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Rougaille plutôt locale
Comment qualifier un pays qui s’insurge régulièrement contre le traitement plus que cavalier, voire inhumain, des Britanniques envers nos concitoyens des Chagos, mais qui ne trouve pas le moyen, cinquante ans après ces faits absolument navrants, de proposer de la place sur le MS Trochetia pour que quelques-uns de ses 289 citoyens agaléens puissent tout simplement retourner dans leurs foyers et retrouver leurs familles ?
De nation hypocrite, peut-être ? Ça va suffire ?
La vieille piste construite en 1984/85 à Agaléga avait apparemment vu son bitume s’effilocher par lambeaux entiers et ne pouvait donc plus recevoir de Dornier. Comment ne pas noter, cependant, que le Dornier n’est PAS, en 2023, sollicité pour rapatrier des Agaléens, alors qu’une piste neuve de 3 kilomètres de long, apte à recevoir des Boeing 737-900 et plus probablement des avions-espions P81, est maintenant disponible !
Des vols de Dornier, ça coûte trop cher ? Et si on économisait quelques voyages ministériels avec per diem à la clé, ça ne suffirait toujours pas pour financer ces vols fraternels d’exception ?
Comment décrire des décisionnaires qui justifièrent pourtant les grandes dépenses faites à Agaléga, pour une valeur de Rs 8,8-11 milliards siouplait ; en affirmant, selon les mots mêmes de notre PM, qu’il était question de «renforcer nos liens avec nos frères agaléens» (*) et qui trouvent, en fin de compte, que les employés d’Afcons et les bureaucrates du gouvernement ONT priorité sur nos «frères (et sœurs) agaléens» qui veulent tout simplement rentrer chez eux ?
Faux-culs, c’est trop fort, vous croyez ? Qui ose ainsi contrer la vision déclarée du PM ?
D’autant que le prochain voyage vers Agaléga est apparemment prévu pour… décembre ! Afcons permettant évidemment !
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Le Hansard du 16 juin 2017 relève la réponse du PM à la Private Notice Question du jour et souligne la généreuse décision du gouvernement indien de nous accorder une ligne de crédit de 500 millions de dollars, sur 20 ans, assortie de 7 ans de moratoire et d’un taux d’intérêt de 1,8 % l’an.
Il faut en faire mention, ne serait-ce que pour souligner qu’il faut exactement Rs 10 de plus en 2023 pour rembourser chacun de ces dollars de 2017 ! Ça nous coûtera même encore un peu plus en mai 2024 quand on commencera à rembourser, puisque le ‘trou’ de la balance des comptes courants est toujours au-delà de 10 % du PIB, alimenté par un déficit commercial insoutenable à plus de 30 % du PIB. Ce n’est pas l’activité économique du jour qui va donner du tonus à notre roupie…
Dans un pays où la monnaie est sous pression, un moratoire sur un prêt en devise lourde est, de fait, un cadeau empoisonné. Les 500 millions de dollars de 2017 demandaient Rs 17,8 milliards de remboursement. En 2023, à l’heure où vous lisez ce texte, il faudra trouver Rs 22,8 milliards, soit presque 30 % de plus…
Et ce ne seront certainement pas les projets qui devaient alors être financés par cette ligne de crédit (métro, logements sociaux, deux tours à être construites par Landscope, projets d’eau et d’énergie) qui allaient générer les dollars… dont nous pourrions, tout de même, avoir besoin !
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La décision du Directeur des poursuites publiques (DPP), Mᵉ Rashid Amine de contester la décision de la Commission de pourvoi en grâce qui recommandait la grâce présidentielle au fils du commissaire de police (CP), Chandra Dip, était nécessaire, même si elle est proprement embarrassante.
En effet, de nombreux Mauriciens avaient été interloqués quand la Commission de pourvoi en grâce avait commué la peine d’emprisonnement de 12 mois prononcé contre Chandra Dip et le DPP a raison d’intervenir puisque les procédures suivies par la Commission enfreignent la clause 75 de la Constitution, la loi suprême du pays, qu’il faut évidemment respecter à la lettre. La décision éventuelle de la Commission reste de sa prérogative entière pour le moment, mais il est aussi apparu à de nombreux citoyens qu’il est devenu nécessaire que la Commission soit transparente quand elle décide de renverser un jugement d’une cour de justice, cette dernière étant, par ailleurs, elle-même tenue de motiver ses décisions en toute transparence !
Cette démarche reste néanmoins embarrassante puisque prise sur la toile de fond du conflit, constitutionnel aussi, entre le CP et le DPP. Un conflit constitutionnel demande toujours à être réglé et celui-ci mobilise déjà deux King’s Counsels. Mais il sera forcément dommage que cette question soit obscurcie par des considérations familiales, inévitablement émotives…
Quoi qu’il en soit, le DPP, un des derniers à se battre pour préserver les contrepouvoirs qui sont nécessaires à une démocratie qui se respecte, doit être soutenu tant qu’il est du bon côté de la loi bien évidemment. D’autant que le législatif peut, à tout moment, changer les lois et pas toujours de manière raisonnable ! On voit bien, ces jours-ci, comment le législatif peut tenter d’agir pour faire taire la justice en Israël ou au Wisconsin… Ici, on avait essayé aussi avec le Prosecution Commission Bill de triste mémoire ! L’ironie c’est que ces lois peuvent toujours être contestées, devant nos cours de justice, généralement en référence avec la Constitution qui ancre ce qui est évidemment raisonnable dans un État démocratique.
C’est bien pour cela d’ailleurs qu’il faut, de temps en temps, protéger, défendre et se référer à la loi suprême qu’est la Constitution du pays.
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Le Royal Green Hospital, situé à un jet de pierre de la clinique Wellkin, à Réduit, est l’une des nombreuses initiatives récentes du secteur privé dans le domaine de la santé payante. Avec les trois hôpitaux du docteur Joomaye, labellisés Artémis, les opérations C-Care, les ambitions du groupe IBL avec Life Together, le projet d’hôpital privé de Rs 2 milliards du groupe Médine, venant tous se greffer sur le réseau de cliniques privées existantes qui investissent aussi ; voilà bien un réseau de qualité qui s’installe pour faire concurrence au service public gratuit.
Tant mieux pour le public !
Deux questions se posent cependant et elles sont certainement liées.
Autant de nouveaux services hospitaliers, alors que le service public lui-même s’étend et se renforce, pose inévitablement la question de savoir s’il y a autant de demande pour répondre à l’offre améliorée ! Concurremment, il y a la question des prix. On a l’habitude d’entendre les patients se plaindre des prix choquants pratiqués à leur sortie de clinique. Cette semaine j’ai entendu deux médecins protester vigoureusement ! À ma dernière consultation, on m’a réclamé Rs 1 600 pour 17 minutes… Dans pas longtemps, les assureurs vont sûrement augmenter leurs primes pour pouvoir répondre aux factures qui enflent et qui s’envolent ?
L’offre est certes de meilleure qualité apparente, mais la réalité est que si les prix augmentent de manière déraisonnable, la demande ne suivra pas l’offre et que l’on finira par devoir rendre visite plus souvent, au sorcier du coin…
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Parmi les solutions plus radicales envisagées pour contrer le réchauffement de la planète, on a évoqué, ici-même (**), l’idée de saupoudrer la stratosphère avec moins que 2 millions de tonnes de soufre par an, pour réduire les températures moyennes par un degré centigrade !
Le New York Times de cette semaine publie une lettre de trois scientifiques (***) proposant, plutôt que le géo-engineering de l’atmosphère, celui des océans, reproduisant à plus grande échelle, un processus naturel plus que millénaire. Ils expliquent que la poussière riche en fer, emmenée en mer par les vents, fertilise planctons et algues qui absorbent le CO2 au point où, dans le lointain passé, ce processus a même aidé à précipiter des ères glaciaires…
Il y a, bien sûr, quelques risques écologiques évidents, mais ils sont jugés bien moins conséquents que la catastrophe actuelle, y compris écologique, causée par les hydrocarbures dont les quantités consommées progressent toujours. En effet, si 84 % des besoins actuels d’énergie proviennent des hydrocarbures et que ce pourcentage va certes baisser, la quantité absolue d’hydrocarbures consommée va, quant à elle, encore augmenter pendant des décades encore !
Qui sait ? Il nous faudra peut-être solliciter la magie noire du géo-engineering ?
(*) «For far too long in the past, Agaléga was relegated to the status of poor parent “et” The infrastructural development projects currently underway on the island (of Agaléga) will go a long way towards improving the standard of living of our Agalean brothers and sisters», disait pourtant le PM au Parlement le 26 juillet 2022
(**) lexpress.mu | Les millions et les milliards… ….du climat et du PRB
(***) nytimes.com | Iron Dust Could Reverse the Course of Climate Change
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