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Atchoum
Médicaments antirhume jugés trop dangereux et pas si utiles
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Médicaments antirhume jugés trop dangereux et pas si utiles
Considérés comme dangereux depuis des années à cause d’effets secondaires rares mais graves, ces traitements sont dans le viseur des autorités sanitaires françaises. Elles avaient sonné l’alerte l’année dernière, mais ces comprimés sont toujours accessibles sans prescription dans les officines.
Dolirhume, Humex, Rhinadvil, Actifed, Nurofen Rhume… Les boîtes fleurissent à nouveau dans les étals des pharmacies alors que l’hiver approche à grands pas, et avec lui les traditionnels éternuments, nez bouchés et sensation de fatigue. Pas très agréable, et donc tentant d’acheter des comprimés censés décongestionner le nez – dans le jargon, on parle de «vasoconstricteurs». Et puis ils ne nécessitent pas de prescription, donc sont facilement accessibles. Pourtant, les autorités sanitaires ont sonné l’alerte l’année dernière : en cas de rhume, mieux vaut éviter ces médicaments au vu de leurs effets secondaires graves, comme des infarctus ou AVC. Elles confirment aujourd’hui qu’elles envisagent de mettre fin à cette situation paradoxale.
«La délivrance de ces médicaments sans prescription médicale n’apparaît plus adaptée», a estimé le 21 novembre l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) dans un mail envoyé à l’AFP. Surtout, elle dit envisager le «listage» de ces traitements à base de pseudoéphédrine. Si elle est prise, cette mesure prendrait effet immédiatement et aboutirait à ce qu’ils ne soient plus disponibles en vente libre en pharmacie.
Car il s’agit là d’un paradoxe : malgré les alertes des autorités sanitaires et les critiques qui émanent de spécialistes depuis de nombreuses années, ces comprimés sont facilement accessibles – et l’absence d’ordonnance requise peut aussi tromper sur leur dangerosité. Car si le risque est «faible», ces traitements peuvent provoquer de graves effets secondaires : infarctus, AVC, réactions cutanées graves, convulsions… «Tous ces effets indésirables sont susceptibles d’apparaître chez des patients sans facteur de risque ni antécédent médical, quelles que soient la dose et la durée du traitement», insistait encore le gendarme du médicament en avril dans un courrier envoyé aux pharmaciens, médecins généralistes et autres spécialistes. D’autant que «le rhume guérit spontanément en sept à dix jours sans médicaments»
La mesure envisagée par l’agence du médicament – relayée ces dernières semaines par des titres spécialisés comme le Quotidien du pharmacien – apparaît comme le dernier épisode d’un long feuilleton qui l’a vu peu à peu durcir ses positions face à cette famille de traitements. Son alerte de 2023 – la première fois qu’elle ciblait explicitement ces comprimés – avait contribué à faire décliner leurs ventes. Mais celles-ci rebondissent depuis septembre et l’arrivée de la saison hivernale devrait encore les booster.
Désaccord avec l’agence européenne du médicament
Toujours est-il que l’ANSM ne peut pas les interdire pour le moment. Les autorités sanitaires françaises reconnaissent être bloquées par la réglementation de l’UE : tout retrait d’une autorisation de distribution d’un médicament doit passer par l’EMA, son équivalent européen. Or cette dernière a estimé l’an dernier que les traitements antirhume concernés ne présentaient pas de risques suffisants pour les interdire – elle a tout de même imposé de nouvelles contre-indications. Elle justifie cet avis par la rareté des effets secondaires : seulement quelques-uns sont signalés chaque année. En France, aucune mort n’a été recensée à ce stade. Les autorités françaises, elles, préféreraient appliquer un principe de précaution, d’autant qu’il s’agit d’une maladie bénigne. «Un trop grand nombre de patients reste ainsi exposé à des risques graves au regard des bénéfices modestes de ces médicaments», juge l’ANSM.
Cette position est celle des principales sociétés savantes françaises – ORL, médecins généralistes, pharmaciens – qui s’opposent toutes à l’usage de ces médicaments. Elle risque en revanche de froisser dans les officines : de nombreux représentants de pharmaciens estiment que cette restriction réduirait injustement l’éventail de médicaments à proposer à leurs clients enrhumés, qui ont déjà du mal à obtenir un rendez-vous chez leur médecin et se tourne de plus en plus vers leur pharmacien quand ils souffrent de petites pathologies. «Ça va devenir compliqué pour nous de répondre aux problèmes des patients, les gens n’auront plus de médecin et nous, on ne pourra plus rien conseiller», estime, dans le Quotidien du pharmacien, Béatrice Clairaz-Mahiou, coprésidente de la Société francophone des sciences pharmaceutiques officinales.
D’autres observateurs en revanche attendent cette décision. Car, pour eux, les autorités sanitaires ont été bien trop longues à réagir.
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