journaux en fonction de leur tirage, et bloque les fonds et l’institution (le Media Trust) réservés à la formation des journalistes. C’est dans le seul but de contrecarrer les journaux indépendants comme le nôtre, qui ont souvent un ton critique – et insolent – de l’action gouvernementale, que l’État exerce ses pressions autoritaires et n’hésite pas à recourir aux délits de presse criminels (véritable non-sens démocratique). D’ailleurs, les tentatives de gagging order confirment cet acharnement contre la presse libre et indépendante. 

Cependant, depuis plusieurs années déjà, Internet vient changer la donne. Le citoyen se fait journaliste, et l’on ne peut pas ou plus le censurer, comme jadis on censurait les journaux aux Casernes centrales. S’il défend d’abord ses intérêts, le citoyen journaliste permet par ailleurs d’appréhender une info sous différents angles, permettant ainsi au journalisme de multiplier ses sources d’information. 

De par son histoire, La Sentinelle entend rester un groupe de presse indépendant, autonome financièrement et libre journalistiquement. Nous avons toujours résisté aux malheureuses tentatives de déstabilisation de la presse libre, et ce n’est pas aujourd’hui que nous allons nous taire ni nous laisser faire. Nous avons heureusement les moyens de nous défendre et nous croyons en la justice mauricienne. Ce combat actuel pour défendre le principe de la liberté de la presse et celui de la liberté d’expression nous l’avons toujours mené. C’est inscrit dans nos gènes et c’est notre contribution durable pour consolider la démocratie mauricienne (...) 

Extrait du livre : 60 ans, le récit d’un journal (et d’un pays)