Pour ceux qui aspirent à diriger le pays après les prochaines législatives c’est le temps de présenter un full-fledged program gouvernemental crédible, responsable et à la hauteur des défis et enjeux actuels.

1. Ecosystème mondial

Trêve de nombrilisme. Il nous faut impérativement intégrer les profondes mutations structurelles de la mondialisation, dont celles géopolitiques. Le monde vit une crise du sens, et l’humanité est à la croisée des chemins avec la menace des forces terroristes, intégristes, autocratiques et ses variantes fascisantes. Comment trouver notre place dans ce «nouveau monde» avec ses menaces et dangers pour la souveraineté nationale et l’intégrité territoire de notre Etat-océan devrait nous interpeller. Il s’agit de dessiner les contours de notre avenir dans ce monde plein d’incertitudes.

2. Le sens même du développement réduit à la seule dimension économique pose problème. Et ce à tous les niveaux – global, régional, national et local. Aujourd’hui, développement se conjugue avec écologie pour relever le défi du dérèglement climatique de la planète-terre car notre pays est particulièrement vulnérable.

Il y a aussi nécessité de revoir le modèle et la stratégie de développement et repenser ses piliers dans le cadre d’une nouvelle architecture socio-économique et une articulation plus saine des grosses entreprises avec les PME. Il y a besoin de démocratiser, de créer des opportunités. Dans cette nouvelle orientation l’Etat doit retrouver sa dimension stratégique au service d’une vision nationale déclinée en un plan stratégique.

3. Bloquons la dynamique autocratique mortifère en cours ces dernières années. Le passage obligé pour construire l’avenir est le rassemblement de toutes les forces vives, des acteurs du développement et acteurs sociaux. Dans le cadre d’une démocratie vivante axée sur une approche participative. Assurons-nous, pour commencer, d’un équilibre entre les trois pôles de pouvoirs – l’exécutif, le législatif et la judiciaire - pour renforcer le socle de l’Etat de droit avec la séparation des pouvoirs. Commençons par se défaire de la Financial Crimes Commission.

4. L’Education, vecteur du changement pour construire l’avenir, a besoin d’une révolution. Il y a en jeu l’épanouissement des enfants dès leur plus âge en s’appuyant sur une conception plurielle de intelligence pour faciliter l’éclosion des talents, Notre système éducatif est en grande souffrance. Au manque d’enseignants et de logistique et des équipements vétustes, il faut ajouter une refonte même du système afin de ne pas créer de l’exclusion. Lutter contre les inégalités pour faire repartir l’ascenseur social reste un défi majeur de même que la formation des enseignants pour intégrer les récentes avancées dans la pédagogie. La révolution dans le système éducatif doit être portée par une communauté éducative à mettre en place.

5. Notre système de santé publique a révélé ses graves carences avec la pandémie du Covid 19. Trois ans après ces problèmes persistent avec le manque de médecins et du personnel soignant, la pénurie des médicaments, la qualité de la nourriture pour les malades et les équipements et infrastructures vétustes. Il y a un des signes inquiétants que le gouvernement privilégie le système de sante privé au détriment du public.

La gestion du système de santé demande à être repensée pour gagner en efficacité, notamment des structures administratives. Cela renvoie à la question centrale de l’efficacité/productivité de la fonction publique.

6. L’avenir d’un pays c’est sa jeunesse. Cependant, le triste constat est que pour une très grande majorité, les jeunes à Maurice ne croient plus dans l’avenir du pays et ils sont nombreux à vouloir émigrer. Les raisons évoqués sont, entre autres, le népotisme et l’absence de méritocratie. Pour lutter contre le brain drain une politique innovante est nécessaire pour redonner confiance dans le pays et éviter que le pays se vide d’une bonne partie de sa jeunesse. Et ce sur une toile de fond de population vieillissante. qui couve une bombe démographique.

7. La problématique démographique doit être appréhendée au-delà de sa dimension économico-financière (ratio de la dépendance des non actifs aux actifs). Le vieillissement de la population est en effet une problématique sociétale complexe. La surenchère sur le montant de la pension pour séduire ce segment de l’électorat est, disons-le, irresponsable. La population âgée va être au cœur de notre société avec de nouveaux besoins divers touchant la vie en société, ainsi que le hardware et soft ware de notre système de santé.

Il y a urgence pour désamorcer la bombe démographique.

8. Drogue, violences et insécurité

La drogue fait des ravages et le trafic de la drogue est devenu un pilier important de l’économie nationale. La mafia a infiltre les instituions stratégiques du pays. Tous les partis et alliances politiques aspirant à gouverner le pays s’accordent à constater l’intensité et l’amplitude de ce fléau et disent leur volonté de mener une lutte sans merci contre les trafiquants et de consolider les initiatives en cours pour les victimes. Devant ce fléau qui s’est mondialisé avec ses mafias, ses routes et ses hubs, les bonnes intentions ne suffisent pas. Il faut donner les moyens nécessaires à ceux qui luttent sur le terrain tant auprès des victimes et contre les trafiquants et dealers. Les diverses formes de violences qui y sont associées doivent être bien comprises pour trouver les solutions adéquates. Etat d’urgence ??

9. Gouvernance et corruption

La bonne gouvernance est une nécessité vitale et tout doit être mis en œuvre pour en finir notre image à l’international «massacrée» avec les scandales frappant notre centre financier/offshore, et autres affaires touchant la sécurité du pays et le trafic de drogue, avec Maurice comme hub et ses mafias associées. Faisons ce qu’il faut contre le risque de faire fuir les investisseurs dont le pays a besoin pour son développement. C’est un vaste chantier qui demande un profond réaménagent institutionnel. L’image auprès des voyageurs a pris un sale coup avec les déboires de Air Mauritius et la façon dont il les gère.

10. L’égalité citoyenne

Une république démocratique digne de nom doit garantir l’égalité citoyenne ; ce qui signifie les mêmes droits à tous ses citoyens. Et cela implique une lutte constante contre toutes les formes de discrimination – genre, appartenance ethnique, orientation sexuelle, autrement capables – dans toutes les sphères de la société : politique, entreprise et institutions publiques. C’est le vivre ensemble qui est en jeu.

11. La problématique des femmes «La moitié du ciel» est multidimensionnelle. Elle mérite d’être traitée avec toute l’attention nécessaire dans le processus de mener le changement. Les dimensions s’interconnectent : les inégalités de chance et d’espérance, les précarités. Il faut à la fois s’attaquer au plafond de verre dans les postes de responsabilités dans le public et dans les entreprises privées, et intégrer le travail des femmes au sein de la famille dans la contribution économique des femmes. Les femmes sont victimes des différentes formes de violences physiques et psychologiques liées en partie à des mentalités toujours animées par la culture patriarcale dominante et les mentalités associées. Il faut s’y attaquer sérieusement.

12. L’Etat stratégique

Le pays a besoin d’un Etat fort et juste pour assurer la sécurité des citoyens contre les menaces internes et externes. L’Etat doit se moderniser, entre autres avec la numérisation des services publics pour gagner en efficacité avec des gains en productivité. La planification stratégique assurée par l’Etat a pour mission d’apporter de la cohérence à travers une articulation des initiatives. Il va de soi que tout cela doit reposer sur le dialogue social.

Tout processus de changement en profondeur exige une méthode, nécessite une mise en mouvement. Dans les semaines à venir nous développerons les axes d’un programme électoral, y compris la méthode.

Prochain axe : La place de la république mauricienne dans le nouveau monde.