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Manière de voir
L’héroïne des drogues à Maurice
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Manière de voir
L’héroïne des drogues à Maurice
Qui l’eût cru ? Au départ à la fin du 19e siècle, l’héroïne n’était pas une drogue illicite ! C’était «le médicament miracle» contre la toux. Un antitussif qui facilite le sommeil. À base de morphine, elle a été découverte aux États-Unis en 1874, et on constatait déjà une certaine dépendance chez ceux qui l’absorbaient. On la recommandait même aux tuberculeux. C’est à la fin du 19e siècle qu’elle est soumise à des tests par les producteurs.
Rien à redire. On continue à la produire comme sirop, comprimé et pastille, et elle remporte un énorme succès commercial. Elle supprime même la bronchite et la pneumonie tant et si bien qu’elle est en vente libre aux États-Unis. Avant 1914, elle sera même délivrée sans ordonnance. Il faut souligner que dès le début, on ne la donne qu’en faible dosage. Elle remplace la morphine dans la lutte contre l’alcoolisme.
Interdiction
Dans les années 1910, les chercheurs notent qu’elle est très populaire chez les prisonniers. Mais on n’y voit toujours qu’une drogue récréative, moins chère que la cocaïne sur le marché noir. Les autorités prennent enfin conscience de sa dangerosité et, en 1924, il est interdit de vente et de production.
De médicament de santé, l’héroïne devient la drogue la plus addictive et la plus dure à arrêter. Le «crack», lui, provient de la cocaïne sous l’appellation MDMA. Pour l’héroïne, la drogue de l’amour. L’héroïne connaît un trafic et se mondialise dans le domaine des stupéfiants. Chez les drogués, elle provoque un flash de trois à six minutes, plus intense, selon les consommateurs, qu’un orgasme.
Il existe plusieurs façons de la consommer : le sniff, l’injection par voie intraveineuse, l’inhalation… L’opium reste cependant la drogue la plus utilisée dans le monde. Un usage qui remonte à 8 000 ans et vous ferait planer, selon les habitués. Mais à Maurice, l’héroïne est la drogue la plus recherchée, parce que la plus prise. Selon les statistiques, sur 55 000 usagers de drogues, six sur dix dépendent de l’héroïne. Des chiffres en augmentation en raison du rajeunissement des consommateurs.
Avec le temps, le synthétique que l’on doit prendre deux ou trois fois par jour gagne du terrain. Quant aux jeunes femmes de 18 à 24 ans, elles se contentent du cannabis (gandia) deux ou trois fois par semaine. La «nouvelle héroïne» provoque des ravages, surtout parmi les jeunes et gagnerait même les rangs des adolescents encore collégiens.
Effets néfastes
En état de manque, celui ou celle qui se drogue à l’héroïne va passer par tous les maux :douleurs, anxiété, vomissements, diarrhées abondantes, insomnies, spasmes musculaires, mal être, fatigue intense… En cas de prise trop concentrée, elle provoque la surdose, voire la mort. Des statistiques fiables font défaut quant à savoir le nombre de victimes d’overdose d’héroïne. Certains iront jusqu’à s’en prendre à leurs parents pour se procurer de l’argent.
Chaque jour dans les journaux, nous apprenons les quantités de drogue, plutôt d’héroïne et de «zamal» de La Réunion, interceptés par la police. Pas plus tard que ces dernières semaines, elle a fait un raid fructueux à Karo Kalyptis, connu pour être un centre permanent de vente de jour comme de nuit pour toutes sortes de drogues. Bravo, mais certains nous font savoir que quelques jours, voire quelques heures après, les dealers, grands et petits, ont réinstallé leurs échoppes et repris leur trafic. Les habitants, éberlués, ont vu à nouveau les queues de consommateurs se reformer, piétinant pour se procurer leurs dosesrespectives. Il existe même une carte géographique indiquant les hauts lieux de vente.
Nous savons maintenant que ces gros stocks nous parviennent autant par la mer où de rapides hors-bords peuvent facilement accoster, jeter l’ancre et vendre leur camelote sans que personne ne s’en aperçoive. Nous ne pouvons même pas mettre des policiers la nuit sur toutes ces plages ou alors réinventer «Les Incorruptibles» avec Eliot Ness. Hélas, toutes les saisies et les cargaisons qui échappent à la vigilance n’arrivent pas à faire mettre la main sur les gros caïds ou barons qui se terrent tranquillement sans jamais être connus ou dérangés. C’est tout bénef pour eux, et tel Wagner en Russie et en Ukraine, ils disposent de bons et loyaux petits soldats contre paiements en liquide, bien entendu.
Le cannabis thérapeutique arrive
Il était temps que les autorités importent le cannabis thérapeutique adopté dans presque tous les pays d’Europe de l’Ouest et vingt États américains. L’Inde, la Chine et l’Égypte s’y sont mis depuis longtemps. Un premier lot est attendu à Maurice.
Ce cannabis ne sera disponible que pour certains patients soumis d’abord à un examen par le Medical Cannabis Theurapeutic Committee. On pense à ceux souffrant de sclérose en plaques, d’épilepsie, de lupus et de syndrome du côlon. Le CBD, son appellation exacte, contrairement au THC, qui est la partie toxique de la plante, sera aussi gratuite à la pharmacie de l’hôpital Victoria après avoir soumis le cas pour stricte vérification.
Profitons-en pour faire la distinction entre dépénalisation, c’est-à-dire qu’on n’a pas recours à la prison mais plutôt à la réhabilitation, et à la désintoxication. C’est le Mauritius Research and Innovation Council qui fera autorité en matière médicale. Quant à la décriminalisation, elle veut dire que ce n’est pas considéré comme un crime.
C’est l’Organisation mondiale de la santé qui a modifié la condamnation généralisée du cannabis en faisant la distinction entre CBD et THC. Actuellement, 18 000 000 de Britanniques profitent des effets multiples du CBD. Il possède des propriétés antidouleurs, stimule l’appétit, combat les vomissements et autres nausées, favorise le sommeil, redynamise le patient, lutte contre l’anxiété, les douleurs surtout chroniques, l’épilepsie. Il peut aussi jouer un rôle en oncologie (le cancer) en étant un allié contre les effets secondaires de la chimiothérapie.
Il n’est pas interdit de penser que Maurice, malgré la mauvaise réputation faite au chanvre indien, devrait le cultiver. Répétons qu’une seule de ses composantes provoque un effet psychotrope. Des petits, ou même gros planteurs, pourraient en profiter et trouver là une alternative au détriment de la canne à sucre, avec l’aide d’un laboratoire. Pourvu que le premier, le CBD, tienne toutes ses promesses et qu’il débarque bientôt à Maurice. Beaucoup de patients l’attendent. Ce qu’il faut déplorer, c’est que Maurice soit devenue en quelques années une plaque tournante de la drogue. L’argent (de grosses sommes) ainsi récolté passe entre autres par le blanchiment.
C’est une économie parallèle qui enfle et qui ne connaît pas la crise.
Larzan péna loder.
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