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Quelle campagne ?

10 janvier 2010, 06:42

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Tentons quelques prévisions au sujet de la campagne électorale à venir. Pour les besoins de cet exercice, on n’aura bien évidemment pas besoin de boules de cristal ou de cartes de tarot. Car prévoir comment se déroulera la prochaine campagne ne relève pas de la divination. Dans ce domaine, il suffit de se souvenir des campagnes passées pour prévoir celle à venir.

Première tendance : la campagne sera technologique. Le Parti travailliste (PTr) a compris avec acuité l’apport des technologies de la communication dans une campagne électorale. Déjà en 2005, des milliers de Mauriciens décrochaient leur téléphone pour entendre, avec stupeur, Navin  Ramgoolam, les inviter à un grand meeting régional. Nous avons pu  constater ’efficacité de cet outil. Nous nous souvenons encore de cet ouvrier de Piton, qui ne sachant pas qu’il avait écouté un message préenregistré, essayait de nous convaincre : « Navin ti call mwa ! » Dans les jours à venir, on pourrait également entendre des « Paul ti call mwa ! »

D’autres outils technologiques – « Facebook » et « Twitter » - seront mis à contribution durant cette campagne. Les jeunes électeurs de 18 à 30 ans se sont complètement  approprié ces réseaux sociaux. Il n’y a qu’à voir, par exemple, le dynamisme qui règne, sur les groupes « Facebook » du PTr ou du MMM pour réaliser qu’Internet est désormais un lieu privilégié d’échange et de confrontation des idées politiques de nos jeunes. Il faut quand même remarquer que même si les groupes des partis politiques affichent des  milliers de membres, seule une poignée d’entre eux participent activement au débat. Mais malgré ce bémol, aucun parti politique n’envisagera cette campagne sans l’apport de ces nouveaux outils technologiques.

Deuxième tendance : la campagne sera insipide. Nous risquons de redécouvrir les mêmes débats archaïques durant celle-ci : aussi bien dans le fond que la dans forme. Le souhait de Ramgoolam pour un débat « sans démagogie et attaques personnelles » sur les « issues » n’est pas prêt de se réaliser. La faute en incombe d’ailleurs d’abord aux électeurs. Friands de politique spectacle et adeptes des phrases assassines, ils se contentent facilement des discours démagogiques des opposants. Et se satisfont de la posture  habituelle des sortants, qui disent invariablement avoir produit « le meilleur bilan possible » malgré un contexte économique et social difficile. Si l’on ajoute à cela la fâcheuse propension d’une large frange de l’électorat à rallier invariablement le camp de ceux perçus comme étant les plus forts, on obtient une campagne électorale qui brillera par la vacuité des idées débattues. D’ailleurs, les idées intéressantes, s’il y en a, auront toutes les chances de croupir dans les programmes électoraux. Qui, comme d’habitude, ne seront vraiment lus que par une poignée d’électeurs.

On peut quelque part comprendre cette désinvolture face à une élection sans enjeu. En effet, cette campagne électorale, avec son opposition désunie et quémandeuse d’alliance. Avec son électorat qui perçoit Ramgoolam comme le gagnant de facto de la joute. Avec sa vacuité d’idées et d’argumentaires - comme lors de la partielle de Quartier- Militaire-Moka en février. Cette campagne- là ne sera après tout qu’un référendum.

Dont la question sera : « Souhaitez-vous que Navin Ramgoolam soit réélu Premier  ministre ? » Cela nous amène à la troisième tendance : la campagne sera sale et vulgaire. Puisqu’on ne défend aucune idée. Puis que l’élection semble être sans enjeu, les partis politiques vont prioritairement recourir aux méthodes basiques, aux démonstrations de force usuelles, pour marquer les esprits. Et ainsi capter ou conserver l’intérêt de l’électeur lambda.Les oriflammes nous polluerons encore la vue. Les posters sales et laids seront placardés sur chaque mètre carré de mur disponible dans le pays. Des « agents » seront payés à ne rien faire, si ce n’est à boire des bières tout en « gardant » des bases à chaque coin de rue de nos villes et villages.


Les partis politiques frappés d’amnésie deviendront « exlex ». Ils emploieront ces mêmes « bouncers » qu’ils dénoncent aujourd’hui. Le temps d’une campagne, ces gorilles  deviendront des « agents » chargés d’assurer la sécurité des candidats, des meetings ou des colleurs d’affiches. La facilité de ces individus décérébrés à céder à leur pulsion de violence est connue. Aussi, nous pouvons sans nous tromper prévoir que cette campagne sera très violente par moments. Tout comme on peut prévoir que des journalistes, fouineurs et faisant leur métier, seront victimes de ce genre d’énergumènes.


Ce ne sont pas des prédictions de boule de cristal. Tout cela se produira. Parce que nos politiques, tout en épousant les nouvelles technologies, conservent leurs réflexes archaïques. Faisons avec. Car comme dit l’adage, nous avons les politiques
que nous méritons…

Rabin BHUJUN