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Ordo ab chao
Comment restaurer l’ordre à partir du chaos ? La question n’est pas que philosophique. Elle est politique, sociétale. Des travailleurs bangladais se la posent en ce moment à Tropic Knits . D’anciens télé- opérateurs d’ Infi nity BPO s’interrogent aussi. Des Mauriciens, inquiets et mécontents de cette manie des puissants ( politiques) de ne rendre de comptes à personne, se proposent également de soulever ces problèmes dans un nouveau journal citoyen. Tous cherchent des repères.
Des îlots de bon sens où s’amarrer.
Nita Deerpalsing leur en fournit un. Dans un pays où le pouvoir gouvernemental paraît omnipotent et omniprésent, la députée travailliste ressasse une vérité qui doit paraître exotique à nombre de ses camarades de l’Assemblée nationale.
Elle explique que contrairement aux ministres, elle ne fait pas partie du gouvernement. Elle a même l’obligation, du fait de son appartenance au législatif, de lui réclamer des comptes.
La précision est la bienvenue. Il est vrai que notre système westminsterien établit une séparation des pouvoirs « souple » entre l’exécutif et le législatif. Mais il n’empêche que le Premier ministre – du haut de sa fonction de Leader of the House et chef du gouvernement – ainsi que ses ministres apparaissent étonnamment irresponsables devant l’Assemblée nationale.
Si l’opposition fait plus ou moins bien son travail par moments, les députés de la majorité semblent, eux, persuadés qu’ils sont grassement payés dans l’unique but de dire « Aye » aux projets de loi présentés par le gouvernement et d’applaudir chaudement toute mesure gouvernementale vaguement populaire. Et, accessoirement, demander que le terrain de foot d’un village de leur circonscription soit remis en état. Il ne reste plus qu’à se demander si les Deerpalsing, Sayed- Hossen ou Dayal feront des émules. Pas si sûr… * * * Ce qui est certain par contre, c’est que le Directeur des poursuites publiques ( DPP) ne semble, lui, souffrir d’aucun syndrome de confusion des genres. Cette semaine, il a démontré encore une fois qu’il sait freiner l’emballement de certains sous- fi fres. Qui se distinguent régulièrement par le zèle dont ils font preuve dès qu’il s’agit de s’attaquer à des personnes en délicatesse avec le pouvoir – d’un ancien ministre des Finances au journaliste, en passant par le syndicaliste.
Satyajit Boolell a ainsi décidé de ne pas poursuivre notre confrère Dharmanand Dhooharika pour « diffamation criminelle » devant la District Court de Port- Louis. En octobre dernier, c’est Ananda Rajoo, le rédacteur en chef du Militant, qui avait bénéfi cié du discernement du DPP. Qui avait renoncé à le poursuivre pour « publication de fausses nouvelles » . Un délit passible d’un an d’emprisonnement.
Au moment où certaines institutions semblent paralysées – notamment à cause de querelles internes entre nominés politiques –, le parquet apparaît comme immunisé contre ce genre de pagaille. La personnalité de Boolell y est sans doute pour quelque chose. Il s’est ainsi distingué dès sa prise de fonctions, en février 2009, par son accessibilité. N’hésitant pas, par moments, à expliquer spontanément le fonctionnement de son administration en direct sur Radio One . * * * S’il y en a une, par contre, qui refuse de céder aux impératifs de la transparence, c’est bien Maya Hanoomanjee.
Jeudi, elle s’en est encore une fois pris à ceux qui lui réclament des comptes. En réponse à des articles de presse évoquant le cas d’un de ses proches qui a bénéfi cié plusieurs fois d’une ambulance du Samu pour effectuer le trajet entre son domicile et l’hôpital Victoria de Candos, Hanoomanjee n’a rien trouvé de mieux que de contre- attaquer.
En accusant un ancien ministre MMM d’avoir fait bénéfi cier des mêmes avantages à son épouse, victime d’un accident de la route.
OEil pour oeil, dent pour dent, irresponsabilité pour irresponsabilité.
C’est ce type de raisonnement politique qui explique pour beaucoup les gabegies devenues endémiques au sein de certaines administrations et de quelques corps parapublics. Où les passe- droits et abus en tous genres sont reproduits par les nominés politiques successifs, au fi l des changements de régime. Dans ces lieux, le chaos semble défi nitivement avoir remplacé l’ordre.
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