Publicité
Zoom
L’histoire de Maurice racontée… à plein de petits-enfants
Par
Partager cet article
Zoom
L’histoire de Maurice racontée… à plein de petits-enfants
Jean Claude de l’Estrac à Clavis, jeudi, devant des enfants de neuf ans en moyenne, remontant le temps.
«Pour aimer son voisin, il faut le connaître, savoir qui il est vraiment, d’où il vient. Il faut s’intéresser à son histoire.» Apprendre à le connaître dès que l’on est enfant pour éviter les stéréotypes véhiculés par les parents, c’est encore mieux.
Mains levées pour montrer qu’ils connaissaient son livre, pour poser des questions, pour ajouter leur grain de sel, les élèves des trois classes de Year 4 de l’école Clavis, à Moka, ont rencontré Jean Claude de l’Estrac, jeudi. Dans le cadre de leur module de recherche («Unit of Enquiry») transdisciplinaire sur le thème «Where We Are in Place and Time», ils travaillent sur l’héritage culturel, l’évolution de la culture et quelle est leur responsabilité pour le futur en tant que membres d’une communauté multiculturelle. Pour cela, ils se sont, entre autres, appuyés sur la BD de l’ancien rédacteur en chef de l’express, journaliste, historien, L’île Maurice racontée à mes petits-enfants. Elle est illustrée par POV.
Mais il s’agit au départ d’un éditorial de Jean Claude de l’Estrac paru dans l’express le 7 mars 1999, peu après les émeutes. D’abord illustré par Eric Koo Sin Lin, sous le titre L’histoire racontée à mon petit-fils. D’autres petits-enfants se sont rajoutés depuis… La seule différence entre la BD et l’éditorial, outre le titre : la référence à la chanson de Hugues Auffay, «La couleur ne fait pas l’homme», qui a disparu.
Vingt-quatre ans ans plus tard, ces élèves de neuf ans en moyenne connaissent Kaya, savent qu’il était chanteur et qu’il est mort en prison. Ils n’ont cependant pas connu les violences qui s’en sont suivies et ne portent pas ce souvenir dans leur chair et leur âme, comme un coup de canif dans le dos de l’étendard arc-en-ciel. Mais… il y a toujours une main prête à ramasser ce couteau. Celle animée par la peur ou la haine de l’Autre. Engendrées par sa méconnaissance et une lecture parcellaire de l’histoire.
Les enfants finissaient les phrases de Jean Claude de l’Estrac qui racontait son livre, savaient qu’il y avait des esclaves venus du Mozambique, des engagés, venus d’Inde… le Bihar a été un peu plus difficile à trouver. Que les ébéniers avaient attiré les Hollandais. Connaissaient les vagues successives de peuples qui sont venus. Ont un peu tiqué sur le fait que les Britanniques avaient redonné le nom hollandais à Mauritius. N’imaginaient pas tout de suite que l’on parlait d’autres langues que l’anglais, le français et le créole. Jean Claude de l’Estrac leur a rappelé que les conditions étaient très dures, que les premiers Français étaient très pauvres… que c’est par le travail que chaque composante de la société a pu faire de Maurice ce qu’elle est. «Vous êtes là parce que tellement de gens de tellement d’endroits y ont contribué.» Mais pour en prendre conscience, pour que ces «enfants de l’Indépendance construisent la nouvelle île Maurice, il faut lire» (y compris les journaux, et là, peu d’enfants ont levé la main à la question de savoir si leurs parents achetaient le journal…). Maintenant, il y a «une grande tribu mauricienne», insiste Jean Claude de l’Estrac, qui, auparavant, rappelait que de nombreuses tribus à Madagascar se faisaient la guerre et vendaient leurs prisonniers aux Blancs. Personne n’est ni tout noir, ni tout blanc… Le tout maintenant pour ces enfants, c’est de faire le lien avec le présent… et le futur.
Car cette tribu mauricienne n’est pas figée, elle va continuer à évoluer. D’autres «Autres», des immigrés viennent travailler, finiront par s’installer, devenir citoyens. Et le présent deviendra histoire.
Publicité
Les plus récents