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Plaidoyer pour la presse

10 mai 2013, 18:03

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Dans l’intérêt de tous les Mauriciens, la presse mauricienne peut-elle, enfin, faire bloc pour défendre deux causes majeures : le libre accès à l’information et la liberté d’expression ?
  

A lire les piques puériles que des journalistes se lancent entre eux, il semblerait que cette mission s’avérera laborieuse mais, espérons, pas insurmontable.
  

Un confrère, dans sa livraison d’hier, publie qu’il y aurait eu un rififi à «l’express», à cause, entre autres, de mon retour, et que “des journalistes ont dû intervenir pour calmer les esprits.” C’est faux ! Pire : on allègue gratuitement que je suis un agent de la CIA ! Ce n’est pas vrai et c’est indigne des gens généralement sérieux de prétendre le contraire. Je pense que ces gens-là regardent un peu trop les films et mélangent réalité et fiction.
  

Alors que notre groupe de presse fête ses 50 ans, nous préférons faire notre introspection afin de cerner et corriger nos faiblesses et mieux nous préparer pour affronter demain. De toute façon, les enjeux nationaux – le mauricianisme et un développement intégral et intégré vers un avenir social, économique, écologique et numérique dans l’intérêt de tous nos compatriotes – sont bien trop importants pour qu’on perde du temps sur ces enfantillages.
  

Et puis, l’heure est davantage au rassemblement des journalistes si on ne veut pas que le rapport de Geoffrey Robertson ne finisse dans un tiroir comme cela a été le cas pour celui de Ken Morgan, expert britannique qui avait produit, en 1999, à l’invitation du Media Trust, un excellent rapport, contenant plus ou moins les mêmes recommandations que Robertson. Mais la presse n’a jamais su se mettre d’accord pour faire avancer  la profession.
  

Pourtant, dans le passé, durant les moments difficiles, la presse a su surmonter ses divergences et se montrer solidaire. Contre la censure gouvernementale des années 60 et 70, contre la loi-caution des années 80, contre la paralysie du Media Trust en 2006, les journalistes se sont certes serré les coudes. Mais cette solidarité est restée ponctuelle et non durable. Les associations de journalistes et de rédacteurs en chefs, nées dans un tam-tam médiatique, meurent en silence, au grand bonheur de ceux qui redoutent une presse libre et indépendante.
  

Notre lutte pour une allocation équitable et transparente de la publicité gouvernementale, nous la menons étrangement seuls. Si la justice demeure un terrain neutre, il existe par contre d’autres moyens, des moyens qui intègrent dans la sérénité au lieu de trancher dans le vif. Il y a plusieurs sujets cruciaux à discuter de manière civilisée, pacifiée : la définition du rôle de la presse au sein de la démocratie, l’instauration d’un respect mutuel entre journalistes et politiciens, la formation professionnelle des journalistes, l’avènement d’une «Media Commission» et les hommes qui en seront responsables, la nécessaire révision des lois criminelles contre les journalistes, l’incontournable libération des ondes TV, le besoin d’un partenariat entre la presse et le gouvernement sur des projets de développement durable, la lutte contre les fléaux sociaux et la drogue, etc.
  

Au-delà des problèmes qui peuvent exister entre «La Sentinelle» et le pouvoir, il y va de l’avenir d’une presse qui a jalonné l’histoire politique du pays depuis le XVIIIe siècle et de ceux qui doivent aujourd’hui en prendre la relève. C’est une grande dame qu’on maltraite, qu’on déchire, qu’on brûle, qu’on blesse inutilement. Elle a droit au respect. Des politiciens comme des journalistes. Car notre démocratie, sans elle, n’en serait pas une.