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La pauvreté, notre fardeau

2 août 2013, 22:14

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Avez-vous vu comment vivent les habitants du quartier de Bangladesh et de Camp-Firinga ? Ce sont des images de Maurice d’aujourd’hui qui illustrent durement à quel point la pauvreté gagne du terrain, alors que plusieurs préfèrent détourner le regard ou regarder leur «smartphone».

 

Non seulement les signes sont visibles, les chiffres sont également clairs et inquiétants : nous avons de plus en plus de ménages qui vivent sous le seuil de la pauvreté alors que la «tente bazar» coûte, elle, de plus en plus cher (bien plus de Rs 8 000). Manifestement, la centaine de milliers de Mauriciens qui touchent moins de Rs 6 000 par mois et les chômeurs, qui sont en nombre grandissant, figurent parmi ceux qui sont les plus touchés. Une récente étude nous montre que dans le panier «ration» – d’une famille modeste de quatre personnes, par exemple –, il y a sur la liste des vivres une boîte de fromage, dix œufs et deux boîtes de thon à consommer sur quatre semaines.

 


L’endettement des ménages a connu une hausse de  Rs 5 milliards en une année et l’inégalité des revenus (l’indice de Gini) ne cesse de progresser depuis une dizaine d’années. De l’autre côté, le public voyageur se verra contraint de payer son ticket d’autobus plus cher, grandement à cause de l’incompétence des gestionnaires. Même la redevance de la MBC, monopole d’État, augmente !

 



Notre drame national c’est que nous avons les mêmes visions étriquées, aussi bien dans l’opposition que dans le gouvernement. Le re ou le re(re). Devrait-on se résoudre à accepter des gens qui ne peuvent pas réinventer notre modèle ? Pouvons-nous accepter ce statu quo ?

 

***


Mont-Lubin, mercredi dernier. Jean-Paul marche avec son sac de 40 kilos, rempli de nourriture pour cabris, sur les épaules. Il s’apprête à descendre à Soupir, en espérant que quelqu’un s’arrête pour alléger sa peine, mais résigné, à poursuivre sa route jusqu’à son domicile s’il manque de chance. C’est en fait le même homme résigné à son sort que nous avions rencontré dimanche dernier à l’hôpital de Crève-Cœur, au chevet de sa petite fille de quatre ans, violée par son propre neveu. Au départ, Jean-Paul ne comprenait pas pourquoi on s’intéressait au cas de sa fillette. Les pauvres d’ici ne sont pas dans la presse, m’a-t-il dit. Au niveau des autorités aussi il y avait un certain désir de ne pas trop médiatiser cette sordide affaire.

 


Finalement, Jean-Paul a reçu la visite de dirigeants lui offrant leur aide. Parce que ceux-ci ont lu les journaux, parce qu’au lieu de se cacher derrière sa honte il a parlé. Lui n’attendait rien de personne. Ni même de la presse. Et c’est pourtant une voiture de «l’express» qui l’a ramené chez lui ce mercredi.

 



Sa fille allait mieux ce jour-là, elle a pu s’alimenter. Il a alors eu la force de porter son sac. Pour que ses animaux eux aussi puissent manger. Avant, son corps ne suivait pas. Les fardeaux s’étaient empilés sur ses épaules. Il est grand temps d’aller au-delà d’un chèque de Rs 10 000 pour aider tous les Jean-Paul de Rodrigues et de Maurice à ne plus avoir à porter seuls leur fardeau social.