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Echange de faveurs
Il y a un point commun entre le scandale des plages privatisées et les propos discriminatoires qu’aurait tenus le ministre Michael Sik Yuen. Les deux illustrent le système travailliste à l’oeuvre. C’est un système qui intègre le principe de l’exploitation partisane des institutions et des ressources de l’Etat. L’hégémonie des rouges – et de leur appendice bleu - sur les rouages de l’Etat peut faire des dégâts considérables.
Les dérives actuelles compromettent la neutralité des ministères et des services publics. Elles font peser une menace sérieuse sur la qualité de notre démocratie. Le président de l’Equal Opportunities Commission, Brian Glover, a pris la mesure du problème. Commentant le dossier Sik Yuen, il remarque avec pertinence que « c’est une affaire très sérieuse ».
Effectivement, si les allégations faites contre Sik Yuen s’avèrent, c’est que le coeur de la démocratie est attaqué. Le ministre du Tourisme est accusé d’avoir fait du chantage électoral. La charge qui pourrait être retenue contre lui devant l’Equal Opportunities Tribunal est grave. Il pourrait être inculpé d’avoir extorqué des votes par la menace. Rien que parce qu’il avait donné un cimetière à ses mandants, l’ex-ministre Ashock Jugnauth avait, lui, été reconnu coupable de corruption électorale par une cour de justice.
Si dans l’affaire des supposées menaces qui auraient été formulées à Curepipe, la responsabilité pénale de Sik Yuen est engagée, en revanche dans l’affaire du pandit Sungkur, le problème est d’ordre politique et non juridique. Il s’agit, dans ce cas, d’un bout de plage alloué à une famille qui peut exercer une influence importante dans la circonscription du Premier ministre. Une autre famille, non moins influente, habitant la même circonscription, a déjà obtenu un bail sur l’îlot Gabriel. Elle serait d’ailleurs sur le point d’obtenir d’autres faveurs.
Ces pratiques ressemblent davantage à du clientélisme qu’à « l’élargissement des opportunités d’entreprenariat, y compris des opportunités d’accès aux ressources nécessaires » que promettait le manifeste du Parti travailliste en 2005. En accordant des faveurs à leurs proches, les dirigeants avancent souvent le prétexte qu’ils ne font que démocratiser l’économie. Ils n’expliquent pas pourquoi les bénéficiaires de la générosité de l’Etat ne sont pas des « ti dimunn » mais des « nu dimunn ».
Subash Sungkur, frère du pandit, admet dans l’interview qu’il a donnée à l’express samedi que ce n’est pas la valeur intrinsèque de son projet qui a compté mais l’influence que le religieux peut exercer sur les dirigeants : « Après que toutes nos demandes ont été rejetées, nous avons pensé que notre frère, le pandit, est désormais quelqu’un d’influent dans la société et nous lui avons demandé de faire une demande de terrain à bail à son nom. »
Le clientélisme outrancier a donné un pouvoir indu aux organisations socioculturelles. Au nom de la démocratisation de l’économie, l’Etat accorde des faveurs aux coteries politiques et religieuses. Celles-ci arrivent non seulement à profiter des ressources de l’Etat mais également à décider des nominations, des promotions et des mutations dans bien des services publics. La démocratisation de l’économie est un projet de gouvernement. Le clientélisme est une méthode de gouvernement. Ne confondons pas les deux.
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