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Manière de voir
L’homme contre la femme ou… tout contre ?
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Manière de voir
L’homme contre la femme ou… tout contre ?
Nous vivons dans une société patriarcale. Durant ces dernières années, la lutte des femmes pour la parité a connu des progrès mais il est deux domaines où notre pays stagne : la violence conjugale sur les femmes (83 %) et la femme en politique. Des progrès ont été accomplis. La femme est un atout majeur dans le tertiaire : zone franche, téléphonie, fonctionnaires, enseignement, santé publique… Beaucoup sont journalistes ou avocates. Leur nombre (638 000) dépasse celui des hommes et les résultats indiquent qu’elles sont supérieures au niveau académique.
Elles ont accès à des métiers inattendus : receveur ou chauffeur dans les moyens de transport, pompier, policière... 38 % occupent des positions élevées dans le service public et 10 % dans les entreprises. Elles se marient plus tard et font moins d’enfants. Certaines divorcées et célibataires vivent même seules. Mais la femme n’a pas encore la parité salariale avec l’homme. Sur le plan social, elles sont largement majoritaires dans les ONG. Hélas dans nos mentalités, elle est surtout multitâches : mère, femme de ménage, cuisinière… Certains hommes daignent changer les couches de bébé ou cuisinent. Deux ombres au tableau perdurent.
Violence conjugale
À force d’être battue, elle lui enfonce un couteau dans le cou, le mari frappe, ébouillante, lui fracasse le crâne, distribue des coups de marteau, poignarde au cœur… Une femme sur quatre meurt à la suite de ces coups violents. Cela se passe souvent au niveau des couples les plus vulnérables sur le plan social et les moins éduqués. Les hautes couches n’y échappent pas (voyez les lunettes à verres fumés) mais ça ne s’ébruite pas dans la bonne société. Nous connaissons la source principale de cette violence conjugale parfois administrée devant les enfants. C’est l’alcool. À croire que ces bourreaux alcoolisés frappent en raison d’une impuissance. Quelques éducateurs font de leur mieux, des abris ont été conçus pour recueillir ces malheureuses victimes.
Mais nous abordons peut-être le problème par le mauvais bout, quand le mal est fait. Il faudrait mener sur le terrain de vraies campagnes contre l’alcool, former des groupes de soutien ou des escouades d’assistantes sociales à disséminer dans les quartiers défavorisés. Manque de formation basique et d’éducation. Des mesures positives sont mises en œuvre comme la hotline 139, Action familiale, Gender Links, SOS Femmes, l’application Espwar, mais Chrysalide a fermé ses portes faute de personnel. Des conseils sont prodigués avant le mariage. Absence remarquée des hommes au sein de ces organismes mais ça bouge…
La femme en politique
Quelles sont les racines de cette discrimination envers les femmes qui voudraient se lancer en politique. Une émancipation qui se fait attendre. Parions d’avance qu’aux prochaines élections générales, il n’y aura même pas 30 % de candidates féminines. Pourquoi pas une par circonscription ? À quoi ça sert les fameuses ailes féminines dans les partis ? Ça fait penser à ces quatre ou cinq ministres femmes. L’une d’elles est ministre de la Femme parce qu’elle est une femme. Elle ne sera jamais ministre des Finances parce qu’elle est une femme. Chasse gardée par les mecs, tous partis confondus. Dès la naissance, elle occupe le deuxième rang : «Garson prémié lo, tifi déziem lo.» À elle, la poupée et les tâches ménagères.
Les obstacles à franchir sont innombrables mais motus dans notre société machiste. Faudra d’abord la permission du mari car son patronyme va être étalé, son passé étudié à la loupe, les enfants seront casés chez les grands-parents, elle devra toujours être accompagnée par deux gardes du corps, deux colosses qu’il faudra nourrir et payer, pas de question déplacée sur le financement, elle devra être initiée à la ligne du parti et jurer obéissance au grand manitou qu’est le leader du parti, elle devra surveiller comment elle s’habille pendant la campagne ou se maquille (pas de «poupet doukia»), elle va devoir prendre la parole en public dans les meetings de quartier ou lors des réunions de nuit chez des électeurs, pas de signe de richesse ostentatoire, mettre la main dans le cambouis, assister systématiquement aux baptêmes, mariages, fêtes religieuses, bals (aprann dansé?), avaler et recracher le programme électoral du parti, analyser la liste des électeurs (communauté, rue, profession…)… Pas une sinécure.
Si elle est élue et devient une backbencher, pas question de louper les séances de nuit au parlement. Certains électeurs de sa circonscription vont certainement tôt le matin assiéger sa maison pour obtenir quelque faveur. Changer de voiture au profit d’une seconde main (kraz-krazé). Financera-t-elle sa campagne toute seule ou le parti va y pourvoir ? Qui s’occupera de sa com (réseaux sociaux, presse, affiches, slogans...) ; elle devra bien étudier toute intervention, même brève, à la télé ou à des débats, si elle obtient le feu vert du leader bien-aimé.
Si elle accepte tout ce cirque local, le tout au détriment de sa vie de couple ou de mère, le jeu en vaudra-t-il vraiment la chandelle ? Si elle a le cuir bien tanné, elle pourra alors brûler la bougie par les deux bouts. Servir le pays oui, mais... asservir ? À moins d’accepter ce rôle ombrageux d’être la femme qu’il y a toujours derrière... enn lérwa péto.
Met lamé dan nik mous zonn!
Le cyclone rachel
Au Caudan Arts Centre, fin février, a soufflé sur toute la salle un vent de modernité inattendue, voire de vérité historique crue, grâce à la pièce La folle et inconvenante histoire des femmes* de l’antiquité à nos jours. Ton volontairement provocateur de l’auteure Laura Léonie, servi par une interprétation impressionnante de Rachel de Spéville. Elle personnifie à la fois la narratrice et la comédienne lesbienne. Tantôt ingénue, tantôt désarmante. Seule en scène pendant 90 minutes, elle déploie toutes ses qualités de comédienne de théâtre habitée par son personnage. Elle vilipende l’histoire de la femme ponctuée de quelques traits d’humour dans ce drame. Flèches acérées, fleurets mouchetés bousculent les spectateurs le plus souvent enthousiastes. Mais ils sont à 80 % des femmes. Où sont les hommes ? Dans la salle seulement une élite certes, mais personne du ministère de la Culture ? Deux planètes qui s’ignorent ? Dommage !
*Reprise le 20 mars au Caudan Arts Centre
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