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Questions à... Vasenden Dorasami
«L’IA générative va soutenir plutôt que remplacer les ressources humaines»
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Questions à... Vasenden Dorasami
«L’IA générative va soutenir plutôt que remplacer les ressources humaines»
Vasenden Dorasami, Managing Director de Doracrea
Avec sa capacité d’une rapidité et d’une efficacité sans précédent à fournir des résultats avec un minimum de direction humaine, l’IA générative a rapidement gagné en importance chez les dirigeants d’entreprises et dans les gouvernements. Vasenden Dorasami, organisateur de la conférence Innovationmauritius.com, qui se tient aujourd’hui et demain au Caudan Arts Centre, voit en elle un atout majeur pour l’innovation à Maurice.
Au cours des dernières années, l’IA a connu de grandes avancées, devenant un outil essentiel à l’échelle mondiale. Les systèmes d’IA/IA générative excellent dans des tâches telles que la reconnaissance d’images, le traitement du langage naturel, la prise de décision, entre autres. De quel œil voyez-vous le positionnement de l’IA et notamment à Maurice ?
L’irruption de ChatGPT et Dall-E chez Open AI ou de BARD et bientôt MUM chez Google montre que notre humanité maîtrise des intelligences artificielles actives, c’est-à-dire capables, sur la base de codes informatiques, de générer des contenus nouveaux et de produire des choses tangibles.Cette capacité à créer ouvre de nouveaux horizons et modifie en profondeur les services numériques et, plus largement, nos sociétés.
Les recherches précédentes montrent que, même si tous les secteurs sont susceptibles de connaître un certain degré de perturbation, notamment grâce à cette évolution, le niveau d’impact est susceptible de varier de secteur à secteur. En effet, les secteurs qui dépendent le plus du travail du savoir sont susceptibles de connaître davantage de perturbations et potentiellement de récolter davantage de valeur. Les industries basées sur la connaissance telles que les services financiers, les produits pharmaceutiques et les produits médicaux, l’éducation et certainement les services du gouvernement pourraient tant bénéficier des effets significatifs. En revanche, les industries manufacturières pourraient, elles, subir des effets moins perturbateurs. Un contraste significatif avec l’impact des vagues technologiques précédentes qui ont le plus affecté le secteur en question. Cela est dû aux atouts de la génération IA dans les activités basées sur le langage, par opposition à celles nécessitant du travail physique.
Créations de contenu, suivi marketing, procédures de ressources humaines, voire juridiques, création d’images, créer du code informatique, les options sont multiples dans la plupart des entreprises pour utiliser l’IA générative. À ce jour, nous voyons même l’industrie pharmaceutique exploiter cette méthode pour fabriquer des médicaments pour diverses utilisations en quelques mois seulement. Réduisant ainsi considérablement les coûts et les délais de développement des médicaments.
À Maurice, l’adoption et l’intégration de l’IA générative paraissent aujourd’hui encore moins intéressantes. Son intégration dans l’économie mauricienne dépendra premièrement de l’adoption de la transformation numérique, élément catalyseur de cette évolution plus avancée qui se doit d’être centrée sur l’humain, et à long terme s’étendre vers le secteur public.
D’ailleurs, le gouvernement a ce jour créé le Mauritius Emerging Technologies Council ou même le Mauritius AI Council pour mieux s’orienter et examiner spécifiquement l’adoption et l’impact des technologies émergentes. Toutefois, même si l’intention est fort louable, nous ne voyons toujours pas de résultats concrets. L’une des initiatives aurait pu être un partenariat public-privé (PPP) efficace et fonctionnel. Pour la prochaine conférence d’Innovationmauritius.com, seul le Data Protection Office participe avec la Data Protection Commissionner comme intervenante. On aurait souhaité une participation plus active, voire un engagement des institutions telles que le MRIC.
Justement, en partenariat avec des acteurs majeurs tels que MCB Consulting et l’Institut de Finance MCB, la 5e édition de la conférence Innovationmauritius. com débute aujourd’hui. Dites-nous en plus sur les sujets qui seront abordés lors de la conférence et ce que vous attendez de cette collaboration ?
Notre cinquième de la série, organisée en collaboration avec DoraCrea, MCB Consulting et MCB Institute of Finance, présentera les derniers développements en matière de perturbation de l’IA générative. Nous sommes tout au début d’un parcours visant à comprendre le potentiel économique de la puissance, de la portée et des capacités de l’IA générative. Nous avons besoin de clarté sur l’utilisation de ces outils et de veiller à ce qu’ils soient aussi inclusifs que possible, que ce soit pour le public, les entreprises et le gouvernement qui souhaite l’adopter. Cette conférence fera converger les discussions sur quatre principaux thèmes: l’innovation commerciale, la centralité humaine, la durabilité des entreprises, et l’éthique et la gouvernance pour mieux comprendre le caractère inclusif de l’IA générative.
Même si les opportunités et les cas d’utilisation potentiels de l’IA générative continuent d’être dévoilés à mesure que la technologie évolue et crée de nouvelles opportunités pour améliorer la vie des personnes partout dans le monde, il présente également des risques dont les organisations doivent être conscientes. Il est généralement considéré comme un obstacle à l’inclusion et son développement phénoménal soulève également de nouvelles questions sur la meilleure façon d’intégrer l’équité, l’interprétabilité, la confidentialité et la sécurité dans ces systèmes.
InnovationMauritius.com est donc une conférence de dimension internationale avec des experts dans le domaine, incluant des innovateurs de l’industrie, des universitaires, d’éminents leaders d’opinion, des experts en AI, en données et en design pour partager leurs connaissances et visions afin de mieux comprendre l’écosystème approprié pour développer le modèle mauricien.
Pour la première fois cette année, afin de permettre aux étudiants universitaires d’y accéder, la conférence s’entendra sur deux jours, les 12 et 13 octobre, avec l’appui de nos partenaires et des sponsors locaux. De plus, on mise sur un rapport du groupe de travail multisectoriel «Intelligence artificielle». Les délibérations des deux journées seront documentées sous la forme d’un livre blanc qui sera soumis aux autorités compétentes pour référence.
Pourquoi intégrer les jeunes universitaires dans la conférence de cette année ?
On parle aujourd’hui beaucoup de la fuite des cerveaux à Maurice, que ce soit dans les médias et autres. Pour remédier à cette problématique, il suffit, à mon sens, de les soutenir dans leur avancée. Ayant pour thème principal la «durabilité», nous ne pouvons pas ignorer leur participation. Et donc leur donner l’opportunité d’assister et de participer à cet élan de culture IA; ce n’est qu’un début!
Nous avons décidé de lancer des défis nationaux liés à l’IA générative pour avoir une meilleure implication et participation des étudiants universitaires. Ils devront utiliser l’IA générative avec une approche de Design Thinking centrée sur l’humain et l’innovation pour repositionner Maurice comme une destination touristique premium et durable, adopter le système scolaire en ligne pour plus d’inclusion à Maurice, améliorer la sécurité routière et réduire les embouteillages à Maurice, et développer l’agro-industrie et assurer la sécurité alimentaire à Maurice. Nous souhaitons que ces défis deviennent pour les universitaires, une compétition annuelle permettant à ces étudiants de concourir à un très haut niveau.
Aujourd’hui, lorsque l’on évoque l’IA ainsi que l’IA générative, une crainte liée au remplacement des ressources humaines refait souvent surface. Partagez-vous cette préoccupation ?
Il est indéniable que les inquiétudes liées à l’automatisation persistent depuis longtemps en ce qui concerne l’avenir de l’emploi. Mais l’IA générative est désormais la dernière technologie à susciter à la fois la peur et l’optimisme. À mon avis, et en me basant sur des faits, j’estime que l’IA générative pourrait soutenir plutôt que remplacer les ressources humaines.
L’IA va certainement contribuer à la création d’emplois à l’avenir. Cependant, on pourrait faire valoir que cette augmentation de l’emploi pour certains pourrait signifier la suppression d’emplois pour d’autres. Par exemple, si le travail d’un employé est rendu dix fois plus facile grâce à l’IA, les emplois créés pour soutenir cette fonction pourraient devenir obsolètes. Dans un avenir très proche, l’IA générative pourrait venir en complément et rationaliser la gestion des ressources humaines et de la performance.
L’éthique est une autre préoccupation cruciale dans le domaine, couvrant des enjeux comme la transparence des algorithmes, la préservation de la vie privée, et la lutte contre les biais, etc. Comment envisagez-vous son intégration dans le développement futur de l’IA générative ?
L’IA générative nécessite une certaine expertise technique, et dépend largement de la qualité des données utilisées pour son apprentissage. Si les données sont biaisées ou inexactes, les résultats produits par l’IA peuvent l’être aussi. Il est donc crucial de disposer de données de haute qualité et représentatives. Quid des réglementations, les lois concernant l’utilisation de l’IA sont encore en cours d’élaboration dans de nombreux pays. Son avenir se doit de passer par une régulation forte et ambitieuse.
En fonction de l’utilisation et de la mise en œuvre de modèles d’IA génératives, les activités pourraient exposer toute organisation à des risques potentiels. L’IA générative s’appuie sur des entrées de données ou des paramètres pour apprendre et développer constamment des connaissances.
Cependant, ces données pourraient également ingérer des propriétés intellectuelles confidentielles qui pourraient être utilisées pour répondre aux demandes d’un autre utilisateur en dehors de l’organisation, courant par inadvertance le risque d’exposer des données sensibles, personnelles et confidentielles au public. Cette violation détériorera la confiance entre les clients et les parties prenantes au sens large et pourrait avoir un impact négatif sur les résultats de l’organisation.
De plus, l’IA générative a révélé un niveau inquiétant de désinformation qui contourne potentiellement les réglementations éthiques et de conformité. Grâce à la saisie de données, l’IA générative pourrait être formée sur des données biaisées et un lignage de données introuvable, ce qui perpétuerait alors les stéréotypes et les résultats inattendus. Ainsi, sans surveillance humaine pour évaluer les résultats et aider à contrôler les préjugés, cela peut nuire à la législation et à la réputation d’une organisation.
Par ailleurs, l’utilisation d’outils d’IA générative a également des implications en termes de talents. Les professionnels doivent être conscients qu’ils n’utilisent pas seulement la solution mais qu’ils contribuent également à l’évolution d’autoapprentissage de cette technologie. L’IA générative peut changer la donne pour les organisations, mais l’intervention humaine sera toujours nécessaire pour obtenir des informations uniques que l’IA générative ne peut à elle seule reproduire.
L’IA générative mérite d’être explorée tout en imposant des directives d’utilisation sûre, notamment au sein des organisations pour garantir l’utilisation appropriée et efficace des applications, et susciter la confiance tant chez les clients que les collaborateurs. De même, il ressort que les nouvelles technologies innovantes ne doivent pas se faire dans un vide juridique, mais doivent au contraire respecter le droit existant dans son intégralité. Ainsi, un cadre juridique adapté devient tout aussi important que tout autre cadre à considérer en ce sens. Notre conférence abordera d’ailleurs en détail ces questions, notamment l’utilisation de données médicales à des fins de recherche, avec des intervenants tels que la Data Protection Commissioner et des experts internationaux.
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