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La politique de la fellation*
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La politique de la fellation*
Si un palier inférieur au niveau zéro de la politique existe, Pravind Jugnauth l’a vraisemblablement atteint. Se sachant écouté par ses partisans et les journalistes, le leader du MSM a sciemment choisi de manier l’insulte et la vulgarité ce jeudi (voir page 9). Non content d’insinuer que Paul Bérenger est un alcoolique, Jugnauth s’est laissé aller à dire que ce dernier « pe sous le Dr Navin Ramgoolam »* afin de contracter une alliance avec les travaillistes. On connaissait la politique de caniveau. Pravind Jugnauth invente la politique de la fellation !
Le patron du MSM serait bien mal inspiré de justifier ce grave dérapage verbal en arguant qu’il n’est pas le seul chef de parti à faire de la vulgarité un élément de son discours politique. Il est vrai que Paul Bérenger est un « serial dérapeur » en la matière. Durant la dernière campagne électorale, il s’est abaissé jusqu’à dire de Ramgoolam « so fi gir kouma fes* ».
Au Parlement, c’est le machisme et la grossièreté puante de Bérenger qui ont parlé quand il a enjoint Nita Deerpalsing, la députée rouge, de « al rod enn mari ». Ramgoolam aurait tort de vouloir se démarquer du lot. Il a démontré, lui aussi, devant des milliers de personnes, qu’un micro défectueux peut l’exaspérer au point de traiter sa collaboratrice de « pitin* ». En matière de vulgarité, Pravind semble donc évoluer parmi ses pairs.
Si les comportements de Bérenger et de Ramgoolam sont déplorables, celui de Pravind Jugnauth est par contre inexcusable. Car depuis son entrée en politique, comme conseiller municipal de la mairie de Vacoas-Phoenix en 1996, jusqu’à son ascension au poste de ministre en septembre 2000, Pravind Jugnauth n’a cessé de clamer son appartenance à « la jeune génération ».
De juillet 2005 à mars 2009, alors que le leader du parti soleil était dans l’opposition extraparlementaire, il a même fait de sa jeunesse un argument de vente politique. Le cadet de Bérenger et Ramgoolam d’une quinzaine d’années, Jugnauth a ressassé sa volonté de faire de la politique « autrement » en s’appuyant sur les « débats d’idées ». Décidement, on en était bien loin jeudi dernier !
Si elle est condamnable, l’attitude de Pravind Jugnauth témoigne, par ailleurs, d’un mal plus profond minant notre classe politique. Les quatre grandes formations du pays – PTr, MMM, MSM et PMSD – ont effectué toutes les permutations d’alliances possibles depuis 1967. Et depuis l’enterrement définitif des idéaux révolutionnaires du MMM en 1982, tous les partis ont pratiqué une politique plus ou moins sociale-démocrate mêlant interventionnisme d’Etat et libre entreprise.
Le débat de fond sur les rôles respectifs de l’Etat et du secteur privé a été tranché au début des années 90. Depuis, les confrontations ne portent que sur les moyens à mettre en oeuvre pour atteindre des objectifs qui – à quelques nuances près – semblent être les mêmes aussi bien chez les mauves que les rouges. A titre d’exemple, les uns parleront d’empowerment tandis que les autres préfèreront le concept de participation au développement économique et social.
En l’absence d’idées fondamentales à défendre, on s’attaque donc à l’homme. On calomnie en évoquant les moeurs des uns, la cupidité des autres, la soif du pouvoir d’un troisième ou « la mentalité colon » de celui ci. Pravind Jugnauth, dont l’arrogance et le sentiment de supériorité sont désormais bien connus, a raté encore une occasion de marquer sa différence d’avec Bérenger ou Ramgoolam. Il aurait pu se distinguer de ses adversaires par la hauteur de sa réflexion et la pertinence de son discours. A la place, il nous a gratifié d’un « worst of » de ce dont les patrons travaillistes et MMM sont capables. La politique « autrement », ce sera pour une autre fois…
* Ce n’est pas à nous de censurer les propos de nos leaders politiques. Leur « poésie » est donc reproduite telle quelle. S’ils choisissent de manier la vulgarité, nous en ferons état. Sans concession !
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