Publicité
Jeu d’acteur
Lumière, caméra… action. Pour la galerie ou pour leurs propres carrières, trois politiques se livrent ces derniers temps à une opération d’envergure. L’objectif reste le même pour tous : convaincre et marquer les esprits Le problème, c’est que tous n’y arriveront pas. Petite présentation des acteurs… Comment ne pas commencer par Rama Valayden, l’« Attorney General ». Poursuivi pour propos séditieux, il est pourtant un homme soulagé. Car à l’issue de son audition par la police ce jeudi, c’est en choeur que lui et son bataillon d’hommes de loi ont dit qu’il n’a « rien à se reprocher. » Mais qui donc a pu penser que Valayden allait finir devant le tribunal ? Qui a cru que le Premier ministre allait laisser un ministre critiqué de toutes parts en place, s’il n’était pas lui-même convaincu qu’il n’allait rien lui arriver ?
A vrai dire, la séquence s’est déroulée à la perfection. Valayden tient des propos condamnables. Il est rappelé à l’ordre par le Premier ministre, qui contredit au passage la réalité statistique des allégations de son ministre. Ce dernier se repent. Une bande de flics qui se sent visée dans cette affaire porte plainte. Celle-ci est instruite. Comme par enchantement, seule une partie de l’enregistrement du discours litigieux est récupérée. Ce qui fait de cette pièce un élément irrecevable dans l’instruction. Voilà une faille de procédure qui ne fait perdre la face à personne. Au réalisateur qui a mené de main de maître cette séquence, on est en droit de dire : chapeau !
*
* *
Dans le cas de notre deuxième acteur, il n’est pas question de chapeau mais de béret. A quelques mois des élections, Pravind Jugnauth peine toujours à porter avec panache le fameux béret de campagne du père. Du coup, il bat la campagne… en bus. Ce qui n’est pas sans rappeler l’éternel perdant des campagnes présidentielles françaises : François Bayrou. Qui avait innové en déambulant dans un bus roulant à l’huile de colza. Celui de Pravind Jugnauth aurait pu rouler à l’huile de « Sunflower. » Mais passons…
Pravind Jugnauth est actuellement dans la position de l’acteur qui pourrait être le grand oublié du casting électoral. Dans les coulisses, on apprend que l’offre de Navin Ramgoolam au poucet MSM a fondu comme neige au soleil. Des 16 ou 18 tickets que le MSM comptait récolter initialement, il n’en reste que 8. Du coup, l’acteur Pravind doit démontrer sa popularité pour que le réalisateur Navin Ramgoolam l’embauche.
Il est vrai que Ramgoolam observe du coin de l’oeil la mobilisation du MSM. Et on ne parle là que de démonstration de force et non de la déclamation des idées prouvant que le MSM a « réussi à faire de la politique autrement ». Ramgoolam n’en a cure des « idées phares » du MSM. Celles-ci - rétablissement de la peine de mort, baisse drastique de la TVA et abolition du « National Residential Property Tax » – iraient d’ailleurs droit à la poubelle si le MSM se joignait à
l’Alliance sociale (AS).
L’enjeu immédiat du MSM est donc de prouver à Ramgoolam qu’il possède un ancrage dans les circonscriptions où un candidat de l’AS pourrait se retrouver en difficulté face à des adversaires coriaces du Mouvement militant mauricien (MMM). Mais nous pensons qu’il n’y aura pas de monstration de force demain. Le MSM, malgré l’entrée au Parlement de son chef, reste toujours un petit parti. Et face à ce déficit de popularité, Ramgoolam plus que jamais pourrait être tenté de distribuer les rôles aux acteurs de sa propre troupe.
*
* *
Il faut admettre qu’en plaçant Rama Sithanen aux finances, Ramgoolam n’a sans doute pas fait d’erreur de casting. Toutefois, le ministre des Finances interprète le 18 novembre un budget des plus épineux. Il jure que celui-ci ne sera pas « populaire et électoraliste. » Et se réfugie derrière son arrogante expérience - il aime rappeler qu’il a présenté « 11 budgets en comptant celui du stimulus package » - pour affirmer que les décisions qu’il prendra seront toutes dans l’intérêt pays.
Quel intérêt ? Avec le réchauffement climatique et les enjeux du développement durable, la politique économique se doit d’être durable. En facilitant les investissements et les réformes dans les énergies, l’environnement et les infrastructures. Annoncé en fanfare dans le budget 2008-2009, le projet Maurice Ile Durable est presque tombé dans l’oubli depuis. Faute d’une structure organisationnelle adéquate, mais aussi à cause de la tergiversation des décideurs politiques. Mais l’heure tourne. Maurice se doit désormais non seulement d’avoir mais aussi d’appliquer et financer son « Blueprint for energy sector ». L’Etat, conformément à l’approche volontariste que prône Sithanen, doit instaurer un cadre fiscal incitatif pour permettre l’investissement des ménages, des industries et de l’Etat dans les technologies et infrastructures vertes.
Que Sithanen ne vienne pas nous dire que c’est l’argent qui manque ! Car les planètes sont en train de s’aligner pour Maurice. L’Union européenne fera don de Rs 136 millions à Maurice dans les mois à venir pour financer les projets verts. D’autres aides suivront. Le président de l’Agence Française de Développement, qui sera au pays cette semaine, apporte également une surprise de taille. En effet, Maurice bénéficiera d’un prêt de Rs 5,2 milliards (€ 120 millions) minimum pour les années financières 2010 et 2011.
Nous arrivons à un moment où les efforts de l’Etat dans le domaine du développement durable ne souffrent plus de contraintes financières. C’est à Rama Sithanen et ses collègues du gouvernement de relever les défis. Pour ces acteurs-là, l’heure n’est plus aux répétitions. Budget, lumière, caméra… action !
Publicité
Les plus récents