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L’après Copenhague

20 décembre 2009, 05:31

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«Si le climat était une banque, vous l’auriez déjà sauvé. » La phrase du président vénézuélien, Hugo Chavez, a fait mouche lors du sommet de Copenhague sur le climat. Mais ce genre de cynisme ne fera pas avancer les choses. Le Sommet de l’ONU doit être considéré comme un semi-échec. Même si le président Obama parle d’une « percée sans précédent » en faisant référence aux engagements pris par les USA ou la Chine pour réduire leurs émissions de carbone. Mais avec quels moyens ?

C’est avec amusement qu’un éditorialiste du « Wall Street Journal » écrit : « We can’t wait to hear Mr. Obama tell Americans that he wants them to pay higher taxes so the U.S. can pay China to become more energy efficient and thus more economically competitive. » En effet, la Chine, qui est le principal émetteur de carbone au monde depuis quelques années, se taillera la part du lion des $ 100 milliards d’aide étrangère destinée à permettre aux pays en développement – la Chine en fait partie – de réduire leur émission de  carbone.

Vu de loin, on pourrait être tenté de conclure que ces sommets de l’environnement, de Rio de Janeiro en 1992 à Copenhague en passant par celui de Kyoto en 1997, n’auront pas servi à grand-chose. Nous aurions tort. Car nous regardons à chaque fois le sommet de la pyramide. Or, c’est à la base que les choses bougent. La conscience écologique est devenue globale. Elle est vivace et en progression.

A Maurice, la notion de développement durable (DD) gagne du terrain. Ainsi, une enquête d’opinion menée chez un large échantillon de la population a démontré qu’un Mauricien sur quatre (25,8 %) souhaite que le gouvernement fasse de l’écologie sa politique  prioritaire. Ces chiffres sont extrêmement encourageants. Car le DD est une question de mentalités et de mode de vie. Plus nos citoyens seront réceptifs à la question de DD, plus ils remettront en cause leurs comportements. La mécanique est complexe. Elle fonctionne grâce à des effets d’entraînement mêlant actions étatiques et effet d’émulation personnel et communautaire. Or les deux semblent absents à Maurice.

Certes, on nous rétorquera que la vision Maurice Ile Durable (MID) existe. Mais la vision MID n’a pas encore été traduite dans la réalité. Car notre « National Energy Policy » n’existe toujours pas. Et le cadre juridique et administratif plus global gouvernant tous les aspects de MID demeure encore à être élaboré. D’ailleurs, ce n’est que ce vendredi que le Conseil des ministres a annoncé l’élaboration d’une « National MID Policy » qui devrait être prête en juin 2010. Il faudra exiger du gouvernement que le comité chargé de la rédaction de ce document ne s’égare pas dans des débats philosophiques. Et produise des recommandations applicables dans les plus brefs délais.

En complément de l’action étatique – et à plus petite échelle - l’effet d’émulation doit pouvoir aider la conscience écologique à se propager dans l’île. Le covoiturage, l’adoption de technologies vertes, de nouvelles habitudes de consommation, le choix du recyclage et du compostage sont autant d’attitudes à développer chez le Mauricien. Pour cela, il faut que nos voisins, nos collègues de bureau, nos politiques, chefs d’entreprises, et nous-mêmes montrions le bon exemple. Il existe des « role-models » de ce type dans le pays. Mais ils sont malheureusement peu connus. Pourtant, nous gagnerions à découvrir leur sens de l’engagement écologique. Comme celui de ce directeur d’une grande banque locale qui a abandonné le confort de sa berline allemande pour l’efficience d’une voiture hybride depuis quelques semaines.

Si le sommet de Copenhague n’a pas accouché d’un accord historique et coercitif  amenant les Etats à adopter des politiques plus vertes, il a néanmoins mis en lumière la conscience écologique mondiale qui veut désormais qu’on passe à l’action. Les chefs d’Etat n’ont pu se résoudre à des compromissions industrielles et financières trop importantes. Mais plus que jamais, les citoyens du monde veulent changer leurs  comportements afin de retarder la catastrophe climatique globale qui s’annonce. Le succès de ce sommet sur le climat ne dépend en fait pas que des actions des gros pollueurs comme la Chine, l’Inde ou les USA. Mais aussi des nôtres. Nous pouvons encore, par nos actions, transformer le semi-échec de Copenhague en succès.

Rabin BHUJUN