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Retards de livraison et menace de grève
Le port navigue en eaux troubles
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Retards de livraison et menace de grève
Le port navigue en eaux troubles
Pas moins de six navires sont en attente avec leurs conteneurs de marchandises, en raison des jours fériés notamment.
En cette période cruciale, le pays s’est retrouvé au cœur d’une véritable crise logistique au niveau des opérations du port, menaçant les approvisionnements pour les fêtes de fin d’année. Des retards considérables dans le débarquement des conteneurs ont paralysé la chaîne logistique, suscitant l’inquiétude des importateurs et des commerçants. Certains ont reçu leurs marchandises en retard alors que d’autres attendent toujours de recevoir celles qu’ils avaient commandées pour les festivités. En parallèle, les employés menacent de faire grève à partir d’aujourd’hui, accentuant les risques de perturbation des opérations portuaires.
Le blocage logistique a sérieusement entravé le débarquement des marchandises, créant un effet domino qui a compliqué considérablement les circuits d’approvisionnement pour de nombreux industriels et distributeurs.
Les conséquences de cette perturbation se sont fait ressentir à plusieurs niveaux, aggravant les difficultés déjà rencontrées par les entreprises. La paralysie dans le débarquement des marchandises a impacté directement les opérations commerciales des importateurs mauriciens, qui ont été dans l’incapacité d’accuser réception des produits commandés pour la période des fêtes. Certains n’ont pas reçu leurs commandes à temps alors que d’autres attendent toujours.
Les cargos, bloqués devant le port de Port-Louis, souligne un commerçant, ont été contraints de trou- ver des alternatives, se tournant vers d’autres ports pour revenir par la suite. «Un navire peut payer jusqu’à Rs 450 000 par jour passé au port. Ces coûts imprévus alourdissent considérablement la charge financière des compagnies maritimes, les incitant à reconsidérer leur itinéraire et à choisir des solutions plus économiques. Ce sont nous, les commerçants, qui en faisons les frais car nos marchandises arrivent en retard.»
Un autre commerçant de la capitale partage son indignation face aux retards dans le débarquement des conteneurs. Comme pour cette cargaison attendue depuis le 22 décembre, qui aurait dû être débarquée ce vendredi 27 décembre. «Le navire a dû quitter Port-Louis pour Durban, avec un retour prévu seulement après le 10 janvier. Ce cas n’est malheureusement pas isolé, avec pas moins de six navires en at- tente avec les jours fériés.» Les importateurs s’inquiètent du sort des conteneurs destinés au marché mauricien et déplorent le manque de décisions de la part des autorités pour débloquer la situation.
Grève
Ingrid Charoux, directrice de Déco Fête, raconte elle aussi son calvaire. Elle a lancé la prévente de ses produits et ses marchandises sont arrivées le 23 décembre. «J’ai passé toute la nuit à ouvrir les boîtes et à trier le tout pour mes clients, tout en gérant rapidement les commandes de Noël. J’ai accordé la priorité à la livraison des marchandises liées à Noël, et tout a dû être livré en l’espace de deux jours. J’ai continué à livrer mes clients pour leurs festivités du 31 décembre. C’est la première fois en 20 ans d’importation que j’ai fait face à un tel niveau de stress.» En raison de ce retard, «j’ai malheureusement perdu un nombre significatif de commandes, totalisant environ Rs 400 000, car je n’ai pas pu effectuer les livraisons à temps pour les fêtes de fin d’année. À l’avenir, je ferai venir mes produits en juillet pour éviter ce genre de situation. J’ai également une pensée pour les autres importateurs qui ont subi d’importantes pertes en raison de retards similaires, les privant ainsi de leurs ventes prévues», déplore Ingrid Charoux.
En parallèle, les employés du port ont bien l’intention de faire part de leur mécontentement. La Cargo Handling Corporation (CHC) est au cœur des tensions en raison du non-respect d’un accord collectif signé en août dernier. La Port-Louis Maritime Employees Association (PLMEA) dénonce le non-respect de la «Seniority list» dans des promotions au sein de la CHCL, engendrant frustration et grogne. La situation a atteint un point critique, avec une première tentative de «paralysie» du port il y a environ deux semaines, les employés boudant les heures supplémentaires. La menace d’une grève à partir d’aujourd’hui plane. La CHC est désormais à la croisée des chemins, devant prendre des mesures immédiates pour résoudre cette crise et éviter des conséquences dommageables. Cependant, la perspective d’une grève ne fait pas l’unanimité au sein des syndicats du port. Certains estiment que ce n’est pas le moment opportun pour une telle action et ont exprimé leur intention de ne pas y participer. Nous avons tenté en vain d’obtenir une réaction de la Port-Louis Mari- time Employees Association.
Face à cette crise grandissante, les autorités sont appelées à intervenir rapidement et mettre en place des solutions efficaces. Des commerçants partagent leurs préoccupations quant à la dégradation de la situation, exprimant la nécessité d’une coordination urgente entre les différentes parties prenantes, y compris les autorités portuaires et les employés du port. Ils soulignent que cette crise menace de mettre en danger la disponibilité des produits pour les consommateurs. Le risque imminent de grève accentue les inquiétudes quant à d’éventuelles perturbations des opérations portuaires, ce qui pourrait avoir des répercussions significatives sur l’économie locale et les partenariats commerciaux.
Port-Louis à la 327e place sur 344 ports
Le dernier rapport de la Banque mondiale, intitulé «The Container Port Performance Index 2022», met en lumière une situation préoccupante pour le port. Selon ce rapport, Port-Louis, en termes d’efficacité, se retrouve à la 327e place sur 344 ports à l’échelle mondiale, et à la 30e place parmi les 37 pays de l’Afrique subsaharienne.
Ces résultats placent Port-Louis derrière d’autres ports de la région, notamment Toamasina, le port de Madagascar, qui occupe la 10e position. De plus, les ports de Victoria (13e ), Mayotte (15e ) et La Réunion (22e ) surclassent également Port-Louis dans ce classement inquiétant. Ces données mettent en évidence la nécessité pressante d’une réévaluation des pratiques et des processus opérationnels au sein du port. Des améliorations significatives sont nécessaires pour renforcer la compétitivité et la performance du port face à une concurrence régionale de plus en plus féroce. La conjonction de ces résultats inquiétants avec les tensions internes actuelles au sein de la CHC souligne l’urgence d’une action concertée pour surmonter les obstacles et restaurer la réputation du port.
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