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Roupie : l’impossible unanimité
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Roupie : l’impossible unanimité
Quel est le meilleur taux de change de la roupie pour l’économie mauricienne ? La question n’en finit pas de diviser les opérateurs. Et les positions se radicalisent. D’un côté, les exportateurs notam¬ment du secteur textile ou du sea food hub et les hôteliers réclament à cor et à cri une roupie compétitive, en clair plus faible, afin de conserver leurs parts de marché et de maintenir un niveau de rentabilité correct. En outre, les entre¬prises de ces secteurs sont souvent en¬dettées et un retour à l’équilibre ou des profits plus élevés leur permettraient de mieux faire face à leurs engagements.
Quand le ministre des Finances, Xavier Luc Duval, a annoncé en octobre un programme d’achat de 100 millions de dollars et l’achat effectif de 8,5 millions de dollars, tous ces chefs d’entreprise ont été ravis. Car cette initiative a immédia¬tement provoqué un recul de la roupie. « L’avenir de Maurice passe par des expor¬tations dynamiques et donc par une roupie compétitive », souligne un des principaux présidents de conseil d’administration du pays. En outre, certains hommes d’affaires n’hésitent pas à mettre en avant les risques qu’entraîne une roupie trop forte sur l’em¬ploi. Et la légère baisse du nombre d’em¬ployés (-0,5 %) au troisième trimestre dans les entreprises orientées vers l’exportation (EOE) semble leur donner raison.
Toutefois, de plus en plus de voix s’élèvent pour dénoncer les effets pervers d’une roupie trop faible. À commencer par le Gouverneur de la Bank of Mau¬ritius (BoM), Rhundeersing Bheenick. « Nous ne croyons pas en la croissance à n’importe quel prix. Notre objectif c’est de réaliser une croissance équitable, inclusive et durable », a-t-il rappelé lors de son dîner annuel.
Les membres du comité de politique monétaire (CPM) de la BoM ont, par ail¬leurs, fait état de leur inquiétude par rap¬port à d’éventuelles résurgences de ten¬sions inflationnistes. D’abord au niveau mondial.
Les prix des matières premières agri¬coles sont restés à des niveaux élevés de¬puis la précédente réunion du CPM en septembre. Au point que le Food Price Index de la FAO est demeuré proche de ses plus hauts niveaux en 2012.
Sur le plan local, les membres du CPM notent aussi des signes de résur¬gences de tensions inflationnistes et soulignent que les risques de hausse de l’inflation sont plus tangibles en raison des prix élevés des denrées alimentaires, de la récente dépréciation de la roupie, de l’impact attendu des hausses de salaires dans la fonction publique et des dernières mesures budgétaires. On attend également un ajustement à la hausse des prix pétro¬liers à la pompe, ce qui devrait contribuer à alimenter l’inflation. Ces perspectives se reflètent d’ailleurs dans les prévisions du Budget qui tablent sur une inflation moyenne sur 12 mois (headline inflation) de 6 % en 2013.
Dès lors, un prochain tour de vis monétaire est plus que pro¬bable, ce qui ne devrait pas pousser la rou¬pie à la baisse.
L’économiste Sameer Sharma, spécialiste de la gestion de risque, est également très critique vis-à-vis de la poli¬tique d’affaiblissement de la roupie menée par Xavier Luc Duval.
« Au lieu de dépenser 100 mil¬lions de dollars pour déprécier la rou¬pie dans une vaine tentative pour sauver les industries d’hier, notre ministère des Finances devrait aider à financer les indus¬tries de demain », écrit-il dans Conjoncture, le journal électronique publié par le cabi¬net d’études PluriConseil.
Autre adversaire de la dépréciation de la roupie, Jayen Chellum. Le secrétaire général de l’Association des Consomma¬teurs de l’île Maurice (ACIM) a envoyé un mémorandum au CPM réclamant une hausse des taux au nom de la défense des consommateurs et des épargnants.
Tous ces « stakeholders » doivent se rendre à l’évidence : Maurice ne peut pas contrôler le niveau de la roupie qui dé¬pend avant tout de la parité euro-dollar sur le marché international des changes qui est, rappelons-le, un marché libre. Et ce n’est pas l’achat de 100 millions de dol¬lars par le ministère des Finances qui va y changer grand-chose. La preuve, le bil¬let vert s’est réorienté à la baisse face à la roupie depuis le 25 octobre.
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