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Transition vers un marché plus sophistiqué

Pari gagnant pour l’artisanat rodriguais

30 août 2024, 22:00

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Pari gagnant pour l’artisanat rodriguais

Le développement fulgurant que Rodrigues a connu ces derniers temps n’a pas laissé sur la touche ses artisans, qui offrent des produits capables de s’imposer sur des marchés sophistiqués en anticipant les demandes des consommateurs.

Fini le temps où l’artisanat rodriguais se limitait aux paniers fabriqués à base de fibres du vacoa. Avec sa capacité à se diversifier dans d’autres produits et anticiper les besoins de la clientèle, il aura amplement gagné son pari. Ce secteur presque entièrement féminin l’a démontré lors de la tournée d’une délégation de 80 personnes du 19 au 25 août avec pour principal objectif d’améliorer la visibilité de l’île autonome auprès de visiteurs potentiels locaux et internationaux. Dans les valises des membres de cette délégation, il n’y a pas que des produits traditionnels mais de nouveaux produits et surtout leur emballage et leur présentation attrayante qui n’ont rien à envier à d’autres types de marchés et surtout des acheteurs à cheval sur l’hygiène alimentaire dans les sites de production.

L’aventure d’Angelikraft

Marie Angélique, directrice d’Angelikraft, fait partie de ces artisans qui ont osé franchir un nouveau cap dans le marché de l’artisanat rodriguais. Qu’est-ce qui l’a poussée à tenter une telle aventure ? Il s’agit de l’impact d’une formation qu’elle a suivie il y a cinq ans, assurée par Switch Africa, un programme d’aide conçu et financé par l’Union européenne. L’objectif principal de ce programme est de soutenir les pays du continent africain dans leur transition vers un modèle de développement durable, dont les activités ne compromettent pas l’avenir des générations futures. Cette formation a permis à Marie Angélique d’acquérir les outils nécessaires pour explorer les opportunités potentielles et identifier de nouveaux créneaux d’activités.

Marie Angélique a opté pour la fabrication de produits, tels que bougies, savon et produits cosmétiques à base de glycérine. «J’importe ma matière première de Maurice. C’est ce qui rend le coût de mes produits relativement plus élevé comparé à ceux dont la matière première est disponible sur place. Au départ, il fallait compter avec l’hésitation de la clientèle pas habituée à croiser de tels produits propres aux marchés sophistiqués sur le marché rodriguais. Cette phase d’hésitation a été franchie. La clientèle a compris que le marché artisanal rodriguais a évolué, une suite logique de son développement.»

Le goût de l’aventure et la volonté d’Angelikraft de fournir de nouveaux produits au marché de l’artisanat ont débouché sur un projet qui vise à revaloriser les propriétés médicinales de plantes que les grands-mères utilisaient pour soigner divers types de maladies. Parmi ces plantes, la citronnelle, qui serait capable de lutter contre l’anxiété, la tension élevée, ou encore d’éloigner des moustiques ; le baume du Pérou pour son rôle efficace dans les maladies de la peau comme l’eczéma, le psoriasis ou encore l’acné ; le romarin pour son efficacité contre des douleurs de rhumatismes ou les troubles de la circulation sanguine. Cette liste inclut l’ayapana cultivé dans l’arrière-cour des familles rodriguaises et connu pour ses bienfaits dans la stimulation de la digestion et le soulagement de nausées.

De nouveaux sommets pour Miel

Victoria Autre exemple de la transition de l’artisanat traditionnel vers un marché plus sophistiqué, celui de Miel Victoria Ltée qui, par son mode de fonctionnement, est une petite et moyenne entreprise (PME) avant-gardiste. Avec sa production de miel qui a cessé de se cantonner à la vente en petits logements, elle a débouché sur la conception, la fabrication et la vente d’un ensemble de produits connexes, bonbons, savons, crèmes et baumes pour le soin du visage, des cheveux et du corps. Cette entreprise est le fruit de la détermination de Marie Claude Donzé, qui a adopté Rodrigues et y est établie depuis des années, à créer une activité pour permettre à des femmes de s’émanciper financièrement.

Pas un hasard qu’en haut de la carte de visite du personnel de Miel Victoria, figure en pole position le nom de l’Association Rodrigues Entreprendre au Féminin (AREF), mise en place en 1999. Son principal objectif consiste à accompagner les Rodriguaises désireuses de monter leur entreprise. La création d’AREF s’inspire d’Entreprendre au Féminin Océan Indien, réseau qui regroupe des femmes entrepreneures des îles de l’océan Indien, notamment les Comores, Madagascar, Maurice, La Réunion et les Seychelles.

Innovation et développement durable

La commission de la Femme et de l’Artisanat n’est pas étrangère à cette émancipation des artisans de Rodrigues. Le programme de formation sur la valorisation de produits récupérés pour produire des accessoires de mode a jeté les bases pour permettre à des femmes et à des jeunes de venir avec des projets manifestant leur détermination à jouer à fond la carte de l’innovation avec une approche au développement durable qui tient compte des droits et intérêts des générations futures. La Commission de l’océan Indien a donné tout son appui à cette initiative dont le financement a été assuré par la Banque Africaine de Développement.

C’est ainsi que les participants au programme de formation ont acquis plusieurs outils devant assurer leur ambition d’évoluer sur un marché plus sophistiqué. Il s’agissait de l’acquisition d’outils et de connaissances indispensables pour évoluer dans le secteur du recyclage avec la capacité à créer des bijoux et autres accessoires, leur initiation au rudimentaire du marketing et aux techniques de vente sur un marché sophistiqué.

Cohabitation pacifique entre deux styles

La montée en flèche de ces sociétés avant-gardistes annonce-t-elle la mort ou le recul des produits caractéristiques de l’artisanat rodriguais comme les paniers en fibres de vacoa ? Ce n’est pas l’avis de Noëlle Veerapen Pasnin, directrice de Fleur d’Or, basée à Rivière-Coco, village du sud de Rodrigues réputé pour l’importance que les femmes attachent à la propreté et la protection de l’environnement. «Ces deux types de production existent côte à côte sans problème», avance-t-elle. Sa fille qui a étudié l’art à l’école apporte sa contribution avec des dessins sur les produits de vannerie. «Mo al dan lafwar Port-Mathurin pou mo al vann mo bann prodwi. Lavant mars bien. Dimounn vinn lakaz pou aste. Mo gagn komann lor telefon portab.»

La propreté

L’artisanat que ce soit dans sa forme traditionnelle ou plus sophistiquée constitue-t-il l’attrait le plus important de la destination aux yeux de ceux qui ne peuvent sans doute pas aller plus loin ? Pas si sûr, nous dit cet habitant de CampLevieux, Rose-Hill : «Les mwa dir ou, mo inn deza al Rodrig. Plizier dimounn ki finn al laba inn fer mem remark ki mwa. Seki finn pli frap mwa, se proprete ki ou trouve dan sa landrwa-la.» Comme quoi la propreté et le respect de l’environnement constituent aux yeux de certains, le facteur qui fait le plus de publicité pour cette destination.

Un des points forts du passage de cette importante délégation rodriguaise à Maurice était leur présence au Salon du prêt-à-partir du vendredi 23 au dimanche 25 août au Centre Swami Vivekananda, à Pailles. Une activité sur laquelle compte l’administration rodriguaise pour promouvoir la destination.