Publicité
Cinéma
Ni chaînes ni maîtres un tournage «intense»
Par
Partager cet article
Cinéma
Ni chaînes ni maîtres un tournage «intense»
Sortie en salles en France de «Ni chaînes ni maîtres» le 18 septembre. L’intrigue se déroule en 1759 à l’Isle de France. Le tournage a eu lieu à Maurice en mai 2023. L’actrice Camille Cottin y incarne un personnage historique ayant réellement existé, Madame La Victoire, redoutable chasseuse d’esclaves marrons. Des Mauriciens ayant collaboré au tournage partagent leur expérience.
Niven Pareemanen, producteur exécutif: «Entre 100 à 125 mauriciens ont été engagés»
Producteur exécutif pour Ni chaînes ni maîtres sous le label Nine Pictures, le rôle de Niven Pareemanen était de gérer le budget à dépenser localement. Il était entouré de Bénédicte Banessy, Art coordinator, «qui a mis en place l’équipe mauricienne».
Pendant la phase de préparatifs qui a duré environ un mois et demi, suivie des deux mois de tournage, c’est «entre 100 et 125 Mauriciens», qui ont été engagés. Mais plus largement, Niven Pareemanen estime que ce film a fait travailler «plus de 500 personnes, si l’on compte les extras, l’équipe de sécurité, les agents de police, les douanes. On touche énormément de gens, même si pour certains ce n’était que pour un jour. Leur nom n’est pas au générique, sinon le générique serait plus long que le film», ironise-t-il.
Il affirme que Ni chaînes ni maîtres a été «le tournage le plus compliqué que nous ayons eu jusqu’ici». La faute aux intempéries qui ont coïncidé avec les mois de tournage. «Cela a rendu les choses plus difficiles, plus intenses. Après, cela a aussi montré la force d’une équipe de tournage, que ce soit la partie française ou mauricienne. Ce tournage a véritablement été une aventure. Nous avions tous les pieds dans la boue. On se regardait comme si on était à la guerre, dans des tranchées.» Ce qui permet au producteur exécutif d’avoir du recul, c’est qu’il était «déjà là à l’époque de Serenity» (NdlR: film américain tourné à Maurice en 2017). Il a «enchaîné» avec les tournages des saisons de la série allemande Island doctor et la série sud-africaine Agent. Il a aussi été production manager de Biye retour de François Wiehe et Vivek Beergunnot. Il a également travaillé sur The Blue Penny de Jon Rabaud.
Durement touché par la pandémie, ce secteur a-t-il retrouvé son effervescence d’avant Covid-19 ? «La grande majorité des techniciens n’ont travaillé que sur un film cette année et n’ont quasiment rien de prévu jusqu’à fin 2024. Il y a plein de petites choses, des documentaires, des courts métrages, malheureusement pas de films.» En excluant les équipes de tournage indiennes, ce qui n’est pas le secteur d’activité de Niven Pareemanen.
Il rappelle que ce secteur «vit grâce au Film Rebate Scheme. C’est le principal intérêt. Tout le monde dit que nous avons un pays magnifique mais sans le rebate, ce n’est pas intéressant pour les équipes de se déplacer, c’est un enjeu financier». Depuis que le taux de remboursement des dépenses de tournage effectuées à Maurice «est ouvert, dépendant du budget du film, c’est plus attrayant». Le producteur exécutif constate que le rebate scheme local gagnerait à être mieux connu. «Avec un rebate à 40 %, on peut rivaliser avec d’autres destinations. Si on arrive à faire au moins un film mauricien de qualité par an, qui est vendu et vu à l’international, cela va créer un cœur de cinéma mauricien et générer une industrie qui ne sera plus dépendante du rebate scheme.»
Emilien Jubeau, designer et artiste: matérialiser les croquis du chef décorateur
Le chef décorateur de Ni chaînes ni maîtres, David Bersanetti, a pu compter sur des énergies locales telles qu’Emilien Jubeau. Le producteur exécutif Niven Pareemanen explique qu’Emilien Jubeau a été mis à contribution pour«la construction de deux villages, l’un composé d’ajoupas, l’autre de cabanes en bois». Pour sa part, Emilien Jubeau précise : «Je n’ai pas fait les décors.» Sa mission était de donner vie aux croquis du chef décorateur en utilisant des matériaux locaux. Un travail qui s’est fait avant le début du tournage.
Sunil Bhagwant, artisan menuisier: «j’aime trouver des solutions»
Passez-lui commande de 25 lits ou de 50 armoires et voilà Sunil Bhagwant, artisan menuisier, qui dit que la répétition l’ennuie. «Je préfère ce qui est créatif, ce qui est nouveau, bann zafer kot ou bizin fatig ou latet.» Comment fonctionne son esprit ? «Ou montre mwa enn zafer mo pou trouv solision pou li.» Pour les besoins du montage des décors de Ni chaînes ni maîtres, il a passé «enn mwa dan karo kann», sur les terres d’Omnicane. Sunil Bhagwant faisait partie de l’équipe d’Emilien Jubeau pour la construction des décors en extérieur. «Cela fait au moins 15 ans que je travaille avec lui», confie l’artisan.
Sous la direction du chef décorateur David Bersanetti, l’équipe a installé une croix assortie de deux cloches, un puits, un moulin en briques «kot kwi disik». Point essentiel, donner à ces éléments la patine du temps, «fer li paret vie», indique Sunil Bhagwant. La technique : badigeonner les éléments de décor de terre rouge mélangée à du ciment, explique l’artisan. Il insiste, «nou finn servi zis vie dibwa», achetés de chantiers de démolition. Souci du détail : même les vieux clous ont été réutilisés. «Fode pa kitsoz paret nef ladan.» L’équipe a aussi choisi des «ros kouler parski li paret vie».
À bientôt 59 ans, il se souvient être rentré dans le monde créatif avec le festival Porlwi by light. Il venait de se mettre à son compte. En 2021, quand Emilien Jubeau, après une résidence artistique à l’Institut Français de Maurice, est chargé de repenser cet espace, Sunil Bhagwant fait partie des artisans qui collaborent au projet. Il affirme avoir aussi mis la main à la pâte pour les décors pendant le tournage de The Archies, une série avec «Shah Rukh Khan so tifi». C’était fin 2022.
Il a dit
«Lorsque j’ai décidé de faire un film sur les esclaves fugitifs, j’ai découvert l’histoire de la traite à Maurice, ainsi que les mythes autour du Morne Brabant. Quand on est scénariste, le premier réflexe, c’est d’aller sur place et de rencontrer ceux qui savent. J’ai travaillé avec Vijaya Teelock, qui m’a orienté vers l’œuvre d’Amédée Nagapen (…) À Paris, j’ai nourri mes recherches et mon scénario grâce à la collaboration d’historiens sénégalais et français.» Simon Moutaïrou, réalisateur de «Ni chaînes ni maîtres», dans une interview accordée à «l’express», parue le 21 mai 2023.
Publicité
Les plus récents