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UoM : où en est l’honnêteté ?
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UoM : où en est l’honnêteté ?
D’aucuns diront que l’université ne rate pas une occasion pour faire parler d’elle. Si encore c’était pour faire valoir ses mérites ou mettre en valeur les réussites de son personnel et de ses étudiants, ce serait d’un bon œil mais il n’en est rien de tout ça. C’est plutôt son administration qui est critiquée, décriée, à tort ou à raison, mais dans tous les cas faisant un tort immense à une institution qui devrait être la fierté de notre pays. On est tenté de dire alors qu’elle progresse arithmétiquement, elle régresse géométriquement et se trouve toujours dans le rouge. A peine un semblant de calme revenu après le récent départ du précédent Vice-Chancelier, nous voila repartis dans une autre ‘affaire’, celle de la nomination du prochain VC. Le président du non-academic staff union et celui des étudiants préférant le recrutement d’un Mauricien au lieu d’un étranger.
Pour éclairer le public et pour éviter des on-dit, voyons comment se fait ce recrutement. Cinq membres du Sénat de l’université, essentiellement des Professeurs et/ou des doyens des facultés et six membres du Council incluant son Chairman, font partie d’un Joint Committee pour la sélection du VC. Les critères de sélection selon cet appel sont : l’excellence académique aussi bien dans l’enseignement que dans la recherche et avoir atteint le grade de Professeur d’Université, l’expérience en management et des capacités indéniables de leadership, la démonstration d’une grande éthique et de probité durant sa carrière. Les candidats présélectionnés sont ensuite appelés à un entretien au cours duquel ils sont tenus de présenter et défendre leur vision pour l’université, document qu’ils auront préalablement soumis en écrit. Le Joint Committee recommande trois candidats par ordre de priorité au Council qui entérine le choix du VC. Donc, le processus est clair et les règles bien fixées. A priori, il ne devrait pas y avoir de problème. Et pourtant ! Comme à l’accoutumée dans notre pays, des voix discordantes s’élèvent toujours pour mettre en cause une décision, un peu comme dans un système anarchique. Sans pointer qui que ce soit du doigt, on peut raisonnablement se demander si tout est fait honnêtement, si toutes les questions liées à ce recrutement ont été examinées minutieusement ? Tentons de comprendre.
Le Joint Committee a décidé en février dernier de faire un appel de candidatures international et cette décision a été entérinée par le Council. Les présidents du non-academic staff et du Students’ Union font tous deux partie du Council et donc ils ont eu amplement l’occasion de s’exprimer sur la question, en l’occurrence de montrer leur désaccord sur le recrutement d’un étranger bien avant l’appel à candidature. On aurait pu s’interroger à juste titre sur le choix d’un étranger. Est-ce durable dans le temps ? Le temps, il en faut pour remettre l’université sur les rails. En Inde, par exemple, la pratique est de toujours donner la chance à ceux qui se sont sacrifiés en restant au pays. Il est très rare de voir un Indien ayant fait carrière aux Etats-Unis diriger une université ou un centre de recherche en Inde. Oui, on dira : c’est l’Inde. Elle n’achète pas non plus le pétrole étranger tant les intérêts nationaux sont forts ! Toutefois, il est un peu tard de contrer la décision de recruter un étranger lorsque l’un termine en première position. Est-ce par instigation ? Est-ce de la naïveté ? Difficile à croire à ce niveau. Dire que des étudiants et leur union faisaient les louanges du précédent VC, un étranger également ! Par conséquent, une telle attitude est inacceptable car elle crée un climat de méfiance envers l’autorité (ici le Council) et de la déstabilisation.
Le président de l’Academic Union (UMASU), quant à lui, n’est pas contre le recrutement d’un étranger et il clame que le mérite doit primer. Quel mérite ? Là aussi, on pourrait se demander si la question a été mûrement réfléchie avant qu''une décision soit prise. Honnêtement, est-ce qu’un candidat mauricien ayant fait carrière à l’université de Maurice a les mêmes chances qu’un étranger ? Quand on regarde le parcours du VC qui a été choisi, notamment au sein de l’administration universitaire, peut-on avoir les mêmes opportunités à Maurice ? On pourrait aussi pousser le raisonnement à l’autre extrême et pourquoi ne pas proposer un comité de sélection international comme c’est le cas actuellement pour la promotion au rang de professeur. Ce comité aurait au moins le mérite d’être indépendant. Il faut aussi savoir que le salaire d’un Professeur à l’UoM est plafonné et la seule possibilité de progression de carrière est de se diriger vers les postes de ProVC et de VC. Une situation bien incongrue d’ailleurs ! Les membres du Joint Committee ont sûrement établi une démarche très objective et quantitative pour évaluer chaque critère. L’enjeu était bien trop important pour ne pas faire dans l’approximatif ou dans le subjectif. Toutefois, il est difficile de croire qu’un VC étranger connaît l’université dans sa profondeur pour en dégager une vision et une stratégie qui la mènera vers les sommets. Pourtant c’est censé être un critère important dans le choix du VC. Après tout, peut-être que la vision ne compte pas autant dans la décision des membres du comité puisque l’application du plan Morgan est partiellement mise en route. Le prochain VC risque donc de se voir imposer ce plan et, qui plus est, ne pas avoir la possibilité de choisir ses proches collaborateurs, à savoir les ProVC, puisque l’appel à candidatures devrait être lancé très bientôt. On pourrait penser qu’un VC étranger aurait plus de peine à faire que l’université profite pleinement des réseaux anglophone et francophone comme c’est le cas à l’échelon national. Nous avons toujours su tirer profit de nos liens divers. Mais les membres du Joint Committee et ceux du conseil en ont décidé autrement, honnêtement et en leur âme et conscience très certainement. Il faut s’y plier dans la mesure où il ne semble pas y avoir de vice de procédure.
Comment faire comprendre que le VC n’est pas un homme providentiel ou un magicien ? Seul, il lui sera impossible de mener à bien l’université. L’université a besoin de sérénité, elle a besoin d’un leader qui pourrait fédérer les différentes composantes et leur faire partager la même vision et à qui on donnera les moyens de faire son job sans entrave aucune. De grâce, ne laissons pas notre université s’enfoncer un peu plus chaque jour. Elle est déjà au creux de la vague, la pire situation depuis sa création. Et pourtant, nombreux sont les membres du personnel qui croient dans leur institution et qui donnent le meilleur d’eux-mêmes au quotidien, avec les moyens de bord, pour qu’elle accomplisse sa mission. Les défis sont nombreux : comment accroître le nombre d’étudiants sans que la qualité de l’enseignement en souffre ? Comment accroître la performance en recherche ? Comment faire pour que l’université contribue davantage au développement économique ? Et comment faire pour qu’elle soit plus présente dans la société mauricienne ? Les intérêts immédiats des uns et des autres doivent être mis de côté et seul l’intérêt de l’institution doit compter. Une université forte est un atout pour notre pays.
 
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