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Enfants de l’échec
L’échec scolaire aurait dû affoler, de ses coups de Jarnac, notre conscience nationale. Mais, cela n’est pas le cas. L’île Maurice retient davantage les 68,13% de réussite aux examens de fi n de cycle primaire, le fameux et impitoyable Certificate of Primary Education, que ces 30% qui ont échoué à ces épreuves. Chaque année, nous redessinons ainsi la carte de quelques heureux élus et précipitons une majorité de nos enfants dans le vortex de l’échec.
C’est le choix que nos décideurs ont fait : le sacrifice de nos enfants. Pitoyable spectacle au nom du culte de l’élitisme.
Cependant, ce serait irrationnel de tout mettre sur le compte de ce culte. La dernière enquête de PISA de l’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE), rendue publique le 7 décembre dernier, révèle que les pays où il y a plus d’enfants performants en compréhension de l’écrit sont des pays de l’Asie, dont la Corée, Hong Kong, Singapour, le Japon… La Finlande, qui occupait généralement la première place de ce classement, a été rétrogradée à la troisième place. Ce que l’on retient de cette enquête, qui soumet à des tests de deux heures un demi-million d’élèves dans plus de 70 pays, c’est qu’elle consacre des pays aux systèmes éducatifs les plus rigides et coercitifs. Des pays où les enfants et les jeunes ne dorment pas plus de six-sept heures par jour. Nous pouvons nous réjouir d’une certaine flexibilité et souplesse du système mauricien.
Ce serait, toutefois, une injure à l’intelligence collective de nos enfants que de les soumettre à un système qui a consacré le bachotage comme sacrosaint principe. Le problème, en fi n de compte, n’est pas l’élitisme. Il vient de cette machine scolaire qui produit des citoyens incultes. Avec la prolifération et la sophistication des outils de communication qui infiltrent notre vie, il est à parier que la tendance ira en s’accentuant. Car on aura moins de temps à consacrer à la lecture et à l’observation. Du coup, tout ce qui, en dehors du système pouvait nous pousser vers la culture, se trouve relégué au second plan.
Ces derniers temps, le ministre de l’Education, Vasant Bunwaree, a fait preuve d’une certaine volonté de refonte. On ne peut parler encore de réforme.
Mais, il faudrait encourager ce ministre dans la voie qu’il a empruntée. Réduire donc cette pression constante qui repose sur les jeunes épaules de nos enfants. Faire de l’école un espace où s’expriment la créativité et l’originalité. Et enfin, engager les parents dans un processus de transmission de savoir où la seule obsession ne se réduit pas à la réussite à tout prix.
Autrement, on connaît la chanson. On continuera à produire des enfants sansonnets.
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