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Circonscription n°8, Quartier-Militaire–Moka

La masse silencieuse pourrait faire entendre sa voix

14 octobre 2024, 20:30

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La masse silencieuse pourrait faire entendre sa voix

Les candidats rouges faisant du porte-à-porte à Vuillemin.

À l’approche des élections générales du 10 novembre, la tension monte dans la circonscription n°8, Quartier-Militaire– Moka. Cette région stratégique avait enregistré 45 268 électeurs lors des élections de 2019, mais seulement 37 723 votes avaient été validés. L’Alliance Morisien, dirigée par le Premier ministre actuel, Pravind Jugnauth, avait largement dominé avec une victoire de 3-0. Pravind Jugnauth avait remporté 21 327 voix (56,5 % des suffrages), suivi de ses coéquipiers Leela Devi Dookun-Luchoomun et de Yogida Sawmynaden, consolidant la suprématie du Mouvement socialiste militant (MSM) dans cette région.

Une nouvelle bataille se profile

En 2024, les cartes pourraient être redistribuées. Cette fois-ci, l’Alliance du changement, qui regroupe le Parti travailliste (PTr), le Mouvement militant mauricien (MMM), les Nouveaux Démocrates et Rezistans ek Alternativ (ReA), aligne Dhaneshwar Damry (PTr), Babita Thannoo (ReA) et Govinden Venkatasami (MMM). En face, l’Alliance Lepep, comprenant le MSM, s’appuie une fois encore sur Pravind Jugnauth, mais introduit des nouveaux visages comme Deepak Balgobin (de la circonscription n°9) et Lovin Lutchmanen, qui a œuvré dans l’univers des banquiers.

Un terrain bien occupé par le MSM

En nous rendant sur le terrain, il est évident que l’Alliance Lepep, en particulier le MSM, marque déjà son territoire. Partout, des oriflammes oranges décorent les ronds-points et les rues de la circonscription. Les habitants rencontrés, bien que certains soient critiques, reconnaissent le travail accompli par Pravind Jugnauth et son équipe ces dernières années, en particulier sur des projets de développement tels que la réhabilitation des infrastructures de drainage et l’aménagement de Côte-d’Or.

Les candidats MSM, notamment Deepak Balgobin, sont très actifs sur les réseaux sociaux, publiant régulièrement des photos faisant du porte-à-porte et de rencontres avec les habitants. Le porte-à-porte se fait en compagnie du jeune Lovin Lutchmanen. Une stratégie de proximité qui pourrait s’avérer payante, surtout pour un nouveau visage comme Balgobin.

Une opposition discrète mais stratégique

En revanche, l’Alliance du changement semble adopter une stratégie plus discrète. Pas d’oriflammes, peu d’affiches visibles, mais une présence tout aussi marquante dans les interactions directes avec les habitants. Dhaneshwar Damry notamment est omniprésent sur le terrain, multipliant les rencontres de proximité. «L’Alliance du changement, c’est la force tranquille», nous confie un habitant de St-Pierre. Selon les résidents, cette approche pourrait leur permettre de toucher des électeurs fatigués du tapage médiatique.

lexp - 2024-10-14T202219.118.jpg Rond-point avec les lettres MSM sur la route de Verdun.

Une campagne sous haute tension Alors que la campagne se déroule, les électeurs de la circonscription n°8 restent indécis. Si certains, notamment dans les zones rurales de Quartier-Militaire, continuent à soutenir Pravind Jugnauth pour ses actions de développement, d’autres se disent prêts à donner une chance à l’opposition. La gestion des infrastructures, comme les toitures en tôle offertes aux plus démunis par Yogida Sawmynaden, comme en témoigne une dame âgée rencontrée à la gare, ou encore le fait que ce dernier rencontre des habitants de la région au bureau du MSM près de la gare sont souvent mentionnés comme des points forts. Nous nous sommes rendus au bureau du MSM jeudi à midi. On nous a laissé entendre que Yogida Sawmynaden était très pris dans des réunions avec les habitants et qu’il n’était malheureusement pas libre pour nous rencontrer. Toutefois, Sawmynaden, lié à des scandales, n’est pas candidat cette fois-ci, mais il reste actif en tant que campaign manager du MSM.

dam.jpg Lovin Lutchmanen et Deepak Balgobin au n° 8 et Dhaneshwar Damry faisant du porte-à-porte.

À l’heure où nous écrivons ce reportage, les deux camps affûtent leurs armes. Les réunions, tant du côté du MSM que de l’Alliance du changement, s’enchaînent. Le terrain est déjà fortement investi et les visites quotidiennes des candidats se multiplient. Les électeurs de la circonscription n°8 savent qu’ils jouent un rôle crucial dans l’issue des élections. L’issue demeure incertaine, mais une chose est sûre : les prochaines semaines seront décisives pour déterminer qui remportera cette circonscription stratégique. Les enjeux sont nombreux et le suspense plane. Les résultats du 10 novembre seront à suivre de près, car cette élection pourrait bien redéfinir la carte politique de l’île Maurice.

La parole aux citoyens : «bizin mefie mas silansiez!»

Tous tiennent le même discours. La masse silencieuse s’avérera être un couteau à double tranchant. Dhoorgschand, que nous avons croisé à la gare à bord de son taxi, témoigne que la campagne a démarré à vive allure dans la région. Lui qui véhicule quotidiennement de nombreuses personnes est en contact direct avec les habitants. «Travay isi inn komanse. Dimounn pa bet. Zot kone ki sannla inn travay, ki sannla pann travay. Pa kapav dir pann ena devlopman. Selma kan koze, bizin pa bliye mas silansiez. Sa bann-la ki al vote plis», témoigne-t-il. Pour sa part, Ismet, qui vend des gâteaux sur la place du marché et qui côtoie les habitants quotidiennement, estime que les politiciens ont «semé» et s’attendent à faire la récolte. «Kan ou plante, ou anvi rekolte non? Be kas inn fane. Be kan ou done, ou anvi gagne an retour. Ki sannla ki pann done?»
ismet#.jpg Dhoorgschand et Ismet.

Pour d’autres, des projets comme le pont à Gentilly font sourciller. Pourquoi les travaux n’ont-ils pas été complétés ? Nous nous sommes rendus sur le terrain et, effectivement, le pont est toujours impraticable. Salonee, que nous avons croisée près d’un fleuriste, déplore le fait qu’elle ira voter seulement pour ceux qui vont travailler pour elle. Ainsi, les habitants se préparent aux prochaines élections générales prévues le 10 novembre et les avis sont partagés. Lors de notre rencontre avec divers résidents, chacun a exprimé son point de vue sur l’évolution politique dans la région. L’alliance au pouvoir, l’Alliance Lepep, est perçue par certains comme ayant une forte emprise dans la circonscription et il n’y a qu’à voir les oriflammes. Cependant, le nouveau candidat de cette alliance, Deepak Balgobin, rencontre des avis mitigés. Quelques habitants estiment que ce dernier aura des difficultés à s’imposer, surtout face à un autre acteur important de la course, Dhaneshwar Damry, le candidat de l’Alliance du changement, qui semble très actif sur le terrain. Damry a adopté une approche de proximité, en visitant régulièrement les foyers des résidents et en étant à l’écoute de leurs préoccupations. Cette stratégie lui permet de renforcer son image auprès de la population.

pont.jpg Le pont de Gentilly, toujours pas réparé.

Les résultats s’annoncent donc très incertains. Certains électeurs souhaitent accorder une nouvelle chance à Pravind Jugnauth, le Premier ministre et candidat victorieux des dernières élections, afin de ne pas pénaliser son mandat. D’autres, en revanche, appellent au changement, estimant que si le pays a connu du développement, la circonscription n° 8 n’a pas reçu l’attention nécessaire en termes de projets ciblés.

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