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Oeuvres complètes
Marcel Cabon, mémoires d’outre tomes
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Oeuvres complètes
Marcel Cabon, mémoires d’outre tomes
Robert Furlong et Corinne Fleury ont lancé les œuvres complètes de Marcel Cabon le 15 octobre 2023, au Festival du livre de Trou-d’Eau-Douce.
Les œuvres complètes de Marcel Cabon en quatre volumes c’est une aventure éditoriale de l’Atelier des nomades avec le concours du chercheur Robert Furlong. L’éditrice Corinne Fleury raconte ce défi qui a mis plus longtemps que prévu à se concrétiser.
Un lancement en bord de mer. C’est ce que s’étaient offert les œuvres complètes de Marcel Cabon, le 15 octobre 2023. L’éditrice Corinne Fleury, de l’Atelier des nomades, et le chercheur Robert Furlong nous avaient mis en appétit au Festival du livre de Trou-d’Eau-Douce, l’année dernière. En attendant la sortie effective des volumes.
C’est chose faite pour les deux premiers tomes depuis le début du mois. Le premier volume est consacré à la poésie et aux écrits de Marcel Cabon sur la littérature en général. Le deuxième tome comprend environ 70 contes. Portes ouvertes sur une œuvre qui «n’a pas de secrets», affirme Corinne Fleury. Des écrits en abondance sans être «inaccessibles ou réservés à un certain public».
Pas de lecture chronologique
Question souvent posée à l’éditrice : il vaut mieux commencer par quel tome? Corinne Fleury reprend les propos de Marcel Cabon : «Il dit que ses premiers maîtres ont été les arbres, les champs et la route poussiéreuse sous les tamariniers. Son œuvre est caractérisée par la simplicité. Il n’y a pas de clé réelle si ce n’est de rentrer dans l’œuvre avec humilité.» Elle explique que les œuvres ont été regroupées par genre. «Si on l’avait fait en ordre chronologique cela aurait obligé le lecteur à acheter tous les tomes.»
À la rencontre des plus humbles
Piste pour naviguer dans l’œuvre : «picorer. Comme Marcel Cabon a lui-même picoré. C’était un gourmand d’écriture mais il a picoré les instants simples et humbles des gens qui l’entouraient.» Marcel Cabon a longtemps vécu à Petite-Rivière, «qu’il appelait Brunepaille». Dans ses œuvres, il est souvent question de ruralité. «Toute son œuvre est imprégnée de la vie simple des campagnes. Marcel Cabon donne à lire une époque.»
Corinne Fleury confie ne pas être une grande lectrice de poésie. «Mais j’ai énormément apprécié sa poésie. Tout me parlait: les jacquiers, l’aloès, le manguier, le vétiver.» Ses personnages sont ceux de la vie ordinaire: le boulanger, le prêtre, des ivrognes. «Auréoler ce grand écrivain mauricien est tout à fait justifié dans le sens où l’on sent son goût prononcé pour la langue française. On n’a pas besoin d’avoir un mastère en lettres, d’être un chercheur universitaire, ni même d’être un grand lecteur pour rentrer dans l’œuvre de Cabon. Je n’en dirais pas autant de l’œuvre de Malcolm de Chazal, par exemple.»
Réponse à un cri d’indignation
Le projet d’édition des œuvres complètes de Marcel Cabon est né «d’un cri du journaliste Yvan Martial». En 2022, à l’occasion des 50 ans de la mort de l’auteur, Yvan Martial et Robert Furlong, du Centre culturel d’expression française (CCEF), déposent une gerbe sur la tombe de l’écrivain. «Yvan Martial pousse alors un cri d’indignation sur la page Facebook du CCEF, en déplorant l’indifférence totale de la nation pour Marcel Cabon. Il n’y avait pas de commémoration, absolument rien.»
L’éditrice est «secouée» par ce cri. «Je ne m’étais pas rendu compte que c’est l’une de ces présences littéraires qu’on avait un peu oubliée.» En replongeant dans la biographie de l’écrivain et journaliste, elle se rend compte qu’elle «ne connaît pas des pans entiers de l’œuvre de Cabon. Je n’avais jamais lu aucune de ses nouvelles. De ses poèmes, je ne connaissais que Kelibé-Keliba».
Parution différée
Ce projet «monstrueux» démarre par les recherches de Robert Furlong à la Bibliothèque nationale. Le parti pris éditorial a été de retourner vers les sources premières. De «désarchiver ce qui avait été publié dans les journaux et revues». L’une des particularités de Marcel Cabon, «c’est qu’il a été très peu publié sous forme de livre».
Le journaliste Marcel Cabon a collaboré au Cernéen, à Advance, au Mauricien. Il a soutenu des revues littéraires comme Le Temps perdu, Vergers, Maurice magazine. Marcel Cabon y a publié ses nouvelles et contes sous forme de feuilletons. «Dans les œuvres complètes, nous les avons restitués de cette manière.»
Les recherches à la Bibliothèque nationale ce sont des pages photocopiées ou photographiées qu’il faut retranscrire. Parmi les contraintes éditoriales: les journaux d’époque qui n’étaient pas toujours en bon état. «Parfois on en était à la loupe.» Un processus long et fastidieux, pour chaque tome qui fait entre 300 à 400 pages. Ajouté à cela le «souci d’harmonisation» de l’éditrice. Par exemple, pour un nom de personnage orthographié de deux manières différentes. Ou pour des mots en kreol, parfois en italiques d’autres fois non. «J’ai fait le choix de conserver la graphie de Marcel Cabon. Nous n’avons pas modifié son kreol sinon ce serait intervenir dans l’Histoire. Ce serait anachronique.»
Le premier roman
Le tome 3 sera consacré aux romans. À commencer par La Séraphine, le premier roman de Cabon «qui n’est jamais arrivé à Maurice. Il a été publié dans le Tana Journal auquel il a collaboré en tant que maquettiste». Mais Marcel Cabon est «chassé du jour au lendemain de Madagascar dans les années 1940, cette ressource est restée dans la Grande île».
La veine politique
Le tome 4 compile les biographies de sir Seewoosagur Ramgoolam, Laurent Rivet, Edgar Millien signées Cabon. Le volet politique de son œuvre a fait l’objet de discussions. «En tant qu’éditeur littéraire, nous étions au départ sceptiques, mais nous avons trouvé que Marcel Cabon est davantage un poète-historien qu’un historien réel. Il ne brosse pas un personnage juste pour dire de voter pour lui.»
Corinne Fleury confie avoir abordé ces biographies «avec des pincettes, mais je me suis régalée. Cabon a écrit ces biographies comme il a écrit ses contes et ses nouvelles. On a l’impression d’être non pas dans l’Histoire, mais dans l’histoire fictionnelle. Il ne sait pas faire autrement que d’être proche de la langue, d’utiliser de la poésie et d’être dans le détail». Les tomes 3 et 4 sont en cours de finalisation.
* Les deux premiers tomes sont à Rs 490 chacun.
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