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Jennifer Louis, Agaléenne

«La base militaire est imposante»

24 septembre 2023, 21:07

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«La base militaire est imposante»

Elle est arrivée à Maurice en juin en compagnie de sa famille car sa fille devait se faire opérer. Elle regagnera son île natale ce mardi. Une fois de retour là-bas, cette mère de trois enfants reprendra son travail en tant que «general worker» au sein de l’Outer Island Development Corporation. En dépit du manque d’infrastructures et des conditions précaires, elle estime que la vie est meilleure chez elle qu’à Maurice... Quid de la base militaire ? De quoi est fait le quotidien sur l’archipel ?

Elle est grande comment la base militaire à Agalega ?

Elle occupe une superficie significative (voir hors-texte). Elle comprend diverses installations, notamment des pistes d’atterrissage, des casernes, des entrepôts et d’autres infrastructures nécessaires aux opérations militaires. Personnellement, je n’ai jamais eu l’occasion de la voir de près, mais je peux vous dire qu’elle est imposante...

Quid de la présence de militaires indiens sur l’archipel ?

Leurs quartiers, leurs dortoirs ? La présence des militaires indiens sur l’archipel est notable. Ils ont leurs quartiers et leurs dortoirs bien définis au sein de la base militaire. Ces installations sont généralement fermées au public et sont utilisées exclusivement par le personnel militaire. On ne sait pas comment c’est de près, à l’intérieur.

Que font les gars d’Afcons (NdlR, Afcons Infrastructure Limited est une multinationale indienne de construction et d’ingénierie basée à Mumbai) ? Et ceux de l’ Outer Island Development Corporation (OIDC) ?

Les employés d’Afcons sont principalement impliqués dans la construction et la maintenance des infrastructures de la base militaire, y compris les pistes d’atterrissage et les bâtiments. Les employés de l’IODC s’occupent généralement de l’exploitation des ressources naturelles de l’archipel.

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Le gouvernement central nous cache-t-il donc des choses ?

Il peut y avoir des spéculations et des préoccupations au sujet du gouvernement central, mais il est important de noter que le niveau de transparence peut varier et que certaines informations liées à la base militaire sont peut-être classifiées. Il y a certes des préoccupations concernant les activités à Agalega, en particulier en ce qui concerne la base militaire. Cependant, il est difficile de confirmer ce qui se passe. Il y a plusieurs thèses et hypothèses. Nous, les Agaléens, sommes les derniers à savoir ce qui se passe chez nous. Vous à Maurice, en savez peut-être plus que nous !

Malgré tous ces secrets, pourriez-vous nous décrire ce que vous voyez au quotidien là-bas ?

Nous y voyons principalement des militaires en activité en raison de la présence de la base. On n’arrive toutefois pas à comprendre ce qu’ils font, on préfère éviter les ennuis. Sinon, pour la population, chaque jour, hormis le travail, il y a la pêche ou l’entretien des cultures. Les soirées sont souvent consacrées aux rassemblements en famille ou entre amis. Une journée type peut commencer tôt le matin avec la pêche et la cueillette de noix de coco.

En gros, la vie à Agalega est toute simple. Les gens vont travailler puis restent chez eux. Il n’y a pas grand-chose à faire, le seul passetemps des hommes est le football. Il y a une grande plaine où ils peuvent «bat boul». D’autres s’occupent de tâches à la maison. Quant à moi, je vais travailler – je suis general worker au sein de l’OIDC et en rentrant, je m’occupe de mes enfants et du dîner. Les femmes restent souvent chez elles, surtout celles qui ne travaillent pas. De temps en temps, nous faisons de la marche. Nous nous rendons à la boutique ou nous allons acheter des légumes. Il y a deux boutiques, une au nord de l’archipel et l’autre au Sud. Vu qu’il n’y a pas de bus à Agalega, il faut prendre des minibus ou marcher. Il y a des familles qui possèdent un moyen de transport.

Que font les autres Agaléens comme métier ? Combien touche-t-on comme salaire ?

Les métiers courants comprennent la pêche, la culture de la vanille, et la cueillette de noix de coco. La majorité des Agaléens travaillent en tant que general workers et handy workers pour l’OIDC. Les métiers d’enseignants, de policiers, d’officiers de la Special Mobile Force sont réservés aux Mauriciens qui viennent travailler sur l’île. Les Agaléens ne sont pas recrutés pour ces postes. Nos salaires varient en fonction de la profession, mais ils sont généralement modestes, étant donné la nature insulaire de l’économie. Un general worker peut percevoir autour de Rs 13 000 par mois.

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Quelles sont les infrastructures disponibles sur l’archipel ?

Les infrastructures disponibles sont limitées. Il y a deux écoles, un dispensaire médical, des logements pour les habitants et des installations de base. Cependant, il n’y a pas de grandes infrastructures industrielles ou commerciales. Il y a une école primaire qui vient d’être rénovée et un collège MEDCO. Il n’y a pas de marché non plus à Agalega. C’est l’OIDC qui passe les commandes de légumes et les boutiques les revendent. On compte aussi une succursale de la Mauritius Post and Cooperative Bank. On aurait souhaité avoir des magasins et des supermarchés – à l’échelle de l’île bien entendu – pour effectuer nos achats.

À quelle fréquence débarque le Mauritius Trochetia en réalité ?

Le Mauritius Trochetia débarque généralement sur l’île à des intervalles réguliers, parfois deux fois par mois, mais la fréquence peut varier en fonction des besoins et des opérations militaires en cours. Sa fréquence de visite dépend aussi des besoins logistiques de la base.

Pourquoi la vie est-elle meilleure à Agalega qu’à Maurice ?

Je suis née à Agalega et je trouve que c’est mieux là-bas en raison de la tranquillité et de la simplicité de la vie. Il est vrai qu’Agalega est également plus isolée et moins développée que Maurice, mais si le gouvernement pouvait apporter plus de développements – pas trop, juste ce qu’il faut – la situation serait encore meilleure en dépit de la base militaire. En tout cas, malgré tout, je préfère mon île natale à Maurice.

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Des indices

Jusqu’ici, le gouvernement a toujours nié l’existence d’une base militaire à Agalega. Ce que l’on sait, à l’officiel, c’est qu’une piste d’atterrissage de 3 000 mètres de long, d’un débarcadère pouvant accueillir des cargos surdimensionnés, des bâtiments à étages et des hangars, le tout protégé par une clôture et des barbelés y sont installés. Plutôt surprenant pour les quelque 300 habitants que comprend l’archipel. Sur des vidéos envoyées par des Agaléens, on a pu apercevoir filmés une tour de contrôle, des abris pouvant accueillir des B 737 et A 321, des chambres froides, des entrepôts contenant des bouteilles de gaz, sans oublier l’aéroport qui serait destiné à accueillir des touristes…