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Corporate social politics
Souvent MEF varie. Dans une étude réalisée en mars dernier, la Mauritius Employers’ Federation (MEF) estime que « la responsabilité sociale des entreprises (RSE) est volontaire et ne doit pas être régie par une loi ». Or, il y a trois ans, une autre étude de l’organisation patronale avait conclu que huit entreprises locales sur dix pensaient alors que le gouvernement ne faisait pas assez pour les encourager dans cette voie.
Le coup de pouce était donné dès juillet 2009. Sous la forme d’un Corporate Social Responsibility Fund national auquel toute entreprise profitable était désormais tenue de contribuer 2 % de ses bénéfi ces annuels. Afi n de financer des projets sociaux dans des domaines allant de l’environnement à l’éducation. Mais il faut croire que ce n’est pas cet encouragement-là que souhaitaient les entreprises. Car la MEF pense que la contribution RSE « équivaut à une augmentation de l’impôt sur les sociétés, surtout pour les entreprises qui ne peuvent mettre en place leurs propres programmes RSE… ».
Encore une incongruité. Car la situation en 2008 semblait justement indiquer que la mutualisation des dépenses RSE était une stratégie cohérente. Car si à l’époque, environ 90 % des entreprises avouaient ne pas faire assez dans le domaine, elles étaient, en revanche, une sur deux à ne pas savoir comment dépenser un éventuel budget de responsabilité sociale. À cela, il faut ajouter la part non négligeable de petites entreprises qui n’avaient pas, en 2008, les moyens de constituer des équipes chargées de l’élaboration et du suivi des projets RSE.
Trois ans plus tard, les choses ont bien évolué. Sept entreprises sur dix se disent désormais prêtes à appliquer les directives du gouvernement en la matière. Les grands groupes qui dépensent Rs 500 000 ou plus par an ont, eux, mis en place des programmes RSE très structurés avec des équipes étoffées. Tandis que les petites entreprises – celles dont les 2 % de bénéfices n’atteignent pas Rs 50 000 – préfèrent plutôt reverser directement leur contribution à l’État, faute de pouvoir gérer un programme RSE à l’interne.
Cette série de chiffres probants pourrait nous amener à penser que le programme RSE du gouvernement est un retentissant succès. Mais ce n’est pas vraiment le cas. Si certains commentaires et réserves de la MEF semblent friser la mauvaise foi, d’autres ont, par contre, le mérite de pointer précisément en direction des plus grosses lacunes de la stratégie gouvernementale. En une phrase, le récent rapport de la MEF résume tout :
« Il y a un certain fl ou autour des directives RSE et il est en règle générale diffi cile d’obtenir des informations et conseils adéquats du comité RSE. »
Ce constat, les entreprises ne sont pas les seules à le faire. Les ONG censées bénéficier des financements privés tout en travaillant en étroite collaboration avec les entreprises sont tout autant perturbées. De manière globale, et depuis de nombreuses années, les groupes les plus importants – donc ceux qui dépensent le plus dans le social – se battent pour pouvoir décider d’eux-mêmes des secteurs prioritaires dans lesquels injecter leur budget RSE et choisir, dans le même temps, les ONG avec lesquelles ils travailleront. Or, tout cela est devenu passablement compliqué.
La faute à un flou artistique entretenu au niveau du ministère de l’Intégration sociale et de l’Autonomisation économique. De l’aveu des ONG et du milieu des affaires, la National Empowerment Foundation semble avoir troqué sa stratégie d’autonomisation pour celle de l’assistanat. Cela se traduit, sur le terrain, par des solutions à court terme (et fl eurant souvent le clientélisme politique) à des problèmes passablement complexes. Résultat : un certain nombre d’entreprises, parfois contraintes de contribuer dans des
domaines comme celui du logement, ont le sentiment de devoir se substituer à un ministère de la Sécurité sociale défaillant.
La majorité des entreprises ayant un gros budget RSE souhaitent résolument l’investir dans des projets correspondant à leurs valeurs, par exemple à travers la lutte contre certaines maladies ou pour la préservation de l’environnement. Tandis que d’autres envisagent plutôt leur implication comme le point de départ pour la création d’un terreau fertile pouvant, demain, leur assurer une main-d’œuvre qualifiée, des sous-traitants expérimentés ou encore un environnement proche assaini et embelli.
Mais au lieu de disposer d’une totale autonomie dans leurs choix, souvent justifiés, les entreprises les plus importantes doivent obtenir l’aval d’un comité RSE de plus en plus confus sur ses objectifs à long terme. Et qui donne l’impression de prendre certaines décisions avec des arrière-pensées politiques. Il faut reconstituer notre vision RSE. Car elle semble tout simplement absente ces derniers temps…
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